1. Accueil
  2. Asia
  3. Nepal

Les conséquences de la migration se font sentir dans les villages, aujourd’hui frappés par le sida

Accham fournit depuis des années une main-d’œuvre saisonnière bon marché à Bombai (Inde), une ville commerciale animée. Mais aujourd’hui, les villages de ce district isolé du Népal commencent à prendre conscience des conséquences du VIH.

A Ridikot, un village pauvre situé à près de 800 kilomètres au nord-ouest de Katmandou, la capitale, Rajan Biswakarma, un enfant de huit ans, sort la seule photographie qu’il possède de ses parents, tous deux morts de maladies opportunistes l’année dernière.

« C’est vraiment dur pour lui. La douleur m’est insupportable, à moi aussi : c’était mon fils unique », a expliqué Prasa, le grand-père de l’enfant, accablé par le chagrin. A 67 ans, celui-ci doit travailler dur pour nourrir et scolariser ses trois petits-enfants.

Selon le Forum de Gangotri pour le développement rural (FGDR), une ONG locale d’aide aux séropositifs, le nombre d’orphelins et d’enfants vulnérables augmente progressivement dans ce district, centre d’une épidémie localisée dans un pays qui présente par ailleurs un faible taux de prévalence.

Dans le village voisin de Kakadset, près de 20 orphelins ont perdu leurs parents emportés par une maladie opportuniste, et à peine quelques kilomètres plus loin, dans le Comité de développement du village de Payal (CDV), plus de 115 orphelins se trouvent dans des conditions semblables – les Comités de développement de villages sont les unités administratives élémentaires qui composent les districts.

« C’est un drame terrible : non seulement ces enfants perdent leurs parents et doivent survivre dans des conditions d’extrême pauvreté, mais ils sont en plus livrés à eux-mêmes », a expliqué Rupa Auji, activiste de la lutte contre le sida et représentante du FGDR. Certains orphelins ainsi que plusieurs veuves ont été recueillis par des membres de leur famille dotés de revenus suffisants ou d’une exploitation agricole. Bien d’autres, en revanche, ont dû migrer vers d’autres villages pour travailler comme aides domestiques, porteurs ou ouvriers agricoles, a-t-elle ajouté.

« J’ai l’impression qu’il est préférable de mourir plutôt que de survivre dans une telle misère », a déclaré Mansara Bhul, une veuve séropositive de 33 ans. Il y a quelques mois, elle s’est aspergée d’essence avec ses trois enfants, et était sur le point de s’immoler lorsqu’un voisin, attiré par les cris des enfants, l’en a empêchée. Les tentatives de suicide deviennent monnaie courante chez les villageois, selon plusieurs ONG opérant dans la région.

Mme Bhul avait été mise à la porte de chez elle par sa famille après le décès de son mari, atteint d’une maladie opportuniste. Aujourd’hui, le FGDR et l’organisation humanitaire internationale Save the Children lui versent une aide financière.

Sans espoir de soutien de la part du gouvernement, les veuves séropositives de la région ont constitué le Groupe des femmes célibataires, avec le soutien d’organisations telles que les Travailleurs sociaux bénévoles contre le sida (SOVAA) et le FGDR.

Il existe maintenant 20 Groupes de femmes célibataires dans 20 CDV, et ces groupes réunissent près de 200 membres. « Bien que nous n’ayons aucun espoir de survivre bien longtemps, nous travaillons ensemble pour générer des revenus », a indiqué Kokila Bista, 32 ans.

Les hommes vont là où l’herbe est plus verte

Depuis des décennies, les hommes d’Accham quittent le district pour trouver du travail comme porteurs ou comme agents de sécurité à Bombai, la capitale économique de l’Inde. Aujourd’hui, ils sont de plus en plus nombreux à revenir séropositifs, ayant contracté le virus dans les maisons closes népalaises de Bombai.

L’ampleur de la migration est stupéfiante. Selon la SOVAA, tous les hommes de près de la moitié des 75 CDV d’Accham, un district qui compte environ 250 000 habitants, se trouvent à Bombai, la ville portuaire de l’ouest indien.

« Ils y vont en caressant le rêve d’y devenir riches, mais ils en reviennent séropositifs, ce qui appauvrit d’autant plus leur famille », a déclaré Netra BK, un villageois de 17 ans dont le frère et le père travaillent à l’heure actuelle dans cette ville en plein essor, qui concentre 40 pour cent du commerce extérieur de l’Inde.

Une prévalence alarmante

Les professionnels de la santé sont préoccupés par les taux de prévalence élevés constatés à Accham, et les femmes bénévoles de la santé publique s’efforcent désespérément d’atteindre tous les recoins de ce district éloigné, pour sensibiliser et soutenir les populations qui vivent avec le virus.

Entre 2005 et 2006, près de 20 pour cent des 500 personnes venues subir des tests de dépistage au Centre de conseil et de dépistage volontaire du VIH (CDV) d’Accham ont été déclarées séropositives, selon l’Association himalayenne de lutte contre les IST et le sida (HAASA), l’ONG locale qui dirige le centre.

En dépit de ces statistiques, pourtant, le district ne disposait pas « d’un seul poste sanitaire ni d’un seul hôpital doté d’un service de traitement antirétroviral (ARV) », a déploré Krishna Rawal, de l’HAASA.

« Nous recevons déjà 100 personnes séropositives chaque semaine, qui viennent nous demander de leur fournir un traitement ARV. Mais nous ne pouvons rien faire d’autre que les envoyer vers les hôpitaux des villes », a expliqué M. Rawal.

Selon les estimations de certaines ONG locales, près de 500 personnes seraient mortes au cours des trois dernières années, mais leur décès n’a pas encore été officiellement déclaré, le corps de la plupart d’entre elles ayant été brûlé par les membres de leur famille, en même temps que les rapports médicaux attestant de leur séropositivité, à en croire le FGDR.

Le taux de prévalence au Népal s’élève à 0,5 pour cent, mais l’Onusida a averti que la situation était en train de changer rapidement, et que l’épidémie de VIH était concentrée au sein de deux groupes à risque : les toxicomanes procédant par injection et les travailleuses du sexe.

nn/kn/oa/nh/ads


This article was produced by IRIN News while it was part of the United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs. Please send queries on copyright or liability to the UN. For more information: https://shop.un.org/rights-permissions

Partager cet article

Get the day’s top headlines in your inbox every morning

Starting at just $5 a month, you can become a member of The New Humanitarian and receive our premium newsletter, DAWNS Digest.

DAWNS Digest has been the trusted essential morning read for global aid and foreign policy professionals for more than 10 years.

Government, media, global governance organisations, NGOs, academics, and more subscribe to DAWNS to receive the day’s top global headlines of news and analysis in their inboxes every weekday morning.

It’s the perfect way to start your day.

Become a member of The New Humanitarian today and you’ll automatically be subscribed to DAWNS Digest – free of charge.

Become a member of The New Humanitarian

Support our journalism and become more involved in our community. Help us deliver informative, accessible, independent journalism that you can trust and provides accountability to the millions of people affected by crises worldwide.

Join