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Les réfugiés de la vallée du fleuve Sénégal ne «connaissent pas» le sida

[Senegal] Some 2,000 Mauritanian refugees live in the camp of Base Ndioum, one of the 283 refugee sites established along the Senegal river in the north-east of Senegal, on the border with Mauritania.
IRIN
Réfugiés mauritaniens vivant dans un camp au Sénégal
Comme la plupart des 2 000 réfugiés mauritaniens du camp de Base Ndioum, au nord-est du Sénégal, Maimouna Diallo affirme qu’elle n’a jamais entendu parler de l’épidémie de VIH/SIDA. Diallo, qui préside l’association des femmes réfugiées du camp, situé sur les rives du fleuve Sénégal qui fait frontière avec la Mauritanie, accueille volontiers les visiteurs, enroulée dans son ‘meulfeu’, une tenue traditionnelle mauritanienne. Mais elle écarte toute question relative au VIH, une attitude qu’a souvent rencontré Ibrahima Thiandoum, de l’Office africain pour le développement et la coopération (Ofadec), une organisation non-gouvernementale sénégalaise partenaire du Haut commissariat aux réfugiés des Nations unies (HCR), qui intervient auprès des réfugiés mauritaniens depuis 1990. «Nous avons toujours eu du mal à avoir des informations auprès des réfugiés concernant [les questions liées à la sexualité]», a dit Ibrahima Thiandoum, représentant de l’Ofadec à Podor, l’une des principales villes de la vallée du fleuve. Les camps de réfugiés de cette vallée sont nés en avril 1989, lorsque quelque 70 000 Mauritaniens ont fuit les violences nées, notamment, de litiges fonciers avec leurs voisins sénégalais. Ces événements ont fait des centaines de victimes, parmi lesquelles des commerçants mauritaniens cibles de représailles à Dakar, la capitale sénégalaise. Aujourd’hui, 20 000 de ces réfugiés, majoritairement d’origine peule, wolof et soninké, vivent toujours dans les 283 sites de fortune, faits de cases traditionnelles ou de maisons en dur qui se sont installés le long du fleuve. Comme les autres camps, Base Ndioum est composé en majorité de femmes et d’enfants, les hommes, pour la plupart des éleveurs, des agriculteurs et des vendeurs étant souvent absents, partis gagner leur vie ailleurs, dans la région ou à l’étranger. En dépit de ses réticences à parler du sida, Maimouna Diallo, parce qu’elle parle français, est considérée par les organismes intervenant au niveau de la santé dans les camps comme une ‘porte d’entrée’ à Base Ndioum. Elle participe notamment à une initiative communautaire que l’Ofadec est en train de lancer. «Nous avons mis sur pied des comités de femmes avec qui nous voulons traiter de tous les problèmes relatifs à la santé reproductive», a dit Awa Sidibe, chargée du service communautaire pour l’Ofadec. «Nous avons identifié quatre groupes distincts, à savoir les jeunes filles, les femmes, les hommes jeunes et les hommes d’âge mûr», a-t-elle dit. «Chaque semaine, nous organiserons une [discussion] sur la santé reproductive», a t-elle ajouté. Pour contourner le déni et la stigmatisation liés au virus, l’Ofadec a aussi décidé d’intégrer la sensibilisation sur le VIH/SIDA à un programme de micro-crédits destiné aux femmes réfugiées. «Nous avons engagé un travailleur social, une femme, pour leur parler des problèmes liés à la santé reproductive», a dit Thiandoum de l’Ofadec. Grâce à cette assistante sociale, deux cas de séropositivité ont été identifiés parmi les réfugiés, a dit Assane Diouf, médecin conseiller du HCR chargé de la prise en charge médicale des réfugiés. Ces deux cas avaient été détectés chez des patients présentant des symptômes de l’infection au VIH lors de consultations médicales. Pas de dépistage volontaire du VIH dans les camps Assis seul au milieu de l’infirmerie du camp, un petit bâtiment de deux pièces construit il y a 10 ans par le HCR, Mamadou Diallo, l’infirmier de Base Ndioum, a confirmé qu’en dépit des efforts déployés, il était toujours très difficile de parler du sida avec les réfugiés. Les infirmiers des camps ne savent pas plus que les autres quels sont les réfugiés infectés au VIH, a dit Diallo, lui-même réfugié dans la vallée depuis 1989. Il a précisé qu’il n’avait connaissance d’aucun cas de séropositivité dans les camps. Le dépistage volontaire et anonyme du VIH n’existe ni à Base Ndioum, ni à Dagana, un autre camp de réfugiés de la vallée du fleuve situé à plusieurs dizaines de kilomètres du premier, qui abrite près de 650 personnes. Depuis 1996, année où le HCR est passé de la phase d’assistance des réfugiés à celle d’intégration, les postes de santé des camps et leurs employés ne sont plus financés par l’organisation onusienne. Ce sont les ventes de médicaments qui servent à payer les salaires et à entretenir les structures.
Le poste de santé de Dagana s'occupe des 650 réfugiés que compte le site
«Les réfugiés sont bien intégrés dans la société sénégalaise», a dit Dillah Doumaye, représentant régional du HCR. «Il n’y a pas de raisons qu’ils ne fréquentent pas les mêmes hôpitaux que [les Sénégalais], le HCR ne peut entretenir des structures de santé parallèles dans le pays d’accueil». Cependant, le HCR ainsi que le district sanitaire, continuent à aider ponctuellement les postes de santé des camps sous forme de dons de médicaments. Le test de dépistage du VIH n’est effectué que sur des patients présentant des symptômes suspects, dans les structures de santé du district sanitaire de la localité de Ndioum. Ainsi, à chaque fois que Diallo décèle ces symptômes chez ses patients, il leur conseille de s’y rendre pour se faire dépister au VIH/SIDA. Sans grand succès jusqu’à présent. «Le médecin chef du district me dit toujours qu’il ne voit personne», a t-il dit. «Les réfugiés ont honte d’aller se faire dépister». Aucun des réfugié n’a voulu aborder la question du VIH/SIDA avec les journalistes de PlusNews. Selon des sources médicales, la plupart des personnes dépistées sont des femmes dans le cadre du programme de prévention de la transmission du virus de la mère à l’enfant, ou des malades dont l’état de santé a fini par inquiéter les médecins. Le seul centre de dépistage volontaire et anonyme dans la région se trouve à Richard Toll, à 40 kilomètres de Dagana. Ouvert en septembre 2004 par la Fondation Barcelona 2002 Sida, financée en partie par le gouvernement espagnol, le centre a jusqu’à présent dépisté 2 000 personnes, en majorité des habitants de la région. Bien que la Fondation ait invité les réfugiés à venir se faire dépister gratuitement, ils sont encore très réticents, a dit Doudou Ba, l’infirmier de Dagana également réfugié. De rares campagnes de sensibilisation En cours au Sénégal, la décentralisation de la prise en charge du VIH/SIDA est encore balbutiante dans cette région isolée. Seuls huit patients reçoivent des traitements antirétroviraux (ARV) à Ndioum. Une fois en place, la décentralisation devrait permettre à toutes les personnes vivant avec le VIH de recevoir gratuitement ces médicaments sans distinction de nationalité. Dans le cadre de l’Initiative sénégalaise d’accès aux ARV, toute personne séropositive pouvant justifier de sa résidence au Sénégal est éligible au programme national de distribution d’ARV. En attendant, les patients séropositifs sont référés au centre de traitement ambulatoire de Dakar, à quelque 500 kilomètres au sud de Ndioum, selon Diouf du HCR. Une distance qui n’encourage pas les habitants de cette région, réfugiés ou locaux, à connaître leur statut sérologique, ont reconnu plusieurs responsables sanitaires. Selon l’étude sentinelle nationale menée par les autorités en 2003, cette région du nord du Sénégal affiche l’un des taux de prévalence du VIH les plus bas du pays, soit 0,6 pour cent dans la région de Saint-Louis, contre 1,5 pour cent au niveau national. Ces chiffres, ajoutés à la réticence, voire au refus, des populations des camps d’évoquer le VIH/SIDA, n’ont pas favorisé le développement des campagnes d’information, selon des acteurs locaux du domaine de la santé. A Base Ndioum, une seule campagne de sensibilisation a été organisée depuis 1996, a affirmé l’infirmier Diallo. «C’est seulement cette année que le médecin chef du district sanitaire [de Ndioum] est venu animer une [séance d’information] sur le VIH/SIDA», a t-il dit. En revanche, à Dagana site, des campagnes de sensibilisation sur le VIH/SIDA sont organisées régulièrement à destination des quelque 650 habitants du camp, avec l’appui d’une troupe de théâtre locale. «Nous organisons des [séances d’information sur le VIH/SIDA], nous sensibilisons les personnes qui souffrent de maladies sexuellement transmissibles et les femmes enceintes», a dit Ba. «Les réfugiés savent que le sida existe et certains sont prêts à se protéger», a dit Ba, qui reçoit des préservatifs dans le cadre d’un programme de planification familiale du ministère sénégalais de la Santé. Mais seuls cinq hommes, sur les 110 que compte le camp, osent venir en demander, admet-il.

This article was produced by IRIN News while it was part of the United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs. Please send queries on copyright or liability to the UN. For more information: https://shop.un.org/rights-permissions

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