Les réfugiés, les demandeurs d’asile et les migrants installés en Égypte se plaignent également des frais de scolarité élevés dans les écoles privées et publiques, des procédures d’inscription bureaucratiques et du climat croissant de méfiance, de xénophobie et de discrimination dans les salles de classe.
À la fin de l’année 2013, le Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) recensait 179 762 réfugiés et demandeurs d’asile enregistrés, dont une majorité de Syriens et de Soudanais.
Mais selon un rapport basé sur des estimations réalisées par des organisations non gouvernementales (ONG) locales et rendu public par Tadamon - principale ONG d’aide aux réfugiés en Égypte – le pays pourrait compter entre 1,5 million et 3 millions de réfugiés. D’après Tadamon, la confusion des chiffres résulte de « définitions juridiques divergentes » et « de l’incapacité ou du refus de bon nombre de réfugiés à se faire enregistrer ».
Le droit à l’éducation est inscrit dans la Convention de 1951 relative au statut des réfugiés, à laquelle l’Égypte est partie. Cependant, en 1981, l’Égypte a formulé des réserves au sujet de plusieurs articles, ce qui s’est traduit par un amoindrissement des droits des réfugiés.
Comme elles ne bénéficient pas d’une éducation gratuite, les familles de réfugiés doivent déposer une demande de bourses d’étude auprès des Services de secours catholiques, un partenaire du HCR et membre de Caritas Internationalis.
Selon le HCR, les familles de réfugiés syriens enregistrés ayant des enfants scolarisés reçoivent une bourse d’études qui leur permet [de] couvrir les frais de scolarité, l’achat d’uniformes, de livres, de fournitures et les frais de transport. À la mi-février [2014], quelque 32 000 enfants ont bénéficié de bourses d’études.
Selon Mohamed El Miligy, militant égypto-soudanais et agent d’information pour Tadamon, un processus d’inscription manifestement tortueux a été mis en place pour dissuader les réfugiés d’entrer dans un secteur éducatif déjà surchargé. « Vu la [quantité de] documents, beaucoup ne pourront pas commencer [l’école] avant un ou deux ans ».
Le bureau du HCR en Égypte a dit à IRIN qu’il est difficile pour les réfugiés de s’inscrire dans des écoles publiques s’ils ne disposent pas de leurs anciens dossiers scolaires.
Malgré l’action du HCR en faveur de l’accès des réfugiés soudanais et syriens aux structures et aux services d’éducation, M. Miligy dit que, en réalité, dans un nombre croissant de cas, il n’y a même plus de « faux-semblant d’acceptation » et que les portes des écoles se ferment devant les réfugiés qui souhaitent inscrire leurs enfants.
« Il y a beaucoup d’écoles qui n’acceptent pas les réfugiés », a dit M. Miligy. « Vous ne trouverez pas trace d’un ordre émanant du gouvernement précisant ‘N’acceptez pas les réfugiés dans les écoles’, mais vous vous en rendrez compte lorsque vous irez dans un établissement pour déposer une demande. Les portes ne s’ouvriront pas pour eux ».
Le ministère de l’Éducation n’a pas donné suite aux demandes répétées d’entretien.
Discrimination
Hanadi Mohamed, une réfugiée soudanaise, dit que ses enfants sont victimes de discrimination dans les écoles publiques égyptiennes. Selon les réfugiés, l’attitude de la population à leur égard s’est dégradée en raison des troubles politiques et de la crise économique dans le pays.
« J’ai emmené mon plus jeune enfant à la maternelle et lorsque je suis revenue, j’ai vu des enfants l’insulter et le frapper parce qu’il était Soudanais. Il pleurait. J’ai demandé à l’enseignante si elle pouvait intervenir, mais elle n’a rien fait ».
Finalement, Mme Mohamed a été obligée de retirer son enfant de l’école. Plusieurs parents ont dit à IRIN qu’ils n’avaient eu guère d’autres choix que de suivre cet exemple par crainte de harcèlement.
Tadamon dirige des écoles séparées pour les réfugiés dans le cadre de son initiative d’école alternative (Alternative School Initiative) spécialement destinée aux réfugiés qui ne bénéficient pas d’un accès viable à l’éducation. Cachées derrière les portes anonymes d’immeubles résidentiels inachevés, les écoles accueillent souvent des enfants qui ont déjà subi des actes de harcèlement et de discrimination dans les établissements qu’ils fréquentaient auparavant.
« Ils ont été affectés psychologiquement ; ils sont tellement déprimés. Alors leurs familles les retirent de l’école et nous les amènent pour que nous nous en occupions », a dit M. Miligy. « Une partie des enfants deviennent violents, d’autres se replient sur eux-mêmes et ne parlent presque pas ».
Pas d’argent
Après six mois de recherche sur l’état de l’éducation des réfugiés en Égypte, le programme ‘Refugee Youth Project’, basé au Royaume-Uni, a publié un rapport à la fin de l’année 2013 : plus de 80 pour cent des 400 réfugiés interrogés ont dit qu’ils n’envoyaient pas leurs enfants à l’école principalement en raison des frais de scolarité élevés et du manque d’argent.
Magdy Garas, co-directeur de Caritas Égypte – une organisation caritative offrant un soutien financier, une aide social et des soins médicaux aux réfugiés en Égypte – estime qu’environ 17 000 familles syriennes ont besoin d’une aide financière, mais ni le HCR ni Caritas ne leur offrent de soutien.
« Nous pensons que l’Égypte compte quelque 250 000 réfugiés syriens. Notre programme humanitaire vient en aide à 31 000 Syriens et le HCR apporte un soutien à 138 000 réfugiés supplémentaires, mais les 81 000 personnes restantes, soit environ 17 000 familles, ont encore besoin d’une aide financière », a-t-il dit.
En juin 2013, le gouvernement estimait que le pays comptait 300 000 réfugiés syriens. Au 8 mars, 134 917 Syriens avaient été enregistrés comme réfugiés par le HCR.
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