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La peur des violences empêche les femmes d’accéder aux services du VIH/SIDA

Le taux élevé de violence sexiste en Zambie empêche de nombreuses femmes d’avoir accès aux services du VIH/SIDA, selon le nouveau rapport de l’association internationale de défense des droits humains Human Rights Watch.

D’après les chercheurs, il est particulièrement difficile pour les Zambiennes d’obtenir des conseils, de l’information ou d’effectuer des tests de dépistage « en raison du contrôle perçu ou réel qu’exercent les hommes [en particulier leurs compagnons] sur leurs vies ».

Dans son rapport, intitulé Hidden In The Mealie Meal: Gender-Based Abuses and Women's HIV Treatment in Zambia [Cachés dans la farine de maïs - Maltraitances sexistes et traitement du VIH chez les femmes de Zambie], le groupe de pression new-yorkais dit avoir découvert que de nombreuses femmes prenaient des médicaments antirétroviraux (ARV), susceptibles de prolonger leur espérance de vie, sans en informer leurs maris, et qu’elles étaient forcées de recourir à des moyens extrêmes pour cacher leurs médicaments.

« Certaines femmes ont révélé qu’elles creusaient des trous dans la terre ou dans des pots de fleurs pour y cacher leurs ARV. Ces femmes récupèrent ensuite les médicaments – qu’elles doivent prendre pour le restant de leurs jours – deux fois par jour et les cachent de nouveau », peut-on lire dans le rapport ; le rapport fait également état de diverses maltraitances qui empêchent les femmes zambiennes d’entamer un régime de traitement contre le VIH, et d’y adhérer.

En Zambie, selon l’ONUSIDA, environ 1,6 million de personnes sont séropositives sur une population de 11,7 millions, et 57 pour cent d’entre elles sont des femmes ; pourtant, seules 100 000 personnes reçoivent des ARV par le biais du programme de traitement gratuit mis en place par le gouvernement.

Dans le cadre de son engagement à assurer l’accès aux traitements contre le sida pour tous d’ici à l’an 2010, la Zambie, qui affiche l’un des taux d’infection au VIH les plus élevés du monde, s’est fixé d’ambitieux objectifs en matière d’élargissement rapide du traitement contre le VIH/SIDA ; pour les chercheurs, néanmoins, le statut inférieur des femmes va grandement compromettre la réussite de ces programmes.

« Le gouvernement s’intéresse peu au traitement vu sous l’angle des spécificités sexuelles, et notamment à l’impact d’une discrimination fermement enracinée, et des violences et autres maltraitances sexistes. Cela doit changer si l’on veut que le traitement du VIH soit prodigué de manière équitable », a expliqué Nada Ali, l’auteur de Hidden In The Mealie Meal, à IRIN/PlusNews.

« Je cache les médicaments, je les mets dans une assiette et je verse de la farine de maïs, pour que quand il ôte le couvercle, il ne les trouve pas »
Cacher les médicaments

Selon le rapport, une femme, simplement désignée sous le nom de Maria T, aurait raconté : « Je ne veux pas dire à mon mari [mon statut sérologique] de peur qu’il me crie [après] et demande le divorce. Il me dit de vilains mots ».

« Je cache les médicaments, je les mets dans une assiette et je verse de la farine de maïs [semoule de maïs], pour que quand il ôte le couvercle, il ne les trouve pas [les médicaments]. Quand je prends mes médicaments, je dois m’assurer qu’il est dehors. C’est pour cela que j’ai oublié de les prendre quatre fois depuis que j’ai commencé le traitement. L’année dernière, il m’a frappé à coups de poing dans le dos ».
 
Elizabeth Mataka, envoyée spéciale des Nations Unies sur le VIH/SIDA en Afrique, a appelé à déployer des efforts concertés en vue de lutter contre la violence domestique ; elle a souligné la nécessité d’assurer l’émancipation socio-économique des femmes pour leur permettre de surmonter ce problème.

« La violence domestique est indiscutablement un des principaux facteurs de la propagation du VIH/SIDA dans ce pays, et au cœur de ce problème, il y a la question du statut économique et de l’émancipation insuffisante des femmes », a estimé Mme Mataka.

Les femmes sont souvent victimes d’une répartition inégale des biens à la suite de leur divorce, ou d’une accaparation de leurs biens par leur belle-famille au décès de leur époux, ce qui, selon les analystes, les empêche de vivre convenablement et d’adhérer à un traitement contre le sida.

Conformément à la loi coutumière en vigueur dans une majorité des 72 groupes ethniques zambiens, les femmes ont des droits de propriété limités par rapport aux hommes, et choisissent généralement de rester auprès d’un mari qui les maltraite de crainte de perdre leurs domiciles, leurs terres et le reste de leurs biens.


Photo: Manoocher Deghati/IRIN
Les femmes ont des droits de propriété limités par rapport aux hommes
« Le temps est venu de prendre des mesures concrètes, qui auront un impact direct sur la vie des femmes sur le terrain. Il n’y a pas mille façons de s’y prendre : nous devons tout simplement donner aux femmes de notre pays assez de ressources pour leur permettre de devenir indépendantes de tous ces hommes violents », a estimé Mme Mataka.

Selon Nelson Mwape, de la branche zambienne du YWCA [Young Women's Christian Association - YWCA], sur les 874 victimes de violence domestique inscrites sur les registres du YWCA depuis 2006, 427 ont été déclarées séropositives.

« Dans environ 75 pour cent des cas, les femmes sont maltraitées par leur époux ou les membres de leur famille, c’est pourquoi nous disons qu'aujourd’hui "plus aucun foyer n’est sans danger, ni pour les femmes, ni pour les enfants" ».

Une protection juridique insuffisante

Les groupes de femmes ont accusé le gouvernement zambien de n’avoir pas pris assez de mesures en vue de garantir le respect du droit des femmes : aucune loi n’a été spécifiquement adoptée pour criminaliser la violence sexiste, et le code pénal n’aborde par les maltraitances et les viols conjugaux.

Elizabeth Simwanda, coordinatrice nationale de l’entreprenariat des femmes aux bureaux zambiens de l’Organisation internationale du travail, a appelé à l’adoption d’une législation qui permettrait de réduire les cas de violence domestique.

« Nous souhaitons vivement que le gouvernement promulgue une loi spécifique sur la violence sexiste, afin que tous les coupables aient à répondre de leurs actes devant la loi. L’absence d’une législation qui traite spécifiquement de la violence sexiste explique en partie le nombre élevé de cas de femmes maltraitées ; il est plus facile de traiter ce type de cas quand on a déjà la loi de son côté », selon Mme Simwanda.

« Notre configuration socioculturelle n’encourage pas à déclarer les cas de violence domestique », a admis Matondo Yeta, secrétaire permanente du ministère des Affaires liées aux sexes. « Les victimes sont généralement amenées à craindre qu’en déclarant ce qui leur arrive, elles n’aggravent la situation, perdent leur mari et fassent souffrir leurs enfants ».

Le gouvernement a lancé un processus dans le cadre duquel tous les accords internationaux sur les droits humains rratifiés par la Zambie seront  inclus au sein de la législation nationale.

« Le gouvernement travaille également à l’élaboration d’une législation spécifique sur la violence sexiste et nous espérons que celle-ci sera achevée d’ici à la fin de l’année prochaine [2008] », a déclaré Mme Yeta à IRIN/PlusNews. « Elle permettra de protéger les femmes de la violence des hommes ».

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This article was produced by IRIN News while it was part of the United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs. Please send queries on copyright or liability to the UN. For more information: https://shop.un.org/rights-permissions

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