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Révéler sa séropositivité ou non, des avis partagés

Marie Antoinette* a commencé à se méfier des voyages fréquents de son mari en Afrique du Sud. Une fois, il a passé 15 jours sans donner des nouvelles. Elle a donc décidé d’enquêter pour savoir s’il était en train de la trahir. C’est ainsi qu’elle a découvert qu’il ne partait pas pour rejoindre une autre femme, mais pour chercher son traitement antirétroviral, car il était séropositif.

L’épouse de Miguel André est décédée en 2001. La cause officielle du décès était la fièvre typhoïde. Avant de mourir, elle a raconté à une amie qu’elle avait le sida, mais elle n’a pas eu le courage de le raconter à son mari. La nouvelle s’est répandue, et en peu de temps toute la ville de Benguela en parlait. M. André a été le dernier à apprendre que sa femme était séropositive.

Des histoires comme celles-là sont communes en Angola. Par peur de la réaction du partenaire, de l’abandon, de la discrimination, de la honte. Plusieurs raisons conduisent certaines personnes à cacher à leur conjoint ou partenaire qu’elles vivent avec le VIH.

De nombreuses personnes découvrent le statut sérologique de leur partenaire seulement après la mort de ce dernier. Très souvent, elles découvrent en même temps qu’elles aussi sont séropositives. Il est difficile, la plupart du temps, de savoir qui a transmis le virus, et si ce virus venait de relations antérieures.

La séroprévalence moyenne en Angola est de 2,5 pour cent pour une population de 16 millions d’habitants.

Des cas comme ceux-là ont entraîné une polémique autour de l’éthique du professionnel de la santé dans ses relations avec les personnes séropositives. Le débat est animé.

Certains défendent, au nom du droit à la vie, que le médecin procède à une recherche active du conjoint de la personne qui vit avec le VIH, comme cela se faisait dans le temps pour la syphilis, avec ce qu’on appelait la notification obligatoire.

D’autres pensent que le secret professionnel et la confidentialité du rapport médecin-patient doivent être préservés à tout prix.

Révéler ou pas

Pour le secrétaire exécutif du Réseau angolais des organisations contre le sida (Anaso), António Coelho, il ne doit pas y avoir de notification obligatoire du conjoint, mais un travail de sensibilisation pour que la personne séropositive parvienne à le raconter elle-même à son partenaire.

Il a rappelé, cependant, que la communication au partenaire sexuel figurait dans la loi de 2004 sur le VIH/SIDA : « … les personnes infectées doivent informer de leur statut sérologique celles avec qui elles entretiennent, ou ont l’intention d’entretenir, des relations sexuelles ».

Catarina Saldanha, secrétaire exécutive de la Mwenho, association de femmes séropositives, a défendu la communication obligatoire au conjoint par le médecin.

Pour cette femme séropositive, il ne s’agit pas de confidentialité, mais d’une façon de protéger les partenaires des personnes qui vivent avec le VIH, puisque « plus on retarde cette communication, plus il y a de risque de contamination ».

Cela est particulièrement vrai lorsqu’on considère que les relations sexuelles ne se restreignent pas au conjoint, mais s’étendent aux partenaires antérieurs et aux relations extraconjugales, selon elle.

L’activiste a raconté que certains médecins en Angola adoptaient déjà cette mesure, communiquant au patient qu’ils ne poursuivraient la prise en charge qu’avec la présence, à la prochaine consultation, du conjoint.

[Guinea-Bissau] Cacheu River near Farim. [Date picture taken: January 2005]
Photo: Ernst Schade/PlusNews
Le Réseau de personnes vivant avec le VIH et le sida a défendu plutôt une position intermédiaire.

« Tout d’abord, le médecin doit épuiser toutes les possibilités de changer le comportement du patient. Au cas où ce changement ne se produirait pas, le médecin devra alors exposer clairement sa position quant à l’infection par mensonge ou intentionnelle, qui est un crime puni par la loi », a dit Noé Mateus, secrétaire exécutif du Réseau.

« Cependant, la confidentialité peut et doit être rompue au moment où le médecin s’aperçoit que le comportement du patient expose le conjoint de ce dernier et d’autres personnes au risque d’infection », a ajouté M. Mateus.

La mystérieuse cassette

Selon Roberto Campos, un responsable du Programme commun des Nations unies sur le VIH/SIDA (Onusida), la confidentialité doit être maintenue à tout prix, sans exception.

« La personne doit être libre de choisir à qui elle souhaite révéler son statut sérologique », a-t-il estimé. « Quelles que soient les circonstances, elle seule a ce droit, personne d’autre ».

M. Campos a souligné qu’en raison de la stigmatisation, le médecin pouvait, en révélant la séropositivité d’un patient, le mettre dans une situation de condamnation publique.

« Il incombe au professionnel de la santé d’être capable de fournir à son patient toutes les informations nécessaires afin qu’il puisse prendre une décision », a-t-il dit.

Le directeur de l’hôpital Esperança (hôpital de référence pour les séropositifs à Luanda), António Feijó, a également estimé que le médecin devait encourager le patient à raconter.

« Notifier son statut sérologique à son conjoint ne peut pas être fait de façon arbitraire », a dit M. Feijó. « Le technicien de la santé doit observer l’état émotionnel du patient tout en motivant la personne qui vit avec le VIH à le raconter à son partenaire et à convaincre ce dernier de faire le test de dépistage. Il est immoral de traiter l’un, et de laisser l’autre en danger de mort ».

Suzana* s’est mariée à 17 ans avec son premier fiancé. Après 25 ans de mariage, son mari est décédé dans ses bras. Cependant, Suzana n’a su qu’il était décédé du sida que lorsque, au cours des funérailles, elle a écouté une cassette où il lui avouait sa maladie.

Son mari avait donné la cassette à un neveu, qui, croyant qu’il s’agissait d’instructions sur l’héritage, a cru bon de la faire écouter pendant la cérémonie.

S’il existait des critères plus clairs sur la confidentialité autour du VIH, le dernier message laissé par le mari de Suzana aurait pu être un message d’amour, ou même un dernier testament, mais pas la douloureuse confession de sa séropositivité.

*noms d’emprunt

ms/ll/ms/dc/ail


This article was produced by IRIN News while it was part of the United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs. Please send queries on copyright or liability to the UN. For more information: https://shop.un.org/rights-permissions

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