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Le recensement électoral de nouveau en péril

Le soleil se lève sur un vendredi pluvieux. Un quart d’heure après l’heure d’ouverture, affichée à l’extérieur, le bureau d’inscription électorale du quartier de Malhangalene, à Maputo, capitale du Mozambique, est encore fermé. Un vigile, assis sur une chaise, pianote un texto sur son téléphone portable, deux bouteilles d’Heineken vides gisant à ses pieds, dans un sac en plastique. « Ils vont bientôt arriver », assure-t-il.

Et à point nommé, une jeune femme vêtue d’une chemise rose monte jusqu’en haut des marches du collège désert, ouvre la porte du bureau et prend place derrière son écran d’ordinateur. La presse ayant consacré des dizaines d’articles aux heures entières passées par les électeurs devant les bureaux d’inscription dans le cadre de la campagne mozambicaine d’inscription électorale obligatoire, personne ne se présente pour s’inscrire.

Au début de la semaine, pourtant, il en était autrement : la queue des citoyens venus s’inscrire se prolongeait jusqu’à l’extérieur du bâtiment, débordant sur la véranda panoramique de l’ancienne église coloniale. Des camionnettes pleines à craquer d’activistes en faveur de l’inscription électorale, vêtus de T-shirts jaunes, sillonnaient les rues de Maputo, appelant les piétons, à l’aide de haut-parleurs, à accomplir leur devoir civique.

Puis, le 22 novembre, dernier jour des inscriptions, le gouvernement a annoncé que les électeurs pourraient encore s’inscrire jusqu’au 15 mars, et l’effet d’urgence s’est estompé.

Cette campagne d’inscription doit ouvrir la voie à trois élections différentes, organisées sur une période de deux ans : un premier scrutin pour créer de nouvelles assemblées provinciales – dans le cadre d’un processus de décentralisation du pouvoir gouvernemental – qui aurait dû avoir lieu à la mi-janvier 2007 ; des élections municipales, programmées pour 2008 ; et des élections présidentielles, prévues pour 2009.

Le parti au pouvoir, le FRELIMO, tient les rênes du gouvernement depuis l’indépendance, en 1975. Depuis 2002, année marquée par la fin de 16 années de guerre civile au Mozambique, le FRELIMO a remporté toutes les élections, malgré les protestations du RENAMO, principal parti d’opposition, et le boycott du scrutin de 1998 par ledit parti, qui contestait l’impartialité et la transparence des élections.

Querelles, report et hésitations

Compte tenu des différents problèmes rencontrés dans le cadre des inscriptions électorales et du manque de préparation général, les élections provinciales, initialement prévues pour le 16 janvier 2008, devront avoir lieu en même temps qu’un des deux autres scrutins suivants. Le RENAMO préconise de regrouper les élections provinciales et le scrutin municipal ; le FRELIMO préfère quant à lui organiser les premières en même temps que les élections présidentielles.

Les efforts déployés par le Mozambique pour inscrire sur les listes électorales les quelque 10,5 millions de citoyens en droit de voter, premières démarches en ce sens depuis 1999, se sont caractérisés par des retards. La campagne, qui devait être lancée en août, n’a pas démarré avant la fin du mois de septembre en raison de retards observés dans la procédure de recensement de la population nationale, également entreprise cette année.

Par ailleurs, la tentative de modernisation du processus par l’utilisation d’équipement informatique s’est soldée par un fiasco : d’après des témoignages, les employés, insuffisamment formés, ne savaient pas comment utiliser les machines, et consacraient plusieurs heures à l’inscription d’une seule personne. La livraison des machines a elle aussi été retardée.

Selon le Bulletin sur les processus politiques au Mozambique, une publication des Parlementaires européens pour l’Afrique (AWEPA), seuls 400 des 3 242 postes d’inscription avaient reçu leurs ordinateurs au 24 septembre, premier jour des inscriptions.

Des querelles politiques se sont ensuivies, le RENAMO accusant le FRELIMO de saboter le vote. Le RENAMO prétend que la Commission électorale nationale (CNE en portugais), dirigée par le parti au pouvoir et chargée de déterminer où doivent être situés les postes d’inscription électorale, a autorisé l’établissement d’un plus grand nombre de postes dans les bastions du FRELIMO.

Selon le RENAMO, sa probabilité bien réelle de remporter la majorité dans les provinces du centre et du nord du pays a été compromise, le FRELIMO ayant ouvert un plus grand nombre de postes d’inscription dans ses bastions du sud du pays, que dans le nord.

D’après l’AWEPA, la province d’Inhambane, dans le sud, compte près de deux fois plus de postes que la province centrale de Sofala, bastion du RENAMO, bien qu’elle ait à peu près la même superficie pour une population moindre.

« Si les inscriptions n’ont pas été effectuées correctement, c’est très dangereux pour les élections présidentielles de 2009 ».
« Si les inscriptions n’ont pas été effectuées correctement, c’est très dangereux pour les élections présidentielles de 2009. Cela veut dire que le FRELIMO gagnera », a déclaré Fernando Mazanga, porte-parole du RENAMO. « A Maputo [dans le sud], 82 pour cent de la population est pour le FRELIMO. A Nampula [dans le nord], c’est presque également réparti entre les partis ».

Selon Juvenal Bucuane, porte-parole de la CNE, « la dispersion des postes a été déterminée en fonction de la densité démographique, sans discrimination partisane ». M. Bucuane a estimé qu’environ 50 pour cent de l’électorat était déjà inscrit.

FRELIMO contre-attaque

Les responsables du RENAMO ont même affirmé avoir découvert un document indiquant que les disparités entre les régions en matière d’accès à l’inscription étaient le fruit d’un effort délibéré de la part du FRELIMO ; pourtant, lorsqu’IRIN a demandé à voir le document, M. Mazanga a répondu qu’il n’en avait plus de copies. « Nous n’aurions pas pu inventer pareille chose », a-t-il déclaré. « Nous ne sommes pas aussi mesquins ».

« C’est faux. Absolument faux », a expliqué Edson Macuacua, porte-parole du FRELIMO. « C’est une invention du RENAMO ».

La paranoïa du parti pourrait bien être fondée. Dans son bulletin, l’AWEPA a rapporté que les bastions du RENAMO situés dans les provinces centrales de Sofala et de Zambezia comptaient en moyenne 3 000 électeurs par poste, contre 2 000 en moyenne par poste dans les autres régions du pays.

La flexibilité des dates butoirs et les retards observés dans le cadre des élections et des inscriptions montrent que la transition du Mozambique vers la démocratie multipartite est loin d’être terminée. Mais il est quasi certain que la création d’assemblées provinciales réduira la mainmise du FRELIMO sur le pouvoir.

Pour reporter les élections provinciales, il fallait amender la Constitution : ces assemblées devaient en effet avoir été créées au cours des trois années qui ont suivi les élections présidentielles de 2004.

Les gouverneurs des provinces resteront nommés, et non élus, mais ils seront pour la première fois soumis au contrôle d’une entité élue. « Ces assemblées inspecteront les gouvernements provinciaux et amélioreront le processus d’approbation relatif aux questions de moindre importance », a expliqué M. Bacuane. « Quand tout doit passer par Maputo, cela prend du temps ».

Selon le secrétariat d’Etat chargé de l’administration des élections, sur quelque 10,5 citoyens mozambicains en droit de voter, seuls 2,4 millions étaient inscrits au 30 octobre. Quoi qu’il en soit, pour l’instant, les annonces télévisées continuent d’interpeller les téléspectateurs : « Citoyennes, citoyens, vous êtes-vous inscrits ? »

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This article was produced by IRIN News while it was part of the United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs. Please send queries on copyright or liability to the UN. For more information: https://shop.un.org/rights-permissions

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