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« Y a-t-il un virus dans la maison ? »

Cachées derrière les hauts murs qui entourent la plupart des maisons de la classe moyenne, situées en banlieue des villes sud-africaines, se trouvent des employées de maison noires - l’une des mains-d’œuvre les plus importantes et plus marginalisées du pays.

En Afrique du Sud, la plupart des foyers comptent encore des employées domestiques. Elles représentent une main-d’oeuvre abondante et bon marché. En outre, nombre de familles font appel à leurs services pour la cuisine, le ménage et la garde d’enfants.

Les employées domestiques sont désormais couvertes par le droit du travail et ont, en conséquence, droit à des conditions de travail de base décentes et à un salaire minimum.

Cependant, elles sont toujours considérées par leurs employeurs comme des membres subalternes du foyer, a expliqué Chloe Hardy, qui a œuvré, jusqu’à l’année dernière, comme conseillère juridique auprès du AIDS Law Project, et qui travaille maintenant pour la South African HIV Clinicians Society.

« Autrefois, en Afrique du Sud, les travailleuses domestiques n’étaient pas couvertes par le droit du travail et étaient extrêmement exploitées », a-t-elle déclaré à IRIN/PlusNews. « Cette attitude persiste, [les employeurs] ne considèrent souvent pas les travailleuses domestiques comme des employées ordinaires. Une relation paternaliste s’instaure et ils pensent qu’ils doivent exercer un important contrôle sur ces personnes, surtout si ces dernières vivent chez eux ».

En outre, à l’époque du VIH/SIDA, certains employeurs pensent qu’ils doivent exercer davantage de contrôle et connaître le statut sérologique de leurs employées domestiques. Lorsqu’elle travaillait pour le AIDS Law Project, Chloe Hardy a aidé plusieurs employées de maison à porter plainte contre leurs anciens employeurs qui les avaient contraintes à subir un test de dépistage ou qui les avaient licenciées après avoir découvert leur séropositivité.

« Dans certains cas, [les employées domestiques] avaient elles-mêmes révélé [leur statut], mais leurs employeurs avaient fait preuve de beaucoup de sournoiserie », a expliqué Mme Hardy. « Par exemple, un employeur avait envoyé son employée voir son [médecin de famille] afin de subir un test de dépistage. Puis, le médecin a indiqué à l’employeur le statut sérologique de l’employée ».

Mme Hardy a toutefois reconnu qu’au fil des ans, ces cas étaient devenus plus rares. Kate Shuttleworth, fondatrice de Marvellous Maids, une agence de recrutement pour les travailleuses domestiques, a indiqué que son entreprise recevait moins d’appels d’employeurs s’informant sur la possibilité de connaître le statut sérologique de leurs employées.

Cependant, le site Web de l’agence consacre toujours une page entière à ce sujet. « Tous les jours, on nous demande si les employeurs peuvent contraindre les travailleuses domestiques à subir un test de dépistage du VIH », peut-on lire sur le site Web. « La réponse est tout simplement NON. »

Eunice Dhladhla, qui travaille au bureau de Johannesbourg du South African Domestic Service and Allied Workers Union (Syndicat sud-africain des employées de maison - SADSAWU), a indiqué que son organisme avait traité plusieurs affaires similaires au cours des 12 derniers mois.

« Nous disons aux employées : ‘refusez d’aller chez le médecin de votre patron, consultez votre propre médecin’ », a-t-elle indiqué.

Le SADSAWU a tenté d’engager quelques procédures devant le tribunal du travail, mais selon Mme Dhladhla, « nous n’avons jamais remporté de procès, car une fois que l’employée est licenciée, nous ne la revoyons plus, elle ne revient jamais nous voir. »

La plupart des employées domestiques n’appartiennent pas au syndicat et nombreuses sont celles qui ignorent les lois prévues afin de protéger leurs droits.

« La plupart d’entre elles quittent les régions rurales pour venir travailler en ville. Elles n’osent pas poser de questions à leur employeur et craignent de lutter pour leurs droits », a rappelé Mme Dhladhla.

Encore plus vulnérables ?

Le fait que beaucoup d’employées de maison quittent des zones rurales ou d’autres pays afin d’exercer leur profession constitue un facteur de risque de contamination au VIH, a estimé Chloe Hardy. Bon nombre d’entre elles vivent chez leurs employeurs et sont séparées de leur époux ou partenaire, pendant de longues périodes.

Selon une étude menée en 2005 par le Southern African Migration Project, qui propose des conseils stratégiques et effectue des recherches sur des questions liées à la migration et au développement, la plupart des 1 100 employées domestiques interrogées n’avaient aucune difficulté à accéder aux services de santé.

Cependant, leurs connaissances en matière de VIH/SIDA étaient très limitées. En effet, plus de 60 pour cent des femmes n’avaient jamais utilisé un préservatif et seulement 16 pour cent d’entre elles savaient qu’il existait un traitement sous la forme d’une thérapie antirétrovirale (ARV).

Paula*, une travailleuse domestique de 45 ans habitant à Edenvale, une banlieue de l’est de Johannesbourg, a confié qu’elle ignorait l’existence du VIH jusqu’à ce qu’elle subisse un test de dépistage et apprenne sa séropositivité. « Je voyais juste des gens tomber malades », a-t-elle reconnu.

L’année dernière, son employeur a commencé à la maltraiter et à lui assigner des tâches supplémentaires, alors qu’elle était tombée malade et toussait. Elle s’est finalement rendue dans une clinique où elle a été dépistée. Elle a tout de suite annoncé sa séropositivité à son employeur.

« Ils [les employeurs] savaient que j’étais malade, ainsi je leur ai dit que j’étais séropositive », a-t-elle ajouté. « Ils me traitent correctement maintenant. »

Des employeurs inquiets

Tous les employés domestiques ne révèlent pas leur statut à leurs employeurs, et ce, pour une bonne raison : selon Mme Shuttleworth, rares sont les clients de son agence qui désirent embaucher des travailleuses qui affirment ouvertement leur séropositivité.

« Nous avons des difficultés à leur trouver un emploi », a-t-elle déploré.

Certains employeurs, qui ignorent la manière dont se transmet le VIH, craignent qu’une personne qui travaille à leur domicile ne leur transmette le virus ou des infections opportunistes comme la tuberculose.

Bev White, propriétaire d’une entreprise et mère d’un enfant vivant également à Edenvale, a fondé un groupe de soutien pour les employeurs de travailleuses domestiques séropositives, après que la nourrice de son enfant a découvert, il y a trois ans, sa séropositivité.

Le groupe, qui n’existe plus en raison des engagements professionnels de Bev White, comptait quelque 90 membres et sa fondatrice recevait quotidiennement des appels téléphoniques et des messages électroniques de personnes en quête de conseils.

« Des personnes me téléphonaient, car elles s’inquiétaient du fait que la nourrice de leurs enfants préparait les repas. Les mères blanches de classe moyenne continuent à faire preuve d’ignorance face au VIH/SIDA », a-t-elle déclaré à IRIN/PlusNews.

Mme White a reconnu avoir été quelque peu inquiète lorsqu’elle a appris la séropositivité de la nourrice de son enfant.

« Mon médecin m’a dit que si la nourrice ou l’employée de maison souffrait de la tuberculose ou de la grippe, elle pouvait contaminer mon enfant, et cela est vrai. Cependant, à cette époque, c’est moi qui souffrais de la grippe », a-t-elle ajouté.

D’autres employeurs sont moins concernés par le risque de contamination que par les absences de leurs employées de maison. En Afrique du Sud, les employées domestiques ont droit à six semaines de congés de maladie pendant trois ans.

Cependant, peu d’employeurs notent le nombre de jours de congés de maladie que leurs employés prennent, et selon Mme Hardy, ils ont « tendance à être très sévères » lorsqu’ils pensent que ces derniers s’absentent trop.

Il peut se révéler difficile de prendre des jours de congés afin de se rendre mensuellement à la clinique, notamment pour les employées qui ont décidé de ne pas annoncer leur séropositivité à leurs patrons.

Bien qu’ils connaissent le statut sérologique de Paula, les employeurs continuent d’exiger de cette dernière une lettre du médecin chaque fois qu’elle se rend à la clinique afin de chercher son traitement ARV.

Loin de leur famille et de leurs amis, les employées de maison séropositives ont besoin de plus qu’un accès aux cliniques et au traitement. Cependant, le seul type de soutien qu’elles reçoivent de la majorité des employeurs est un soutien financier.

« Beaucoup de personnes pensent pouvoir régler le problème avec de l’argent », a regretté Kate Shuttleworth. « Elles donnent de l’argent [à l’employée de maison] et souhaitent qu’elle se débrouille seule. »

D’après Mme White, les employeurs devraient avoir de plus grandes responsabilités à l’égard de leurs employées de maison.

« Si un individu est malade, nous sommes en mesure de le soigner », a-t-elle noté. « Ces personnes prennent soin de nous, et c’est notre responsabilité de prendre également soin d’elles ».

*Un nom d’emprunt

ks/he/cd/ail


This article was produced by IRIN News while it was part of the United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs. Please send queries on copyright or liability to the UN. For more information: https://shop.un.org/rights-permissions

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