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Les Akas rêvent d'un avenir plus radieux pour leur communauté

Marginalisés, victimes de discrimination en raison de leur petite taille et leur mode de vie axé sur la cueillette et la chasse, les pygmées font partie des quelque 300 millions d’indigènes recensés dans le monde, selon Cheick Sangare de la section des droits de l’homme au Bureau des Nations Unies pour la consolidation de la paix en République Centrafricaine (BONUCA).

Cependant, à la différence des autres peuples, les pygmées ont été victimes de traitements inhumains, de vexations de toutes sortes et contraints aux travaux forcés, explique Mathias Morouba, le vice-président de l’Observatoire des droits humains en République centrafricaine (RCA), en citant l’exemple d’une communauté de pygmées vivant dans la région forestière de la préfecture de Lobaye (sud-ouest).

Cette communauté, les Akas, compte 16 000 membres. « Pour la majorité des gens, ce sont des sauvages que la population doit surveiller et faire travailler gratuitement », se désole M. Morouba.

Selon l’organisation Refugees International, les Akas sont considérés comme des citoyens de seconde zone dans les pays de la région des Grands Lacs. En effet, dans son rapport 2003, l’organisation révèle que les Akas ne jouissent pas des mêmes facilités d’accès à la santé, à l’éducation et à la propriété foncière que le reste de la population et de l’impartialité du système judiciaire.

Les mauvais traitements faits aux Akas ont suscité de vives critiques dans certains quartiers et de l’indifférence dans d’autres. « Il est temps que les choses changent », a affirmé M. Morouba. « Les pygmées doivent être considérés comme des citoyens centrafricains à part entière ».

C’est une disposition de la constitution et cela devrait être compris de la plupart des Centrafricains, en particulier des habitants des campagnes qui continuent de considérer les Akas comme des esclaves.

« Qu’est-ce qui leur prend de parler d’émancipation des pygmées qui, dans notre histoire, ont toujours été nos esclaves ? Les Européens nous provoquent ; les pygmées sont nos sujets et cette initiative qui consiste à vouloir améliorer leur sort les amène à se révolter », explique Mataya Jean, un propriétaire terrien de Lobaye.

Changer les comportements

C’est pour combattre ces idées reçues que l’ONG COOPI et le diocèse de Mbaiki, dans la préfecture de Lobaye, ont lancé un projet de renforcement de l’identité sociale et culturelle des Akas. Ce projet de trois ans, financé par l’Union européenne, vise également 172 000 autres membres de minorités ethniques vivant à Lobaye, a indiqué Mathilde Ceravolo, la coordinatrice du projet.

Plusieurs moyens ont été mis en œuvre pour informer le public sur les droits des minorités et un observatoire des discriminations a été créé. Par ailleurs, un séminaire de sensibilisation à la Convention 169 de l’Organisation internationale du Travail (OIT), relative aux 'peuples indigènes et tribaux dans les pays indépendants », a été organisé à l’intention des parlementaires centrafricains.

La culture aka doit être mieux connue en expliquant le mode vie de cette communauté. En outre, la réhabilitation de la galerie aka dans le musée de Boganda est à présent achevée. L’objectif est de parvenir à résoudre de manière pacifique le différend qui oppose les Akas au reste de la communauté nationale, ce qui leur donnera une légitimité, l’accès à l’éducation, aux services administratif et juridique.

Et les améliorations sont déjà notables. Trois ans après le démarrage du projet, le quotidien des Akas a considérablement changé, selon Mme Ceravolo. Un groupe de 12 responsables Akas a été constitué pour défendre les droits de la communauté et veiller à la protection des droits des enfants.

Pour prévenir les conflits, 90 médiateurs culturels akas et bantus ont été choisis. Le ministère de l’Intérieur a nommé trois chefs de village aka. Ces nominations contribueront à renforcer la reconnaissance et le pouvoir de la communauté car ses chefs ne toléreront plus que les Akas soient maltraités.

Au moins 1 500 enfants akas ont actuellement un extrait d’acte de naissance, souligne Mme Ceravolo. Ces documents impliquent qu’ils sont considérés comme des citoyens à part entière de la RCA et qu’ils ont droit à l’éducation et peuvent prétendre à des postes de fonctionnaire au sein de la fonction publique.

Une évolution positive

Les Akas sont satisfaits de cette évolution sociale, a fait remarquer Germaine Dimanche, responsable de la communauté aka Massiringaï de Mbata, un hameau d’environ 100 habitants situé à quelque 155 kilomètres au sud de Bangui.

« C’est comme dans un rêve. Nous sommes considérés comme des êtres humains et nos droits sont reconnus pour la première fois de notre existence », s’est-elle enthousiasmée. « Avant le projet, nous n’étions que des esclaves ; personne ne s’intéressait à nous. Aujourd’hui, nous avons ouvert les yeux et nous n’accepterons plus d’être traités comme avant ».

Selon Mme Dimanche, les habitants du hameau ont demandé au gouvernement de poursuivre le projet dont le financement a pris fin en juin 2006. Toutefois, précise M. Jean-Claude Esmieu, chef de la délégation de la Commission européenne à Banguy, la Commission va continuer de subventionner la COOPI pour assurer la pérennité du projet.

Bien que la RCA fasse partie des pays qui n’ont pas encore ratifié la Convention 169, sa Constitution, en son article 5, réprime toute forme de discrimination fondée sur la race, la religion ou l’origine sociale.

« Tous les êtres humains sont égaux devant la loi sans distinction de race, d’origine ethnique, de région, de sexe, de religion, d’appartenance politique et de position sociale. La loi garantit à l’homme et à la femme des droits égaux dans tous les domaines. Il n’y a en République Centrafricaine ni sujet, ni privilège de lieu de naissance, de personne ou de famille ».

Etant donné le changement de statut des Akas, les populations bantoues de la RCA doivent désormais considérer les Akas comme des citoyens centrafricains, au même titre qu’eux, et fermer ce chapitre sombre de l’exploitation sociale et économique qui a marqué les relations de ces deux communautés. Quant au gouvernement, les Akas espèrent qu’il ratifiera bientôt toutes les conventions internationales relatives au respect du droit des minorités.


This article was produced by IRIN News while it was part of the United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs. Please send queries on copyright or liability to the UN. For more information: https://shop.un.org/rights-permissions

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