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«C’est difficile de vivre avec le VIH»

Pour Alawi Bahumaid, 41 ans, qui a récemment perdu son emploi dans une compagnie pétrolière norvégienne au Yémen, la lutte difficile pour reconstruire sa vie et chercher un nouvel emploi recommence. « C’est la deuxième fois que je perds mon emploi parce que je suis séropositif » a-t-il dit à Sanaa, la capitale. « J’avais beaucoup d’espoir cette fois-ci ».

Ces espoirs ont pourtant été déçus deux mois après que M. Bahumaid ait commencé à travailler, lorsque son employeur du moment a contacté son employeur précédent pour une référence et a été informé que sa dernière recrue était séropositive.

Ayant peur que les autres travailleurs se révoltent s’il réintégrait la chaîne de fabrication, l’employeur l’a licencié sur le champ.

« C’est difficile de vivre avec le VIH » a dit M. Bahumaid, qui est séropositif depuis les années 1990. « Les gens au Yémen ne savent pas ce qu’est le VIH, et ils ont peur de me serrer la main ou même de me parler ».

La discrimination contre les personnes vivant avec le VIH au Yémen est « fréquente » selon M. Bahumaid qui, malgré lui, est devenu en quelque sorte un défenseur de leur cause. « Cette fois je vais m’exprimer haut et fort », a-t-il dit.

Mais au Yémen, une société tribale très conservatrice d’environ 20 millions de personnes, dont plus de 40 pour cent vivent en dessous du seuil de pauvreté, il va falloir faire plus que parler pour changer les choses : il va falloir de l’action, surtout de la part du gouvernement.

Le Cadre stratégique national du gouvernement pour le contrôle et la prévention du VIH/SIDA prend en considération le fait que les Yéménites vivant avec le VIH sont lourdement stigmatisés : le plus souvent ils fuient ou sont même renvoyés des hôpitaux où ils ont cherché à être traités, et ils sont harcelés par la police.

A l’instar des autres pays de la région, le Yémen exige des étrangers désireux de s’y installer ou d’y chercher un emploi qu’ils soient séronégatifs. Les étrangers séropositifs sont expulsés, et de nombreux législateurs considèrent que c’est une mesure nécessaire et entièrement justifiée, alors qu’elle renforce le déni et la stigmatisation qui existent depuis des années autour du VIH/SIDA.

Même si l’implication du gouvernement dans le contrôle et la prévention de la pandémie est manifeste puisqu’il a adopté un programme d’encadrement national en 2002, il est clair que davantage de mesures doivent être prises en ce qui concerne les traitements et l’assistance à offrir à des personnes comme M. Bahumaid, qui doivent vivre avec la discrimination.

« Les personnes vivant avec le VIH souffrent beaucoup » a dit Fouzia Abdullah Saeed Ghramah, directeur du Programme national contre le sida (NAP) mis en place par le ministère de la Santé. « [Ils] sont privés de leurs droits, particulièrement en ce qui concerne l’emploi, ce qui créé des problèmes sociaux et économiques. Nous nous employons à résoudre ces problèmes ».

La honte et la peur, principaux obstacles


Photo: David Swanson/IRIN
Enrayer les préjugés liés au VIH/SIDA est d’autant plus difficile au Yémen que la société est encore tribale et très conservatrice
Mais les efforts pour combattre la stigmatisation et la discrimination sont entravés par des préjugés négatifs qui proviennent même des habitants les plus instruits du pays.

Les résultats d’une étude publiée le 10 juillet par le quotidien local Yemen Observer indiquent que la honte et la peur d’être jugés sont parmi les plus grands obstacles qui empêchent les personnes séropositives d’obtenir un diagnostique et un traitement.

L’étude, menée par des chercheurs de l’Université de Sanaa, a comparé le comportement des étudiants en médecine à celui des autres étudiants, et a révélé que même les personnes éduquées portaient des jugements négatifs sur les patients infectés, et qu’elles comprenaient souvent mal la maladie.

Selon le NAP, 2 075 cas de VIH ont été enregistrés depuis le premier cas en 1987. Cependant, les experts médicaux estiment que le vrai chiffre s’élève à plus de 20 000 cas.

« Personne ne peut le prouver; personne ne peut le nier », a dit Abdullah Abdulkarim al-Arashi, responsable exécutif du projet sida du Yémen mené par le Conseil national de la population, qui vise à encourager la prise de conscience.

« Les gens préfèrent le considérer comme un problème occidental et ont même peur d’en parler. Et sans prise de conscience ils n’en parleront jamais, et les personnes infectées n’iront pas à l’hôpital », a-t-il plaidé.

Des ARV disponibles, mais pas de patients

Même si des antirétroviraux qui prolongent l’espérance de vie sont disponibles à Sanaa et à Aden, une ville portuaire du sud, qui sont les deux plus importants centres de peuplement, M. al-Arashi a souligné que le manque d’ouverture d’esprit sur le VIH empêchait de nombreuses personnes de rechercher un traitement.

« Notre société ici au Yémen est très fermée. Les gens ont honte de parler du VIH, car ils l’associent au sexe », a-t-il expliqué, la plupart des gens croyant que le contact sexuel est le seul mode de transmission. « Les gens ont peur de parler de leur statut sérologique; ils ont peur du gouvernement; ils ont peur des policiers, et même de leurs familles ».

A Aden, un homme a été chassé de chez lui par son épouse et ses enfants après leur avoir avoué son statut sérologique. « Tu es séropositif. Sors d’ici », aurait crié son épouse avant d’appeler la police.

« Malheureusement, c’est notre mentalité face au VIH », a dit M. al-Arashi. « C’est ce que nous essayons de changer aujourd’hui ».

S’il n’existe pas de législation pour protéger M. Bahumaid et d’autres comme lui de la discrimination, la création du ministère des Droits de l’homme du Yémen en 2003 offre un peu d’espoir.

« C’est quelque chose qui doit changer » a dit à IRIN/PlusNews Nusaibah Ghushaim, chargée de l’information au ministère, en référence au manque de législation pour protéger les personnes vivant avec le VIH ou d’autres maladies chroniques.

Elle s’est dite certaine que des lois appropriées finiraient par être votées au Yémen, mais a exprimé ses craintes qu’il faille attendre encore longtemps avant de les voir appliquées.

ds/at/ar/ks/he/mj/ail


This article was produced by IRIN News while it was part of the United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs. Please send queries on copyright or liability to the UN. For more information: https://shop.un.org/rights-permissions

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