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Insécurité et VIH peu disposés à quitter la région du Pool

Le nombre d’agressions semble avoir diminué dans le ‘couloir du viol’ entre Brazzaville, la capitale congolaise, et Kinkala, dans le Pool, mais la sécurité reste une préoccupation dans cette région du sud du pays, où les acteurs humanitaires peinent à offrir des services VIH/SIDA.

Les voyageurs qui empruntent les 75 kilomètres de route entre la capitale congolaise et le chef-lieu de la région du Pool, peuvent constater que des femmes, seules ou en groupe, n’hésitent plus à marcher le long de cet axe routier actuellement en réfection, y compris dans les zones boisées et peu fréquentées.

Une scène qu’il n’aurait pas été possible d’observer il y a à peine quatre ans, avant l’accord de paix signé en mars 2003 entre le gouvernement congolais et le Conseil national de la résistance, accord qui a mis officiellement fin aux conflits civils à répétition qui ont dévasté ce pays, et notamment la région du Pool, pendant plusieurs années.

Entre mai et décembre 1999, au plus fort de la guerre civile, l’organisation médicale Médecins sans frontières (MSF) avait recensé environ 1 200 viols, des actes utilisés comme armes de guerre, entre autres par les miliciens rebelles Ninjas, et commis pour bon nombre d’entre eux le long de l’important tronçon routier, surnommé ‘le couloir du viol’, entre Brazzaville et Kinkala.

Près d’un tiers des victimes de viols soignées par MSF était âgé entre 13 et 17 ans, et un quart entre 18 et 25 ans. Sur les 455 victimes soumises au test de dépistage du VIH à ce moment-là, 2,4 pour cent étaient séropositives.

Selon plusieurs études, les violences sexuelles ont continué à être perpétrées en nombre bien après la signature de l’accord de paix, mais aujourd’hui, « la situation s’est normalisée », a affirmé Etienne Mouanga, directeur de l’hôpital de Kinkala.

« Nous ne constatons plus ces cas de viols, d’ailleurs nous les recevons de moins en moins », a-t-il dit à IRIN/PlusNews.

M. Mouanga a reconnu que l’hôpital continuait à recevoir des patientes souffrant d’infections génitales, qui peuvent être le résultat de rapports sexuels violents, « mais elles n’ont plus autant d’incidence qu’il y a trois ou quatre ans », a-t-il affirmé.

Cette légère amélioration de la situation est attribuée en partie au redéploiement très visible de l’armée dans la ville, Kinkala abritant une importante caserne, ainsi qu’à une volonté d’apaisement du côté de l’ex-rébellion, notamment depuis l’annonce en début d’année de la décision de l’ancien chef rebelle Frédéric Bitsangou, alias le pasteur Ntoumi, de transformer son mouvement en parti politique.

En dépit de ce signe d’espoir, l’insécurité persistante, qui a poussé de nombreuses organisations à cesser leurs activités dans le Pool, reste une préoccupation majeure dans cette région qui, selon les estimations des travailleurs humanitaires, afficherait des taux de prévalence du VIH supérieurs à la moyenne nationale, estimée à 4,2 pour cent.

Pas de réduction du risque d’infection au VIH

Même si elle a pu participer à la réduction du nombre de violences sexuelles, la présence des forces de l’ordre n’a en tout cas pas diminué le risque d’infection au VIH, a noté Fructueux Babela, chef du Centre de santé intégré de la ville, une circonscription sanitaire qui couvre environ 90 000 habitants.

« Les infections sexuellement transmissibles sont [nombreuses] chez les jeunes et les militaires qui ne s’intéressent pas du tout aux préservatifs que nous distribuons ou revendons parfois à des prix défiant toute concurrence », a-t-il regretté.

Dans cette ville très touchée par la pauvreté, une personne disposant d’un salaire régulier présente un profil particulièrement recherché.

« Depuis la fin de la guerre, toutes les filles, à cause de la pauvreté, courent vers les militaires rien que pour assurer leur quotidien », a dit une jeune collégienne, qui s’est présentée sous le nom de Chimène.


Photo: Laudes Martial Mbon/IRIN
Les travaux de réfection de la route entre Brazzaville et Kinkala

Dans l’ensemble, les populations de la région du Pool, qui doivent l’amélioration de la situation sanitaire à la présence des organisations humanitaires, restent particulièrement dépourvues face à l’accès aux services de santé.

En 2005, près de 21 pour cent des structures sanitaires de la région étaient toujours fermées essentiellement en raison des destructions dues à la guerre, du délabrement des bâtiments et de l’absence de personnels de santé, a constaté le document de Procédure d’appel consolidé (CAP) de la communauté humanitaire, publié en décembre 2006.

« Actuellement, il y a un médecin pour 30 000 habitants [dans le Pool], soit six fois moins que dans le reste du pays, et un infirmier pour 12 500 habitants, ce qui est neuf fois moins qu’ailleurs au Congo », a dit Judy Mc Connery, chef de mission de MSF au Congo.

D’après la carte de la situation humanitaire publiée début mars par le Bureau des Nations Unies pour la coordination humanitaire (OCHA), sept des 13 districts du Pool affichent encore des indicateurs humanitaires au rouge, tandis que la population a doublé entre 2000 et 2005 pour dépasser 362 000 habitants, notamment en raison du retour des déplacés de guerre.

Pas de prise en charge du VIH sur place

L’hôpital principal de Kinkala, qui comptait 12 agents sanitaires en 2002, en compte désormais 47, mais seuls deux des sept médecins affectés à cette structure s’occupent de la centaine de lits que compte l’hôpital, avec une moyenne de 125 patients hospitalisés par mois, dont six souffrant de la tuberculose.

Ce centre hospitalier, qui fait figure de privilégié par rapport à d’autres de la région, dispose d’un service de transfusion sanguine, a souligné M. Mouanga, et est en discussion, à la fois avec les autorités sanitaires départementales et la toute jeune association locale de donneurs de sang, pour ouvrir une unité plus importante.

Le contrôle de la qualité de ce sang, notamment pour le VIH, s’effectue par un test de dépistage rapide. « Nous nous limitons aux donneurs parentaux, le père peut donner au fils ou l’inverse, mais nous ne sortons pas de ce contexte », a dit M. Mouanga.

« Quand nous tombons sur un cas [d’infection au VIH], nous excluons le donneur de sang », a-t-il expliqué, précisant que ce donneur était exclu de la liste des donneurs mais en aucun cas de la prise en charge thérapeutique.

Pourtant, Kinkala ne propose toujours pas de service de prise en charge du VIH : les patients dépistés positifs lors d’un don de sang, de même que la quasi totalité des personnes séropositives de la ville, sont alors orientés vers Mindouli, à 75 km de Kinkala, où MSF assure gratuitement la prise en charge médicale du VIH, y compris le traitement antirétroviral (ARV).

« Il y a plus de facilités à se faire traiter sur place [à Mindouli] », a expliqué M. Mouanga. Car même si cette ville est située à équidistance de Kinkala et de la capitale congolaise, « la population à Mindouli est moins dense qu’à Brazzaville où les patients attendent plus longtemps. »

Les 120 patients sous traitement ARV recensés dans le Pool sont suivis par MSF, la zone de Kinkala n’assurant que la surveillance sentinelle et un programme de prévention de la transmission du virus de la mère à l’enfant, a reconnu la direction départementale de la santé.

Mindouli et Kinkala sont situées sur la route entre Brazzaville et Pointe-Noire, la deuxième ville du Congo, sur la côte atlantique. Selon les autorités congolaises, ces deux villes abriteraient 80 pour cent des quelque 100 000 personnes vivant avec le VIH dans le pays, la plupart étant des femmes et des jeunes âgés de 15 à 29 ans.

lmm/ail


This article was produced by IRIN News while it was part of the United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs. Please send queries on copyright or liability to the UN. For more information: https://shop.un.org/rights-permissions

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