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Tests sur les microbicides – quels avantages pour les volontaires ?

Pourquoi est-ce qu’une femme qui se porte volontaire pour essayer un produit dont elle ne sait même pas s’il la protégera ou non d’une infection au VIH se lancerait-elle dans un long processus de tests cliniques qui lui impose de se rendre régulièrement à l’hôpital, pendant au moins deux ans ?

Les femmes sud-africaines représentent la majorité des femmes du continent africain qui ont accepté de participer aux tests cliniques sur les microbicides - une gamme de contraceptifs féminins qui se décline sous forme de gel, crèmes, films ou suppositoires pouvant être appliqués dans le vagin. Les scientifiques espèrent prouver leur efficacité en tant que moyen de protection permettant aux femmes de se prémunir contre le VIH et les autres infections sexuellement transmissibles (IST).

Beaucoup de produits microbicides se sont révélés efficaces lors de tests cliniques en laboratoires, mais avant de pouvoir être reconnus comme commercialisables par les autorités sanitaires ces produits doivent être testés sur des femmes vivant dans les régions du monde où le taux de séroprévalence est assez élevé, condition pour que les résultats soient incontestables.

Le défi pour les scientifiques consiste à mettre au point des tests qui offriraient des avantages suffisamment intéressants pour pourvoir recruter et maintenir dans le programme des participants sans leur proposer ce que les comités d’éthique considéreraient comme des primes ou des incitations financières.

Les avantages

Le South Africa’s Medecines Control Council exige que la somme de 150 rands (21 dollars américains) soit versée aux volontaires pour couvrir leurs frais de déplacement chaque fois qu’elles se rendent au centre de test. Cette somme est généralement largement suffisante ce qui, sans aucun doute, est une motivation supplémentaire pour les femmes sans emploi vivant avec de très faibles revenus.

« Un ami m’a parlé des tests gratuits et de l’argent », admet Bathabile*, 34 ans, qui vit à Soshanguve, une banlieue nord de Pretoria. Elle espérait pouvoir participer à des essais sur des microbicides en gel, le Carraguard, fournit par le Population concil, une organisation internationale à but non lucratif, mais elle n’a pas été sélectionnée car elle a été déclarée séropositive.

Zanele, 27 ans, qui vient elle aussi de Soshanguve, faisait partie des volontaires qui ont participé durant deux ans aux tests sur le Carraguard, tests qui se sont terminés en mars 2007. Elle a utilisé l’argent qui lui restait pour s’acheter des habits ; elle a néanmoins affirmé que ce n’était pas la motivation première à sa participation.

« Je voulais connaître mon statut sérologique, recevoir un traitement contre les IST et me faire faire un dépistage du cancer du col de l’utérus », a-t-elle dit à Irin/PlusNews. « Et je voulais aussi aider les autres femmes, parce que j’en connais qui sont séropositives ».

Selon le docteur Claire Von Mollendorf, du Reproductive Heath and HIV Research Unit (RHRU) de l’Université de Witwatersrand à Johannesbourg, impliquée dans plusieurs essais de microbicides, beaucoup de femmes choisissent de participer à ces tests par altruisme : « Elles veulent se rendre utiles et aider, car elles ont toutes eu un membre de leur famille qui est mort du sida ».

Au Centre de recherche de Setshaba à Soshanguve, un des trois centres où les tests sur le Carraguard sont effectués, la plupart des volontaires interviewées par Irin/PlusNews affirment que c’est avant tout pour des raisons liées à la santé qu’elles prennent part aux tests : des dépistages réguliers du VIH, des traitements pour les IST, des examens annuels du col de l’utérus, des préservatifs gratuits ainsi que des conseils de prévention sur le VIH.

« Les services de santé que nous avions ici me manquent », a dit Zanele. « La semaine dernière, je suis allée faire un test de dépistage du VIH au dispensaire public : les infirmières étaient grossières et al file d’attente était longue, alors qu’ici, je serais arrivé et on m’aurait pris en charge automatiquement ».

Rivonia, 22 ans, qui avait été sélectionnée pour les essais et avait utilisé le gel durant trois mois, a été testée séropositive et a dû arrêter les tests. En dépit du premier choc qu’elle a eu en découvrant son statut sérologique, elle n’a exprimé aucun regret sur sa participation. « Je ne me serais pas faite dépister si je n'avais pas participé aux tests », a-t-elle dit à Irin/PlusNews. « Même maintenant, il m'aurait été impossible de savoir autrement que j’étais séropositive ».

« Je ne me serais pas faite dépister si je n'avais pas  participé aux tests.  Même actuellement, il m'aurait été impossible de savoir autrement que j'étais séropositive ».
Rivonia et Bathabile faisaient partie des 30 femmes – toutes déclarées séropositives lors du premier dépistage ou devenues séropositives au cours des trois années de tests – qui ont rejoint un groupe de soutien formé par le personnel médical qui encadre les tests. Les membres du groupe se rencontrent chaque semaine, suivent des cours de cuisine dispensés par un nutritionniste, reçoivent des conseils pour une bonne hygiène de vie et des recommandations d’un docteur et se soutiennent mutuellement.

Ne pas abandonner les tests

Pour que les résultats soient considérés comme fiables, les scientifiques ont besoin que 80 pour cent des volontaires utilisent les microbicides sur une période de deux ans. Dans le cas du Carraguard, qui se présente sous la forme d’un gel, de nombreuses femmes ont affirmé qu’elles l’ont apprécié car le gel faisait aussi office de lubrifiant, ce qui augmentait le plaisir sexuel tant pour elles-mêmes que pour leur partenaire. Des commentaires favorables ont également été faits sur les autres produits.

Jonathan Stadler, un sociologue travaillant avec le RHUR, qui s’est entretenu avec des femmes à propos de leurs expériences durant les tests de microbicides, a affirmé que bon nombre d’entre elles ont dit apprécier le fait qu’elles pouvaient utiliser un produit qui leur permettrait de se prémunir contre le VIH ou les IST.

« Dans un monde où le VIH et le sida sont très présents et où la seule solution que offrons pour s’en prémunir est le port du préservatif, le fait de se voir proposer un moyen de protection plus agréable à utiliser et susceptible d’être très efficace est quelque chose d’extraordinaire pour beaucoup de personnes », a-t-il indiqué.

Il est prouvé que les femmes qui participent aux tests sans le dire à leur mari sont plus enclines à se retirer en cours de route. Le docteur Khatija Ahmed de l’Université de Limpopo, principal investigateur clinique, a affirmé que seule la moitié des 2 400 femmes ayant pris part aux essais sur le Carraguard à Soshanguve ont averti leur mari, mais qu’un faible pourcentage des participantes ont dû abandonner les tests lorsque leurs maris ont découvert qu’elles utilisaient du gel.

« Cela facile les choses lorsque le partenaire est impliqué, surtout en termes d’adhésion aux tests, mais aussi pour le traitement des IST, parce que offrons aussi des traitements pour le partenaire », a expliqué Mme Ahmed. « Néanmoins, ces tests ne visent que les femmes. Nous conseillons aux participantes d’en informer leur partenaire, mais c’est une décision qui leur appartient de prendre car chaque cas est un cas particulier ».

Zanele a attendu six mois avant de dire à son petit ami qu’elle prenait part aux tests. « J’étais nerveuse, car il a fallu du temps pour comprendre l’objet de ces tests », a-t-elle dit. « Finalement, il entendu parler de ce gel par une tierce personne qui lui a dit que 1des femmes étaient payées pour l’utiliser ; c’est alors que je lui en ai parlé. Au début, il ne voulait pas l’utiliser, mais après qu’il ait compris à quoi le gel servait, il m’a dit ‘essayons-le’ ».

Dans le cadre des tests sur le Carraguard, certaines femmes ont aussi essuyé des commentaires peu amènes de la part de leurs voisins qui les critiquaient essentiellement à propos de l’argent qu’elles percevaient. « Les gens se demandaient ‘ pourquoi étions-nous payés ? Cela signifie qu’elles seront infectées par le gel’ », a expliqué Rivonia.

Mme Von Mollendorf a indiqué qu’une forme de ‘lassitude dans le traitement’ peut s’installer après les premiers mois de tests. « Cela devient contraignant pour certaines femmes et c’est pourquoi au milieu de votre étude, il vous faut créer des évènements ou des réunions afin de le encourager à poursuivre les tests. Il faudra leur donner plus d’informations, plus souvent, sur les autres microbicides ».

Résultats

Les tests sur le Carraguard, dont les résultats sont attendus pour la fin de l’année, sont les premiers essais de microbicides à aller au bout la phase finale d’expérimentation clinique sur l’homme. « Toutes les communautés où ces tests ont été effectués attendent les résultats », a indiqué Mme Ahmed.

Les volontaires ainsi que toute la communauté seront tenues informées des résultats de ces tests, et Mme Ahmed espère que si le produit s’avère efficace, il sera commercialisé très rapidement.

« Le Population Council est d’ores et déjà en train de négocier avec des firmes pharmaceutiques pour produire ces microbicides à un coût abordable afin que les gens qui ont en besoin y aient accès le plus facilement possible », a-t-elle dit.

Pour sa part, Zanele attend que d’autres études soient menées à Soshanguve. « J’aimerais participer à d’autres tests », a-t-elle dit.

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This article was produced by IRIN News while it was part of the United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs. Please send queries on copyright or liability to the UN. For more information: https://shop.un.org/rights-permissions

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