« Il n’y a pas d’établissement de santé dans notre district. Je dois donc me rendre jusqu’ici pour obtenir un traitement. Je n’ai pas encore vu le médecin et ça fait longtemps que j’attends pour le voir », a dit à IRIN un habitant de la province voisine de Helmand qui a conduit pendant quatre heures pour arriver jusqu’ici et qui attend depuis le lever du soleil.
D’après l’organisation non gouvernementale (ONG) Emergency, le nombre d’admissions liées à la guerre dans ses établissements de santé dans les quatre premiers mois de 2013 a progressé de 42 pour cent par rapport à la même période l’an dernier. La situation est particulièrement mauvaise à Helmand, où l’augmentation atteint près de 80 pour cent.
Ces chiffres concordent avec les rapports du Bureau de la sécurité des ONG en Afghanistan (ANSO) et de la Mission d’assistance des Nations Unies en Afghanistan (MANUA), qui font tous deux état d’une recrudescence des violences.
Selon l’ANSO, le nombre d’attaques par l’opposition armée a augmenté de 47 pour cent entre janvier et mars de cette année, marquant un retour aux niveaux de violence atteints en 2011, les plus élevés jamais enregistrés.
D’après les chiffres de la MANUA, le nombre de victimes civiles dans la deuxième moitié de 2012 a progressé de 13 pour cent par rapport à la même période l’année précédente. L’usage accru d’engins explosifs improvisés (EEI) est une cause importante des blessures subies par les civils.
La violence entraîne ainsi un accroissement de la demande de services médicaux, mais elle crée aussi un climat d’insécurité pour le personnel de santé.
« Le nombre de cas liés à la guerre que nous recevons à Mirwais a nettement augmenté au cours des quatre derniers mois », a dit à IRIN Farhad Dawod, le directeur de l’hôpital.
« Jusqu’à présent, nos employés n’ont pas été menacés, mais ils ne se sentent pas à l’aise au sein de la communauté parce que la paix n’existe pas. Les attaques terrorisent les habitants. »
Mirwais accueille 500 à 600 patients ambulatoires par jour et voit 3 à 4 décès maternels par mois. Le taux d’occupation des lits est de 87 à 90 pour cent chez les adultes et de 105 pour cent chez les enfants hospitalisés aux soins intensifs, ce qui signifie qu’il arrive que trois enfants malades se partagent le même lit.
Selon le groupe de responsabilité sectorielle chargé de la santé, qui rassemble les ONG et les agences des Nations Unies qui travaillent dans le secteur en Afghanistan, Kandahar est l’une des neuf provinces (sur 34) qui ont connu une augmentation de 40 pour cent des incidents sécuritaires affectant des établissements de santé publics, du personnel de santé ou des patients.
Plus d’établissements de santé non fonctionnels
En février dernier, l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) a rapporté une augmentation de 40 pour cent du nombre d’établissements de santé qui n’étaient pas fonctionnels en 2012 par rapport à l’année précédente.
L’insécurité et les pénuries de financement ont empêché 540 centres de santé de l’ensemble du pays de rester ouverts ou de continuer leurs activités quotidiennes normales.
Le rapport de l’OMS indique par ailleurs que la suspension des services ou la fermeture de ces établissements de santé était l’un des principaux facteurs permettant d’expliquer les 283 cas d’apparition de maladies que l’organisation a dû gérer au cours des dix premiers mois de 2012.
« Les hôpitaux du sud-ouest du pays sont mieux lotis que ceux qui sont situés dans d’autres régions », a dit M. Dawod. Mais, « comme vous pouvez le voir, même les hôpitaux de Kaboul connaissent des pénuries de médicaments essentiels et ont de la difficulté à répondre à la demande. »
En dépit de la recrudescence des attaques observée à Kaboul, en particulier au cours du dernier mois, les médecins qui travaillent dans les hôpitaux gouvernementaux de la capitale ont dit à IRIN qu’ils n’avaient pas été affectés par l’intensification globale des violences. Ils ont cependant ajouté qu’ils devaient toujours composer avec les mêmes pénuries chroniques que par le passé.
« Les hôpitaux de Kaboul n’ont observé aucune différence notable [à la suite de la recrudescence des violences sur l’ensemble du territoire], mais il ne fait aucun doute que nous sommes confrontés à de nombreux problèmes en ce qui concerne la qualité et l’uniformité des services de santé », a dit à IRIN Ajmal Mushkanny, un spécialiste des soins intensifs qui travaille dans un établissement privé et dans un hôpital d’urgence géré par le gouvernement à Kaboul.
« Les travailleurs de la santé ne manquent pas à Kaboul, mais le problème, c’est de trouver ceux qui ont le bon niveau de qualification. »
Les soins médicaux pour les femmes
Selon la MANUA, le nombre de victimes civiles de sexe féminin a augmenté de 20 pour cent en 2012 par rapport à l’année précédente. Or les centres de santé et les hôpitaux sont confrontés à des pénuries de travailleuses de la santé qualifiées.
« La médiocrité des services de santé et le manque de personnel et de médecins de sexe féminin ont un impact important sur les soins infantiles et maternels », a dit M. Dawod. « Nous avons été fortement affectés par la pénurie de personnel féminin qualifié, et notamment d’obstétriciennes/gynécologues, qui s’est traduite par une hausse de notre taux de mortalité maternelle. »
Selon un rapport sur la santé réalisé par plusieurs organisations, les femmes comptent pour 28 pour cent de la main-d’œuvre de santé dans le pays, incluant le personnel de soutien non qualifié, mais elles se retrouvent surtout dans les domaines de la pratique sage-femme et de la santé communautaire.
Malgré les progrès réalisés en matière de mortalité maternelle, l’Afghanistan demeure l’un des pays du monde où il est le plus difficile d’être mère. Selon l’OMS, seulement 40 pour cent des naissances ont lieu en présence de personnel médical formé.
D’après le Bureau de la coordination des affaires humanitaires des Nations Unies (OCHA), le secteur de la santé afghan a réussi à fournir des services d’urgence à quelque 708 000 personnes (sur les 1,6 million qui ont été ciblées pour des interventions cette année) dans les cinq premiers mois de 2013.
bm/jj/cb-gd/ld
This article was produced by IRIN News while it was part of the United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs. Please send queries on copyright or liability to the UN. For more information: https://shop.un.org/rights-permissions