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Un assainissement chaotique

Salamata Sanou a de la chance. Sa maison basse en béton est entourée de bitume sillonné de larges canaux, pour permettre l’écoulement des eaux de pluie. Même au plus fort de la saison des pluies, elle peut arriver jusque devant sa porte sur sa motocyclette et dormir sur ses deux oreilles, assurée qu’au réveil, son lit ne sera pas encerclé par les eaux usées.

« Avant, j’étais obligée de laisser ma moto chez mon voisin et de patauger dans l’eau jusque chez moi », a expliqué Mme Sanou, qui vit dans le quartier de Lafiabougou, à Bobo-Dioulasso, la deuxième ville du Burkina Faso.

Lafiabougou est l’un des rares districts de Bobo-Dioulasso à bénéficier du programme d’assainissement lancé il y a six mois par l’Autorité nationale pour l’eau et l’assainissement (ONEA). « Maintenant, on a moins de moustiques, étant donné qu’il y a moins d’eau stagnante et pas d’inondation en période de crue », a ajouté Mme Sanou.

« Avant le [lancement du] projet, les toilettes débordaient toujours et la saleté flottait dans les rues », s’est souvenue Mariam Coulibaly, une autre habitante du quartier. « Il y avait environ 80 centimètres d’eau dans la maison et on a dû faire des trous [dans le sol] pour que la saleté et l’eau s’écoulent ».

Bobo-Dioulasso « a un sérieux problème d’assainissement car nous venons à peine de commencer à nous y atteler », a expliqué Arba Jules Ouedraogo, directeur de l’assainissement à l’ONEA. « Nous devons avant tout mobiliser des fonds à Ouagadougou, la capitale ».

Seuls 10 pour cent des 13,7 millions d’habitants du Burkina Faso disposent de systèmes d’assainissement suffisants, selon les statistiques officielles. Il est prévu de porter l’accès aux systèmes d’assainissement à Ouagadougou et Bobo-Dioulasso à 59 et 57 pour cent respectivement, d’ici à l’an 2015.

« La majorité des gens sont équipés de systèmes d’assainissement précaires et extrêmement mauvais qui polluent et provoquent des maladies », selon M. Ouedraogo.
Ce n’est qu’en 2000 –cette année-là, des déchets ménagers et industriels, emportés par les eaux de crue, s’étaient déversés à travers Bobo-Dioulasso- que des projets d’assainissement ont commencé à voir le jour dans la ville. A Bobo-Dioulasso, les précipitations annuelles moyennes sont de 1 200 millimètres.


Photo: Brahima Ouedraogo/IRIN
Le gouvernement burkinabè n'a pas les fonds nécessaires pour mettre en place des systèmes d'assainissement
Puis, il y a la rivière Houet, où de nombreux poissons meurent empoisonnés par les déchets toxiques.

« La rivière Houet accumule naturellement les déchets liquides des industries et des ménages, mais aussi ceux qui proviennent d’autres cours d’eau », a indiqué Abdoulaye Traoré, directeur du service d’assainissement du bureau régional de l’environnement de Bobo-Dioulasso. « C’est également une latrine publique ».

La zone la plus mal lotie de la ville est le quartier de Dioulassoba, qui se situe près de la rivière Houet. Chaque jour, des déchets solides et liquides y flottent le long des maisons et en période de crue, des communautés entières se retrouvent inondées.

Les responsables de la commune ont dit s’occuper actuellement d’autres districts avant de s’attaquer au « gros » problème que représente Dioulassoba.

Le lien pauvreté-assainissement

« Nous avons de gros défis à relever en matière d’assainissement à Bobo-Dioulasso et Ouagadougou, où le lien entre la pauvreté et l’assainissement est bien visible », a expliqué Mahamadi Porgo, leader de sa communauté. « Force est de constater que les frais médicaux sont plus élevés chez les personnes qui vivent dans des environnements sales ».

Plusieurs études menées par le laboratoire national de l’environnement ont révélé que l’eau des puits de la ville était contaminée par des bactéries. Selon certains responsables de la santé, la forte hausse des cas de fièvre typhoïde est liée à la pollution de l’eau dans les districts périphériques. Et à Ouagadougou, l’année 2005 a été marquée par une épidémie de choléra.

« De toute évidence, tant que les déchets ne seront pas traités, il y aura des risques sanitaires », a averti M. Traoré. Les statistiques des autorités sanitaires indiquent d’ailleurs une hausse du nombre des cas de diarrhée sanglante (shigellose) chez les enfants.


Photo: Brahima Ouedraogo/IRIN
La rivière à Bobo-Dioulasso sert de décharge à ciel ouvert
Une station de traitement de quatre milliards de francs CFA (8,7 millions de dollars) est en cours de construction à Dogona (Bobo-Dioulasso) ; elle permettra de recueillir tous les déchets liquides produits par les ménages et les unités administratives et industrielles. Il est prévu que l’eau traitée soit utilisée pour les besoins de l’agriculture.

Le gouvernement a également commencé à subventionner l’installation de latrines dans les foyers. Pourtant, bien que l’Etat couvre près de 50 pour cent des frais, le prix – entre 100 000 et 200 000 francs CFA (200-400 dollars) – reste élevé pour une majorité de la population.

« L’assainissement est certes très cher, mais ce n’est pas un luxe », selon M. Ouedraogo de l’ONEA. « Comment nos villes peuvent-elles se développer véritablement, si les hommes d’affaires ne peuvent pas s’asseoir et discuter à cause des odeurs, des ordures et de la pollution ? ».

Depuis 2003, les autorités de Ouagadougou tentent d’obtenir huit milliards de francs CFA (17,4 millions de dollars) pour construire des infrastructures d’assainissement, en vue d’améliorer les conditions de vie des populations des différents districts de la capitale.

« Nous avons adressé une demande aux bailleurs de fonds et attendons toujours une réponse », a expliqué Arzouma Zombre, directeur des infrastructures de la commune de Ouagadougou.

Chaque année, Ouagadougou consacre 20 pour cent (1,4 milliard de francs CFA) de son budget à l’assainissement. Quand bien même, seule la moitié environ des 800 tonnes d’ordures produites chaque jour peut être envoyée vers la nouvelle station de traitement.

« Les déchets restants sont déversés dans les caniveaux ou dans des terrains vagues, ce qui augmente le risque de contamination des eaux souterraines », a expliqué Mahamadou Cissé, directeur de l’assainissement à Ouagadougou.

« Si nous ne prenons pas les mesures nécessaires et ne commençons pas à nous attaquer au problème de l’assainissement dès maintenant, plus tard, cela nous coûtera plus cher », a prévenu M. Ouedraogo de l’ONEA.

bo/nr/np/mw/nh/ail


This article was produced by IRIN News while it was part of the United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs. Please send queries on copyright or liability to the UN. For more information: https://shop.un.org/rights-permissions

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