Pour tenter de mettre fin à une crise politique qui s’installe, les représentants de l’Union africaine (UA) et le gouvernement de l’Union des Comores ont décidé d'appliquer des sanctions ciblées contre les autorités rebelles d’Anjouan, une des trois îles qui forment l’Union des Comores.
L’unité fragile de l’Union des Comores – composée de la Grande-Comore, de Mohéli et d’Anjouan, dans l’océan Indien – est en balance, et « tout retard supplémentaire dans la résolution de la crise [la] déstabiliserait encore davantage », selon un communiqué publié par l’UA après que son Conseil pour la paix et la sécurité eut approuvé les sanctions contre les autorités d’Anjouan, au début du mois d’octobre.
« Ces sanctions sont ciblées contre le gouvernement d’Anjouan et prévoient de restreindre les mouvements des autorités et de ceux qui les soutiennent [...] et de geler leurs avoirs », a expliqué à IRIN Francisco Madeira, l’envoyé spécial de l’Union africaine.
Les élections locales qui ont eu lieu en juin à Anjouan ont relancé les hostilités entre celle-ci et les deux autres îles de l’Union.
Depuis lors, M. Madeira tente de négocier une résolution pacifique à la crise, en organisant des pourparlers avec Ahmed Abdallah Sambi, le président de l’Union, à Moroni, la capitale (Grande-Comore), et les autorités d’Anjouan.
Les Comores, qui ont acquis leur indépendance de la France en 1975, après plus de 130 années de régime colonial, ont connu trois décennies d’instabilité politique émaillées de 19 coups d’Etat et tentatives de coup d’Etat.
Un système électoral complexe
Le système électoral complexe de l’archipel a été négocié en 2001 par l’Organisation de l’unité africaine (OUA), dans le sillage de la sécession de Mohéli et d’Anjouan par rapport à la Grande-Comore, qui avait eu lieu en 1997.
Ce système électoral prévoit que les îles – Anjouan, Grande-Comore et Mohéli – aient chacune leur propre gouvernement semi-autonome et leur propre Président, et se voient confier à tour de rôle la présidence du gouvernement fédéral de l’Union.
Le premier tour des dernières élections avait été organisé le 10 juin dans les îles de la Grande-Comore et de Mohéli, mais l’UA et le gouvernement de l’Union avaient reporté le scrutin au 17 juin dans l’île d’Anjouan.
Cette décision faisait suite à une campagne d’intimidation orchestrée avant la tenue des élections et à de violents incidents qui avaient fait deux morts parmi les militaires.
Mohamed Bacar est arrivé au pouvoir à Anjouan en 2001 à la faveur d’un coup d’Etat, avant d’être élu président de l’île en 2002. Ayant achevé son mandat de cinq ans, il avait été prié par la Cour constitutionnelle de se retirer, et avait nommé un président par intérim à la tête du gouvernement local jusqu’aux élections.
Défiant le report du scrutin, M. Bacar a imprimé ses propres bulletins de vote et a procédé aux élections, que l’Union africaine (UA) et la Cour constitutionnelle des Comores ont déclarées caduques ; M. Bacar, qui a remporté une victoire écrasante à 90 pour cent, refuse néanmoins de se retirer.
L’application des sanctions
M. Madeira s’entretient actuellement avec le gouvernement de l’Union des Comores pour décider de quelle façon les sanctions de l’UA, appliquées à compter du 10 octobre et jusqu’au 24 novembre, seront mises à exécution.
« Le gouvernement de l’Union devra être aidé dans cette tâche. Nous [l’UA] envisageons de l’aider en lui fournissant des navires, des hélicoptères, des avions à voilure fixe et du personnel » pour patrouiller l’île, a indiqué M. Madeira.
L’opération demandera « un recours maximum aux forces armées de [l’Union] », a-t-il ajouté. Environ 200 soldats de l’UA sont stationnés sur la Grande-Comore, mais l’UA envisage également de « renforcer leur présence ».
Les experts militaires tentent actuellement de déterminer l’ampleur exacte des forces que l’UA devra déployer. Les sanctions seront levées si les autorités d’Anjouan acceptent d’organiser de nouvelles élections.
Bien que ces sanctions soient ciblées contre les autorités de l’île, M. Madeira a dit s’attendre à ce que la population en pâtisse elle aussi ; selon lui, le gouvernement au pouvoir accaparera « la nourriture et l’argent » de ses administrés.
« Nous expliquons aux populations que cela demandera des sacrifices, mais que nous ciblons uniquement ceux qui font obstacle à la paix et à la démocratie. Nous espérons que les autorités [d’Anjouan] retrouveront la raison », a-t-il déclaré.
Cette impasse toujours irrésolue entrave également l’acheminement d’une aide internationale pourtant nécessaire au développement.
« Il est dommage que la résolution de cette crise continue d’échapper aux Comoriens », a déploré Opia Kumah, coordinateur résident des Nations Unies aux Comores. « Chaque nouvelle journée de conflit représente une occasion perdue pour le développement, et fait régresser le pays davantage ».
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