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« En voulant aider à donner la vie… j’ai été naïve »

Très jeune, déjà, Alima* rêvait de devenir sage-femme, dans un village, comme celui de son enfance. Mais sa vocation s’est éteinte il y a deux ans, lorsque, après plusieurs années passées à travailler en milieu rural, cette jeune femme d’une trentaine d’années a appris que les conditions précaires dans lesquelles elle avait exercé son métier lui avait certainement coûté son infection au VIH.

Au cours de ses 10 années de carrière, Alima n’a jamais travaillé ailleurs que dans les maternités de brousse. C’est au cours de sa dernière affectation, dans un petit village du sud du Bénin, qu’elle a commencé à tomber régulièrement malade et qu’elle a finalement appris son infection au VIH. Fortement marquée par son expérience, elle a encore du mal à retenir ses larmes lorsqu’elle évoque son histoire.

« Depuis mon enfance, j’ai toujours voulu devenir sage femme et mon lieu de préférence a toujours été le village, car j’ai grandi dans un village où j’ai vécu de près toute la misère des femmes qui devaient accoucher, sans assistance ni soutien. Je me suis toujours demandé comment je pourrais être utile à ces [femmes] un jour. Voilà pourquoi j’ai fait des études pour devenir sage-femme ».

« Lorsqu’on m’a envoyée dans un milieu rural, je n’ai fait aucune objection. J’ai travaillé dans trois villages différents pendant toute ma petite carrière. En ville, je n’ai fait que des stages ».

« Au départ, la psychose du sida n’était pas aussi prononcée [qu’aujourd’hui], donc nous ne prenions aucune précaution [particulière] dans notre travail. Il m’arrivait de travailler sans gants, surtout lorsqu’il y avait des urgences. Les agents [sanitaires] étaient très peu sensibilisés sur la question, ce qui fait qu’on posait les actes [médicaux] avec beaucoup d’ignorance ».

« Mais avec le temps, le débat sur le sida s’est mis à prendre de l’ampleur. J’étais à mon troisième poste et j’ai commencé à regretter mes comportements antérieurs, en [me disant] que, par moments, en voulant aider à donner la vie et à sauver la vie des parturientes, j’avais été naïve ».

« J’ai [commencé à] être plus prudente dans ma démarche, mais je ne pouvais pas toujours le faire, car dans les maternités de campagne, il y a très peu de moyens : pas de trousses de soins, pas de gants parfois, on est obligé d’en acheter à nos propres frais ou de se servir de sachets [sacs plastique] comme gants d’accouchement ».

« Malgré la conscience du risque, je faisais mon travail, en me disant que j’avais prêté serment pour cela ».

« Il y a trois ans, j’ai commencé à sentir des malaises chroniques, à tomber tout le temps malade et à ne plus être très active au travail. J’avais des diarrhées et des vomissements. J’ai dû prendre plusieurs fois des congés pour me reposer en ville, pensant que je manquais de repos. Au début, j’ai aussi lié cela au paludisme, me contentant de prendre des [antipaludéens] ».

« Mais avec la persistance de la maladie, j’ai commencé à m’inquiéter sérieusement. Une amie m’a demandé de faire le dépistage du VIH, en raison du risque que comportait ma profession. J’ai hésité pendant deux semaines avant de prendre la décision. J’ai été dépistée positive [au VIH] ».

« J’étais complètement abattue, je ne pouvais plus continuer ce travail. J’ai donné ma démission, même si j’étais consciente que ce n’était pas la bonne décision. Je suis revenue à Cotonou [la capitale économique du Bénin] où, depuis plus d’un an, je me suis reconvertie dans le commerce. Ma vie a changé depuis lors, j’ai perdu le moral, je ne sais plus à quel saint me vouer ».

« Je n’aime pas tellement parler de cela [l’infection], car je pense que j’aurais dû l’éviter, si j’avais [pris] un peu plus de précautions. Il [faut] que les agents de santé, même sans les moyens nécessaires, prennent toutes les mesures de sécurité individuelles lorsqu’ils font ce travail. Moi j’ai été négligente et maintenant, j’en paie les frais ».

« [Mon infection] dépend [en partie] de moi, mais au-delà de moi, c’est tout le système de santé qui est mis en cause. Les agents de santé travaillent sans le minimum [pour se protéger du VIH], parfois en ville, régulièrement en milieu rural. Tout cela doit changer, car la moindre erreur peut être fatale aujourd’hui ».

« Il faut que l’Etat accompagne les agents de santé et ne les laisse pas à leur propre sort. Le travail est délicat … et le degré d’attention doit être à la hauteur [du risque] ».

*Un nom d’emprunt

gc/ail

This article was produced by IRIN News while it was part of the United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs. Please send queries on copyright or liability to the UN. For more information: https://shop.un.org/rights-permissions

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