Les quatorze années de guerre civile ont interrompu la scolarité de toute une génération de Libériens. Et pour de nombreux jeunes, ce qu’il leur semble le plus important après les élections d’octobre prochain, la première depuis la fin du conflit en août 2003, c’est de pouvoir suivre une bonne formation.
Mais dans ce pays d’Afrique de l’ouest où le taux de chômage est estimé à 85 pour cent, les frais de scolarité d’un enfant représentent près de la moitié du revenu annuel d’un libérien moyen qui est d’environ 115 dollars américains.
« Dans la capitale Monrovia, 60 à 80 pour cent des jeunes adolescentes sont si déterminées à suivre une formation, qu’elles sont prêtes à vendre leur corps pour la financer », a révélé Save the Children dans son rapport publié lundi dernier.
Les enquêteurs de l’organisation caritative ont découvert ce problème par hasard alors qu’ils menaient une étude plus globale sur l’éducation au Liberia.
Mais leurs conclusions n’ont rien de surprenant pour les autorités locales chargées de l’enseignement.
« C’est une des conséquences de la guerre », a confié mardi dernier à IRIN Erasmus Saydee. « En raison de la guerre, leurs parents se sont retrouvés sans emploi et la plupart d’entre eux ne peuvent pas payer les frais de scolarité de leurs enfants ».
« C’est un problème très sérieux. Promenez-vous dans les rues le soir, autour des hôtels et des boîtes de nuit, et vous verrez traîner dans ces endroits des jeunes filles de quinze ans », a-t-il déclaré.
« Je rencontre souvent quelques-unes de ces jeunes filles le soir alors que je sais qu’elles devraient être en train d’étudier. Et lorsque je leur demande ce qu’elles font dans les rues à une heure si tardive, elles me répondent qu’elles se battent pour gagner de l’argent ».
David Brent, le directeur d’un autre établissement scolaire admet que ce problème est réel.
« C’est très étrange dans notre système scolaire », commente-t-il. « Puisque les amants ou les petits amis paient leur scolarité, elles sont obligées de passer la soirée avec eux, ce qui les empêche de réviser leurs cours ».
Save the Children admet que les frais de scolarité sont le plus grand handicap pour les jeunes filles scolarisées, et près de 60 millions de filles dans le monde ne vont pas à l’école.
Mais le problème la scolarisation au Liberia, mis en lumière après un sondage réalisé auprès de plus de 300 filles, a des implications qui vont bien au-delà du cadre scolaire.
Chacun des 22 candidats à l’élection présidentielle s’est engagé à scolariser le plus grand nombre d’enfants libériens possible s’il était élu à l’issue du scrutin du 11 octobre.
Mais dans un pays où le gouvernement compte sur l’aide internationale pour payer ses fonctionnaires et assurer la sécurité, il sera difficile pour les autorités d’agir unilatéralement et de trouver une solution à la scolarisation des enfants.
Pippa Ranger, porte-parole de Save the Children à Londres, a indiqué que le ministre libérien de l’Education souhaitait que l’enseignement soit gratuit pour tous, mais qu’il avait besoin d’aide.
« La communauté internationale doit soutenir le gouvernement libérien afin que le ministre de l’éducation puisse mettre en oeuvre son projet et sa politique visant à rendre l’éducation gratuite pour tous les enfants », a expliqué M. Ranger.
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