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Le VIH en milieu rural – alerte au risque de propagation dans les caféières

Comme ses voisins du district de Yirgacheffe, dans le Sud de l’Ethiopie, Birhanu Gizamu est un petit exploitant de café. En revanche, contrairement au reste de sa communauté, il n’hésite pas à sortir la carte bleue, aujourd’hui chiffonnée, qu’il a reçue à la clinique et qui indique son statut sérologique.

« Les résultats étaient négatifs », a observé fièrement M. Gizamu, 42 ans, en tendant sa carte pour vérification. « Je suis allé faire un test de dépistage [VIH] en 2005. Ma femme a insisté pour que j’y aille, alors nous y sommes allés ensemble ; je servais dans l’armée avant de devenir cultivateur, alors je savais que je courais un risque ».

Le déclenchement de la guerre de 1998-2000 entre l’Ethiopie et l’Erythrée voisine a gonflé les rangs de l’armée : celle-ci rassemblait désormais quelque 350 000 soldats, qui passaient des mois entiers dans les régions frontalières où le commerce sexuel était florissant. A la fin du conflit, la plupart de ces hommes ont été démobilisés et s’en sont retournés dans leur zone rurale pour redevenir paysans.

En Ethiopie, où 85 pour cent des 71 millions d’habitants vivent dans des régions rurales encore conservatrices, l’aisance de Birhanu à parler du sida est loin d’être la norme.

« Le VIH est une chose très peu courante dans des régions rurales comme celle-ci », a-t-il expliqué. « J’encourage les autres paysans à aller se faire dépister – je pense que c’est important – mais je n’ai jamais entendu dire que qui que ce soit était séropositif ou avait le sida ».

Selon les estimations du ministère de la Santé, la prévalence du VIH en milieu rural s’élèverait à 1,9 pour cent, contre 3,5 pour cent en moyenne, sur l’ensemble du territoire. Néanmoins, la population est peu sensibilisée et les dépistages sont rares dans l’arrière-pays, assez pour susciter l’inquiétude et laisser penser que la prévalence réelle pourrait être plus élevée.

Le gouvernement a reconnu qu’il fallait s’intéresser tout particulièrement aux milieux ruraux, et notamment à l’industrie du café, qui fait vivre 20 pour cent de la population éthiopienne.

« Il existe deux types de planteurs de café », a expliqué Gashaw Mengistu, coordinateur du Centre de ressources sur le VIH/SIDA d’Addis-Abeba, la capitale. « Les exploitants de petites plantations et les paysans qui travaillent sur des plantations étatiques et vivent sur place, dans des camps ; c’est dans ces camps que les conditions sont propices à la propagation du virus ».

Selon Gashaw, diverses populations agricoles vivant à des kilomètres à la ronde convergent vers ces exploitations de café en quête d’un travail. Les hommes laissent souvent derrière eux leurs femmes et leurs familles et se choisissent une autre épouse ou une maîtresse dans les camps. Plus de 100 000 personnes sont logées dans les plantations, où les distractions sont rares et où le sexe fait partie des quelques loisirs disponibles.

« Selon l’entreprise d’Etat, un grand nombre de ses employés meurent du VIH/SIDA dans ces exploitations de café ; beaucoup en meurent et beaucoup y sont vulnérables », a poursuivi Gashaw, en ajoutant que le VIH représentait également une menace pour les petits exploitants.

« A Yirgacheffe, les petits exploitants peuvent refuser de croire que le VIH/SIDA est un problème, mais la maladie se transmet de plus en plus des milieux urbains aux zones rurales, et beaucoup de gens en meurent », a-t-il averti.

Les populations étant peu sensibilisées au VIH/SIDA, la stigmatisation et les discriminations sont fréquentes, à tel point que la moitié des femmes des milieux ruraux interrogées en 2006, à l’occasion d’une étude Démographie et santé, ont admis qu’elles ne voudraient pas s’occuper chez elles d’un membre de leur famille séropositif. C’est pourquoi, plutôt que de demander à être traités, de nombreux séropositifs demeurent dans le déni de leur état.

« Le gouvernement a fait part de ses préoccupations, pourtant peu de mesures sont prises pour faire évoluer l’état des choses », a observé Gashaw. « Le peu d’études menées et de programmes de prévention mis en place dans ces régions caféières est très préoccupant ».

Reconnaissant la gravité de la situation, Sisay Asrat, le gérant de l’Entreprise éthiopienne de développement des plantations de caféiers, a déclaré à IRIN/PlusNews que le ministère du Travail avait fait de l’industrie du café un domaine de priorité dans la lutte contre le VIH/SIDA, et que des démarches étaient entreprises pour améliorer la sensibilisation et encourager le port du préservatif.

« Le problème est très grave dans ces régions », s’est-il inquiété. « La plupart des personnes qui travaillent là [dans ces exploitations] ne sont pas éduquées, mais nous tentons de leur expliquer comment se protéger ».

L’industrie du café rapporte plus de 300 millions de dollars US par an à l’Ethiopie et représente 54 pour cent de son produit intérieur brut.

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This article was produced by IRIN News while it was part of the United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs. Please send queries on copyright or liability to the UN. For more information: https://shop.un.org/rights-permissions

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