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El Khidir Daloum, « Un bon leader, c’est quelqu’un qui est prêt à prendre le blâme »

El Khidir Daloum, regional head of Latin America, the Caribbean and the Middle East for Save the Children UK Save the Children/IRIN
El Khidir Daloum a récemment été décrit comme un leader humanitaire particulièrement efficace dans un nouveau rapport de l’ALNAP intitulé Leadership in Action: Leading effectively in humanitarian operations. Il s’est démarqué par sa connaissance approfondie du contexte politique et socioéconomique d’une crise ; son rôle dynamique en tant que leader d’une équipe inter-agences en Somalie ; et parce qu’il a placé les enfants, et non pas les besoins de son organisation, au centre du processus décisionnel.

M. Daloum est actuellement directeur régional pour l’Amérique latine, les Caraïbes et le Moyen-Orient au sein de l’organisation non gouvernementale (ONG) Save the Children UK. Entre 2001 et 2007, il a occupé le poste de directeur pays et responsable de programme pour Save the Children UK en Somalie. Il a commencé à travailler pour les programmes de l’organisation au Soudan. M. Daloum a également occupé certaines fonctions au ministère des Finances soudanais ainsi qu’à ce qui était à l’époque l’Agence britannique pour le développement outre-mer (UK Overseas Development Agency, ODA) pendant un an. Il a par ailleurs travaillé comme chercheur au sein du Sudan Economy Research Group.

« Mes notions de leadership remontent à l’enfance. Je suis né dans un village du Darfour. Les gens venaient voir mon père pour qu’il les aide à résoudre des conflits, notamment fonciers ou conjugaux. Même s’il n’était pas le chef du village, les gens avaient confiance en lui ».

« Mon père me demandait d’assister à ces discussions pour servir du thé ou de la nourriture. Il voulait que j’écoute et que j’apprenne. C’est en l’observant que j’ai compris comment résoudre certains problèmes délicats. Même si j’avais accès à beaucoup d’informations personnelles, j’ai vite compris l’importance de la confidentialité. Parmi les personnes qui venaient s’entretenir avec mon père, il y avait souvent des parents de mes amis du village, mais je n’ai jamais rien dit. L’apprentissage de la discrétion m’a par la suite aidé dans mon travail ».

« Lorsque je me suis tourné vers des modèles extérieurs, c’est surtout Nelson Mandela qui m’a inspiré, en particulier pendant mes études. Les sacrifices qu’il a faits pour servir les intérêts du plus grand nombre m’ont toujours fasciné et surpris ».

« Ce n’est qu’en levant les barrières existantes entre le personnel national et international que les employés locaux pourront devenir de puissants leaders internationaux. Les organisations doivent reconnaître le potentiel de leur personnel. Les dirigeants de ces organisations doivent comprendre que leurs employés peuvent avoir des faiblesses, [mais] qu’il faut être prêt à prendre des risques lorsque quelqu’un a du potentiel. Si les choses ne se passent pas comme prévu, il ne faut pas rejeter la faute sur cette personne – un bon leader, c’est quelqu’un qui est prêt à prendre le blâme ».

« Au Soudan, j’étais l’un des rares Africains à faire partie de la liste de candidats pour le poste de directeur adjoint. Des collègues m’ont dit qu’un autre Africain avait essayé et qu’il avait échoué. J’ai répondu : ‘Pourquoi mettre l’accent sur cet exemple et l’utiliser pour m’empêcher d’aller de l’avant ?’ »

« Quelqu’un a pris le risque de m’embaucher. J’ai fait quelques erreurs, mais il ne m’a jamais laissé tomber. Il m’a guidé ».

« Je peux citer de nombreux exemples de situations où j’ai dû prendre des décisions difficiles en me basant sur des informations incomplètes ou contradictoires. Quand j’étais en Somalie, un conflit d’intérêt m’a été rapporté par l’un de nos bureaux opérationnels. Je disposais de très peu d’informations, et la personne qui me les avait transmises avait elle-même des intérêts dans l’affaire. Mais je savais que si je ne prenais pas de décision [en fonction des informations à ma disposition], les gens allaient perdre la confiance qu’ils avaient en moi. J’ai donc licencié un membre du personnel. Presque immédiatement, des miliciens ont envahi notre bureau et m’ont ordonné de réintégrer cette personne ».

« J’ai aussitôt fait évacuer l’ensemble du personnel. J’ai cherché à savoir qui exerçait le pouvoir dans la région : il n’y avait pas de gouvernement local, mais des règles informelles existaient. J’ai identifié les cinq `ogases’ [leaders somaliens] et je leur ai fait part de la situation. Je leur ai expliqué que j’étais prêt à fermer le bureau si les miliciens avaient l’intention d’en prendre le contrôle. Mais que s’ils essayaient de nous comprendre et de comprendre ce que nous tentions de faire, j’étais prêt à continuer ».

« Les négociations ont duré trois semaines, mais nous sommes finalement parvenus à un compromis raisonnable. Les leaders de la communauté ont donné leur parole qu’ils nous laisseraient continuer à travailler. Je n’avais pas le temps de consulter Londres [siège de l’organisation] : j’ai dû prendre une décision immédiatement ».

« Aujourd’hui, tout le monde souhaite éviter les ennuis. Il y a bien des personnes courageuses au sein des Nations Unies, mais elles n’ont pas l’occasion d’utiliser leurs talents. Lorsque j’étais le point focal des ONG en Somalie, nous organisions souvent des réunions improvisées pour aborder certains problèmes. Si les responsables des organisations présents autour de la table auraient tous pu prendre des décisions par eux-mêmes, ils devaient toujours consulter leurs supérieurs au siège de leur organisation. Cela peut prendre énormément de temps et vous pouvez parfois rater certaines occasions. Il y a aussi le risque que les gens perdent confiance en vous parce qu’ils ne vous considèrent pas comme suffisamment assuré ».

« Pour éviter ce genre de problème, les membres du personnel des ONG devraient avoir une très bonne compréhension du contexte politique dans lequel ils travaillent et savoir prendre des décisions en fonction des renseignements dont ils disposent et des besoins humanitaires. Les ONG devraient par ailleurs accorder une certaine liberté à leurs représentants dans les divers pays pour leur permettre de mener à bien leur tâche ».

« Si les choses ne se déroulent pas comme prévu, les responsables des ONG devraient assumer leurs responsabilités au lieu de chercher à prendre leurs distances. Plutôt que de rejeter la faute sur quelqu’un, il est préférable de l’admettre et d’apprendre de ses erreurs ».

aj/cb – gd/amz

This article was produced by IRIN News while it was part of the United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs. Please send queries on copyright or liability to the UN. For more information: https://shop.un.org/rights-permissions

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