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Baisse du taux de prévalence du VIH, pour combien de temps ?

Dans un climat économique et politique difficile, l’annonce de la baisse du taux de prévalence du VIH/SIDA au Zimbabwe a reçu un accueil mitigé. Doit-on cette bonne nouvelle à un changement de comportement ou à des statistiques faussées ?

Plus tôt dans le mois, les données d’une enquête démographique et de santé du Zimbabwe (ZDHS) portant sur la période 2005-2006 ont révélé que le taux de prévalence du VIH/SIDA avait chuté de 20,1 pour cent à 18,1 pour cent parmi la population adulte.

Toutefois, les femmes demeurent les principales victimes de l’épidémie : 21,1 pour cent des femmes adultes sont séropositives contre 14,5 pour cent des hommes adultes.

Le Zimbabwe, l’un des pays les plus ravagés par la pandémie de VIH, est en plein marasme économique : il est confronté à une crise alimentaire, à une pénurie de pétrole et l’inflation a atteint les 1 200 pour cent.

Etant donné les grandes difficultés économiques et les problèmes de sécurité alimentaire qui sévissent dans le pays, la baisse du taux de prévalence semble indiquer que le nombre de personnes mourant des suites du sida a dépassé le nombre de nouvelles infections.

Mais à l’occasion d’une conférence sur le Plan d’aide d’urgence du Président des Etats-Unis contre le sida (Pepfar), le docteur Owen Mugurungi, responsable de l’unité VIH/SIDA du gouvernement, a déclaré que, selon le résultat de nouvelles enquêtes, le taux de mortalité n’était pas à lui seul à l’origine de la baisse du taux de prévalence et que le nombre de nouvelles infections avait également chuté.

Mortalité et changement de comportement

Karen Stanecki, épidémiologiste auprès d’Onusida, a expliqué que de nombreux décès ainsi que «certains changements de comportement, dont la réduction du nombre de partenaires [sexuels] et l’augmentation de l’usage du préservatif» avaient été enregistrés dans ce pays d’Afrique australe.

Simon Gregson, professeur en épidémiologie à l’Imperial College de Londres, partage ce point de vue.

Au début des années 1980, le Zimbabwe est devenu l’un des premiers pays de la région à mettre en place des programmes de contrôle des infections sexuellement transmissibles (IST), a-t-il rappelé.

Puis au début des années 1990, le gouvernement a lancé une campagne de distribution gratuite de préservatifs, qui n’a cessé de prendre de l’ampleur au fil des ans.

L’augmentation de l’usage du préservatif illustre bien ce changement de comportement. Au cours des années 1990, le secteur public était le principal fournisseur de préservatifs masculins, mais aujourd’hui, plus de la moitié des préservatifs sont distribués via des organisations de marketing social.

Ainsi, comme la plupart des préservatifs sont désormais vendus et non distribués, il semblerait que les Zimbabwéens utilisent plus fréquemment les préservatifs, a expliqué M. Gregson.

«Selon les résultats des recherches scientifiques menées dans [la province du] Manicaland, les Zimbabwéens deviennent sexuellement actifs plus tard qu’autrefois, ils changent moins souvent de partenaires sexuels - notamment les femmes qui ont plusieurs partenaires - et utilisent plus régulièrement les préservatifs», a indiqué un rapport de l’Onusida.

Il est cependant difficile d’établir le moment où le taux de prévalence s’est mis à baisser.

«Nous ne pouvons pas indiquer avec précision le moment où la baisse a débuté. Mais il semblerait que la population ait commencé à changer de comportement à la fin des années 1990. Il n’est pas à exclure que les programmes d’intervention mis en place au début des années 1990 aient également contribué et continuent à contribuer [à cette baisse]», a souligné l’auteur du rapport, M. Gregson.

Et maintenant ?

Les organisations non gouvernementales (ONG) ont accueilli avec précaution les données concernant la récente baisse du taux de prévalence et préfèrent attendre avant de tirer des conclusions trop hâtives.

Elles ont également déploré les conditions que connaît actuellement le pays, qui selon elles entravent la lutte contre l’épidémie.

En effet, dans le cadre de l’opération Murambatsvina (‘Dégager les ordures’), menée l’année dernière, afin de mettre un terme aux activités commerciales illégales et à la criminalité, des habitations qu’avaient achetées ou que louaient des gens pauvres ont été démolies.

Les ONG engagées dans la lutte contre le sida tentent aujourd’hui encore de localiser les personnes séropositives déplacées et craignent que la plupart d’entre elles n’aient dû interrompre leur traitement.

Selon les ONG, les femmes seraient davantage exposées au VIH/SIDA, car la violence à l’égard des femmes et des jeunes filles est en augmentation et les jeunes filles sont contraintes à vendre leur corps pour survivre.

«Si elle [la baisse du taux de prévalence] peut être attribuée à un changement de comportement, il faut que nous sachions quel type de changement s’est opéré et les raisons pour lesquelles ce changement précis a eu lieu. Ainsi, nous pourrons tirer profit de ce changement et voir ce qui marche et ce qui, au contraire, ne marche pas. Mais nous devons agir vite, avant que l’épidémie ne fasse davantage de ravages», a déclaré Lindiwe Chaza, responsable du Réseau sida du Zimbabwe.

Les spécialistes n’ont pu s’empêcher de faire des comparaisons entre les pays plus riches, comme l’Afrique du Sud et le Botswana, qui ne sont pas parvenus à enregistrer des baisses significatives du VIH/SIDA, et le Zimbabwe, un pays exsangue qui a réussi à faire chuter ses taux d’infection au VIH.

Ils se sont également penchés sur le lien qui pouvait exister entre la chute du taux de prévalence du VIH/SIDA et le nombre important d’émigrés zimbabwéens.

Cependant dans son rapport, l’Onusida souligne que «tout mène à croire que la migration internationale a été forte, mais, faute de données, il impossible de déclarer qu’elle a contribué à la baisse du taux de prévalence. Néanmoins, il semblerait que le taux de migration nécessaire à une baisse du taux de prévalence au sein d’une population qui ne modifie pas ses comportements n’est pas été atteint au Zimbabwe.»

«Les gens ont tendance à oublier qu’il faut du temps avant que des programmes finissent par avoir des répercussions [sur les statistiques]. Au milieu des années 1990, le Zimbabwe avait certainement plus de ressources qu’aujourd’hui et davantage de programmes communautaires et locaux étaient menés», a expliqué Karen Stanecki.

Elle a également reconnu que la baisse du taux de prévalence du VIH ne rendait pas compte de la situation actuelle du Zimbabwe, mais qu’elle «pouvait renverser la tendance».

Les conséquences des opérations de nettoyage se feront ressentir dans les deux ou trois prochaines années, a estimé M. Gregson.

This article was produced by IRIN News while it was part of the United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs. Please send queries on copyright or liability to the UN. For more information: https://shop.un.org/rights-permissions

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