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Le long et angoissant voyage vers la maternité

La dernière chose que Yinka Jegede-Ekpe aurait pu imaginer, lorsqu’elle a été testée positive au VIH il y a 10 ans, était de se marier et surtout de devenir un jour l’heureuse maman d’une petite fille en bonne santé.

Première Nigériane à avoir révélé publiquement sa séropositivité, cette jeune femme dynamique de 29 ans a accouché en 2006 d’une petite fille séronégative, grâce au programme de prévention de la transmission du virus de la mère à l’enfant (PTME), qui permet de réduire considérablement le risque d’infection du nouveau-né grâce à un cocktail d’antirétroviraux (ARV) administré à la mère et au bébé.

« C’est comme un rêve devenu réalité », a-t-elle dit à IRIN/PlusNews. « Ce moment est historique, parce que par la grâce de Dieu et les avancées dans le traitement des personnes séropositives, quelqu’un comme moi qui n’aurait jamais pu imaginer connaître un jour les joies de la maternité est aujourd’hui la fière maman d’une petite fille ».

Mme Jegede-Ekpe et son mari, un officier de la marine lui aussi séropositif, ont espéré cet enfant pendant cinq ans. Ils ont décidé, en accord avec leurs médecins, d’avoir leur enfant par la voie naturelle, plutôt que par insémination artificielle, et ont donc eu des relations sexuelles non protégées le temps de la période de conception –un choix qu’elle déconseille aux couples sérodiscordants, dont l’un ou l’autre des conjoints est séronégatif.

En dépit des soins particuliers dont elle a bénéficié dans le cadre de la PTME, la grossesse de cette infirmière de formation ne s’est pas déroulée sans embûches.

Alors qu’elle était à la moitié de son terme, et en dépit d’un étroit suivi médical, Mme Jegede-Ekpe a développé un herpès, une infection opportuniste liée au VIH/SIDA assez commune, qui s’est révélé « très douloureux », s’est-elle souvenue.

Pour aggraver la situation, son taux de CD4 –qui permet de mesurer la résistance du système immunitaire- est tombé brutalement.

« [Les médecins] ont découvert que j’étais résistante à tous les [ARV] que je prenais jusque là et qu’il fallait changer la majeure partie de mon traitement. J’étais dans ma 37ème semaine [de grossesse] », a-t-elle raconté dans Genevieve, l’un des principaux magazines féminins du Nigeria, qui a fait de son histoire la couverture de son édition de mars. « J’ai pris le [nouveau] traitement pendant une semaine, puis j’ai subi une intervention pour déclencher l’accouchement. »

Le moment de l’accouchement a été particulièrement éprouvant. « Je ne sais même pas comment décrire à quel point j’étais angoissée et nerveuse », a dit Mme Jegede-Ekpe. « Mais à la seconde où le bébé est apparu, elle était tellement dodue et belle que toutes mes craintes ont disparu. »

« Mon mari n’a jamais douté un seul moment que le bébé serait en bonne santé, il n’arrêtait pas de me répéter ‘ne t’en fais pas’, parfois il m’appelait à minuit pour me dire ‘c’est l’heure pour toi (et le bébé) de prendre [vos médicaments]’ », a-t-elle ajouté.

Lorsque le test de dépistage du VIH effectué sur le bébé a révélé que la petite fille était séronégative, Mme Jegede-Ekpe a laissé éclater sa joie. « Je disais toujours à mon mari que je me sentirais tellement irresponsable si quoi que ce soit arrivait à cet enfant », a-t-elle avoué.

Le plus difficile pour elle a été de ne pas allaiter son enfant. L’allaitement exclusif jusqu’à six mois est recommandé aux mères séropositives qui ne peuvent avoir accès à de l’eau potable et à des substituts de lait maternel, mais dans le cas de Mme Jegede-Ekpe, les formules pédiatriques ont été jugées comme la meilleure option.

Des services encore peu accessibles

En tant que directrice de l’ONG Communauté des femmes vivant avec le VIH au Nigeria, Mme Jegede-Ekpe est bien placée pour savoir qu’elle a eu de la chance : bien que les programmes de PTME soient de plus en plus disponibles au Nigeria, la grande majorité des femmes enceintes séropositives n’en bénéficient toujours pas.

Selon les statistiques des Nations Unies, plus de 1,6 million de femmes âgées de plus de 15 ans sont infectées au VIH dans ce pays de plus de 130 millions d’habitants. Le taux de prévalence du VIH parmi les femmes enceintes ayant accepté le test de dépistage est estimé à 4,4 pour cent.

Des efforts ont été fournis pour sensibiliser les femmes enceintes sur l’intérêt de faire le test de dépistage du VIH, et 160 centres de traitement du VIH et hôpitaux proposent la PTME dans le pays, mais ils se trouvent essentiellement en zones urbaines.

Moins de un pour cent de ces femmes recevaient des ARV dans le cadre de la PTME fin 2005, selon les Nations Unies. Le Plan d’urgence du président Bush contre le sida (Pepfar), l’un des principaux bailleurs de fonds de la PTME au Nigeria, fournit aujourd’hui des ARV à 5 340 femmes enceintes séropositives, dans 12 des 36 Etats du pays.

D’autre part, même si la PTME est gratuite, les coûts qui y sont associés sont tels que la plupart des femmes ne peuvent avoir accès au programme, a dit Mme Jegede-Ekpe à IRIN/PlusNews.

« La gratuité dite globale de la PTME n’est pas assez globale, il faut y ajouter le coût de la césarienne, des séries de tests, et même la nourriture pour l’enfant qui n’est pas inclue », a-t-elle regretté. « Il y a bien plus dans la PTME que les ARV, et le gouvernement doit faire quelque chose à ce niveau s’il veut réduire le taux de transmission du virus de la mère à l’enfant dans notre pays ».

En dépit des nombreux défis que doivent relever les femmes enceintes séropositives pour avoir des enfants et leur éviter l’infection, Mme Jegede-Ekpe a estimé que « cela en valait la peine ».

Mme Jegede-Ekpe fait partie d’un nombre de plus en plus important de femmes séropositives activistes de la lutte contre le sida au Nigeria à avoir franchi le pas de la maternité, pour prouver que contrairement à une idée largement répandue dans ce pays qui affiche un taux de prévalence du VIH de quatre pour cent, une femme séropositive pouvait avoir un enfant séronégatif.

« La bonne chose, c’est que nous avons maintenant de nombreux exemples de femmes séropositives qui ont eu leur bébé sans complications ou presque », a-t-elle dit. « Etre testé positif au VIH ne devrait dès lors plus apparaître comme une condamnation à mort, nous devrions profiter de ce que la science nous offre pour enrayer la propagation de l’épidémie, non seulement de la mère à l’enfant mais aussi parmi la population en général. »

lo/ail


This article was produced by IRIN News while it was part of the United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs. Please send queries on copyright or liability to the UN. For more information: https://shop.un.org/rights-permissions

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