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Les activistes contre le VIH/SIDA tirent la sonnette d’alarme

La pandémie du VIH-SIDA en Afrique de l'Ouest a souvent été éclipsée par le fort taux d'infection prévalant en Afrique australe. Cependant, la dernière mise à jour globale de l'Organisation Mondiale de la Santé (OMS) a sérieusement mis en garde contre la gestion excessivement indulgente de la situation.

L'OMS a relevé que pendant que les taux d'infection sont demeurés largement stables dans les pays sahéliens comme le Mali, la Gambie et le Niger avec des taux de prévalence en dessous de deux pourcent, les chiffres sont remarquablement moins optimistes en Côte d’Ivoire où les taux de prévalence adulte fluctuent entre 10 % et 12 %.

Pendant des années, le pays a été identifié comme le principal foyer d'infection au VIH-SIDA en Afrique de l'Ouest. Alors que des données fiables ont été difficiles à obtenir depuis le déclenchement d’une guerre civile en septembre 2002, des experts médicaux ont déclaré qu'un million de personnes vivaient avec le virus du VIH-SIDA en Côte d’Ivoire en fin 2000.

Côte d'Ivoire - Guerre et stigmatisation

Rose Dossou, responsable de l'organisation Chigata (“tant qu'il y a la vie il y a l'espoir…”) à Yopougon, le quartier le plus populeux d'Abidjan, la capitale économique ivoirienne, où résident plusieurs centaines de milliers personne de revenus modestes.

Les activités principales du Chigata se concentrent sur les enfants, orphelins de parents morts du SIDA et atteints par la maladie eux-mêmes. Dossou affirme qu'il y a au moins 600,000 orphelins du SIDA en Côte d’Ivoire.

Elle a relevé que la discrimination demeurait le principal problème, avec des familles qui souvent répugnent à recueillir les enfants une fois leurs parents décédés. “C'est souvent difficile pour ces familles de nourrir les orphelins et de les envoyer à l'école”, a expliqué Dossou à IRIN, à l’occasion d'une importante conférence sur le VIH/SIDA à Dakar.

“Une partie du travail de Chigata consiste à aller rencontrer ces familles à leur domicile, et à identifier le type d'aide qui peut être apporté,” a-t-elle spécifié.

Dossou a averti que les enfants, particulièrement ceux atteints du SIDA, pouvaient souvent être renvoyés dans leurs villages, même s'il n'y avait personne pour les recevoir. Chigata explique que l'organisation doit suivre ces enfants, leur assurant le gîte et l'aide médicale selon ses moyens.

L'une des principales préoccupations de Dossou pour le moment, est l'impact de 15 mois de guerre civile en Côte d’Ivoire. En dépit de la signature d'un accord de paix en janvier, le pays demeure divisé avec le Nord sous contrôle des rebelles, dont les services de santé ne fonctionnent qu'à 30 % de leur capacité normale, et la zone gouvermentale au Sud.

Elle a déploré qu'il y ait très peu de médicaments disponibles pour les patients vivant en dehors d'Abidjan. “Nous avons besoin d'un système plus décentralisé pour la distribution de médicaments anti-retroviraux”, a reconnu Dossou. “La guerre a empêché plusieurs personnes d'accéder au traitement à cause de leurs lieux d'habitation.”.

Il y a eu de grandes campagnes de santé publique en Côte d’Ivoire dans le but de promouvoir le sexe sans risque. Dossou croit qu'elles ont tout au moins eu un impact, particulièrement dans les écoles et les établissements d'enseignement supérieur. “Vous pouvez toujours trouver des adultes réfractaires à l'usage des préservatifs, mais il n'en est pas de même avec les adolescents qui trouvent cela plutôt normal”. Dossou cite également le travail fait par les Personnes Vivant avec le VIH/SIDA (PVVIH) en publiant leur statut. “Elles se sont dévoilées, racontant leur propre histoire. Cela a aidé la population à comprendre qu'on peut toujours vivre une vie normale avec le VIH. La stigmatisation des personnes infectées existe toujours, mais est en voie de diminution”.

Sénégal - Des leçons restent toujours à tirer

Le Sénégal est souvent regardé comme “l'histoire à succès” dans le domaine du VIH-SIDA en Afrique de l’Ouest. Le gouvernement et les organisations de santé ont organisé d'importantes campagnes de prévention dans les années 80, contribuant à contourner une pandémie.

Les religieux et les leaders laïcs ont été largement félicités pour leur pragmatisme et leur prévoyance, qui ont battu en brèche les tabous et ont abordé les problèmes sexuels.

Les prostitués ont été tolérées mais soumises à un test obligatoire.

Un puissant réseau de groupes issus de la société civile est apparu, singulièrement des organisations féminines qui se focalisent sur les problèmes de santé relatifs au VIH.

Ce sont tous ces facteurs qui font souvent référence lorsqu'on compare le taux d'infection relativement bas du Sénégal (1.4 %) avec ceux d'autres pays de la sous-région.

Cependant les militants de la lutte contre SIDA conseillent d'éviter de tomber dans l’autosatisfaction, et requièrent d'éclaircir les divergences existant entre le stock de médicaments disponible à Dakar la capitale et à l'intérieur du pays. Au début de cette année, un proche conseiller du Président Abdoulaye Wade, Latif Gueye, a été accusé d’implication dans la revente des médicaments anti-retroviraux en Europe.

Ndèye Dioumel Kebe travaille pour l'organisation ENDA-Santé, basée à Dakar. La majeure partie de son travail se déroule avec "les clandestines", des prostitués qui, opérant secrètement et ne sont pas reconnues par les autorités. Elles sont exposées à la maladie et à la violence.

Dioumel Kebe a averti que même parmi les travailleurs du sexe possédant une licence, ceux qui reçoivent une carte d'identification et subissent régulièrement des tests de dépistage sont moins de 14 %. Selon elle, 80 % des prostitués du Sénégal opèrent clandestinement, et plusieurs sont des femmes mariées.

“La plupart d'entre elles exerçaient un autre métier, celui de servante de maison ou vendeuse en magasin. Puis elles ont été influencées par tout ce qu'elles ont vu autour d'elles et veulent pratiquer ce métier-ci," a-t-elle expliqué à IRIN.

"Ca pourrait être un phénomène urbain, mais vous constaterez également que les jeunes filles dans les villages sont prêtes à vendre leur corps. La seule chose est que leurs familles n'en savent rien. Elles peuvent sortir à certaines heures et revenir s'occuper du reste de la famille. Cependant leur parenté doit se demander : d'où provient l'argent de notre nourriture et de ses vêtements ?”

Dioumel Kebe avance que les autorités sont conscientes de ce problème qui n'est guère nouveau au Sénégal, cependant elles ne tiennent pas compte de la réalité sur le terrain. “Un travailleur du sexe ne peut être enregistré qu'à l'âge de 18 ans. Ce que nous voyons maintenant, c'est que les relations sexuelles commencent plus tôt, à 14 ans par exemple,” a-t-elle relevé.

Dioumel Kebe a également déploré que les jeunes prostitués ne reçoivent pas d'informations fiables. “Elles s'entendront dire qu'elles n'obtiendront pas de passeport si elles se font enregistrer, où que leurs fils ne seront pas admis dans l'armée,” a-t-elle poursuivi.

ENDA essaie d'offrir le soutien à sa disposition. Dioumel Kebe met en exergue les abus réguliers de la police, les rafles arbitraires et les amendes infligées dont certaines sont réglées par des membres de ENDA en certaines circonstances.

“La persuasion marche toujours mieux que la contrainte”, a exprimé Dioumel Kebe avec philosophie.


This article was produced by IRIN News while it was part of the United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs. Please send queries on copyright or liability to the UN. For more information: https://shop.un.org/rights-permissions

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