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L’ABC des démolitions israéliennes dans le TPO

Nidal's demolished home. Shabtai Gold/IRIN
Rasmiyye Hamande a vécu dans une grotte dans le Territoires palestinien occupé (TPO) la majeure partie de sa vie, ce qui, d’une certaine façon, peut être considéré comme une bénédiction. « Cette grotte ne peut pas être détruite si facilement », explique-t-elle.

D’autres structures du village d’Al-Mufaqara, situé dans la zone C – les 60 pour cent de la Cisjordanie sous contrôle militaire israélien –, peuvent être détruites plus facilement.

Quelque 622 structures ont été démolies par les forces israéliennes en Cisjordanie en 2011, ce qui représente une augmentation de 42 pour cent par rapport à 2010. Les chiffres pour 2012 pourraient très bien dépasser ceux de l’an dernier, car à la fin juillet, le Bureau de la coordination des affaires humanitaires des Nations Unies (OCHA) avait déjà enregistré la démolition d’environ 395 structures dans le TPO.

Al-Mufaqara est l’un des douze villages situés dans une zone récemment déclarée « zone de tir 918 » par Israël. Le ministère israélien de la Défense souhaite démolir huit de ces villages et évacuer leurs résidents pour faire de la place pour un camp d’entraînement militaire. On s’attend à ce qu’environ 1 500 Palestiniens soient déplacés de force si l’ordre de démolition est appliqué.

Selon l’armée, les exercices d’entraînement dans la zone de tir 918 sont nécessaires pour combler les lacunes qui ont été mises en évidence à l’occasion du conflit de 2006 entre Israël et le Liban. Le ministère de la Défense israélien a par ailleurs indiqué que les villageois seraient autorisés à utiliser la terre les week-ends et lors des fêtes juives.

Les zones de tir comme celle-ci, qui sont toutes officiellement destinées à l’entraînement militaire, représentent environ 18 pour cent du territoire de la Cisjordanie. Depuis 2010, 45 pour cent de toutes les démolitions dans la zone C de la Cisjordanie, un territoire contrôlé par Israël, ont été faites dans les zones de tir.

IRIN examine les circonstances entourant ces démolitions.

Quand et pourquoi les structures palestiniennes de la zone C sont-elles considérées comme illégales par Israël ?

Toutes les structures nécessitent un permis approuvé par le gouvernement ; celles qui n’en ont pas peuvent être détruites. Or, il est pratiquement impossible d’obtenir un permis de l’administration civile israélienne – l’organe militaire chargé de superviser le TPO – pour une construction palestinienne en zone C.

Selon l’OCHA, l’administration civile israélienne a rejeté 94 pour cent des demandes de permis de construire déposées par des Palestiniens dans la zone C entre 2000 et 2007. En 2010, seulement 4 demandes de permis de construire en zone C sur 444 ont été approuvées. L’administration civile a dit à IRIN qu’il n’y avait pas de délai fixe pour l’examen des demandes de permis et que chaque demande était examinée différemment.

Dans les villages situés à l’extérieur des zones de tir, l’imposition de règles strictes en matière d’aménagement du territoire constitue le principal problème. Pour obtenir un permis, les constructions doivent être conformes à des plans d’aménagement qui n’ont pas changé depuis les années 1930, quand la région était sous mandat britannique.

Seuls les résidents permanents et ceux qui possèdent un permis spécial peuvent accéder aux zones militaires fermées. À moins d’un ordre spécial du commandant israélien responsable, les permis de construire ne sont pas disponibles.

Les constructions sont également interdites sur les terres considérées par Israël comme des sites archéologiques. C’est notamment le cas de Susiya, un village situé dans les collines du sud d’Hébron ; 70 pour cent des structures existantes dans la communauté font l’objet d’ordres de démolition en attente d’exécution.

Au total, les constructions palestiniennes sont interdites dans 70 pour cent de la zone C et elles sont fortement restreintes dans un autre 29 pour cent du territoire de la zone.

Les ordres de démolition peuvent cibler des maisons en dur, des tentes ou d’autres structures incluant des écoles, des puits, des panneaux solaires, des réseaux électriques et des abris pour les animaux. Sur les 622 structures détruites par les forces israéliennes, 222 étaient des maisons, 170 des abris pour les animaux, 2 des salles de classe et 2 autres des mosquées.

Que peuvent faire les communautés affectées contre les ordres de démolition ?

L’administration civile remet d’abord au propriétaire de la structure ce qu’on appelle un « ordre de cessation des travaux » sur lequel figure la date et le lieu de l’audience et le sous-comité de l’administration civile qui est concerné. Les propriétaires peuvent contester l’ordre reçu à l’occasion de l’audience du sous-comité et espérer obtenir un permis de manière rétroactive.

Après l’audience, l’administration civile donne généralement un ordre de démolition final qu’il est aussi possible de contester. Si la cour statue en faveur de la communauté affectée ou suggère des modifications, la démolition est suspendue. Une fois que la cour appuie légalement la démolition toutefois, celle-ci peut être exécutée.

Guy Inbar, porte-parole de l’administration civile, a dit à IRIN que dans les cas de la communauté de Susiya et de la zone de tir 918, « la cour nous a d’abord dit d’attendre avant de démolir. » Mais la cour a également découvert qu’il était illégal de construire dans ces zones en raison de décisions antérieures. À l’heure actuelle, aucune des communautés n’a été entièrement évacuée, même si elles ont toutes les deux des histoires de démolition et d’expulsion.

Les démolitions sont-elles légales en vertu du droit international ?

Selon l’article 53 de la quatrième Convention de Genève, « il est interdit à la Puissance occupante de détruire des biens mobiliers ou immobiliers, appartenant individuellement ou collectivement à des personnes privées, à l’État ou à des collectivités publiques, à des organisations sociales ou coopératives, sauf dans les cas où ces destructions seraient rendues absolument nécessaires par les opérations militaires. »

L’article 46 de la Convention de La Haye stipule que « la vie des individus et la propriété privée, ainsi que les convictions religieuses et l’exercice des cultes, doivent être respectés. »

Le gouvernement israélien considère que la Cisjordanie n’est pas sous occupation et qu’elle a plutôt le statut de « territoire disputé », ce qui limite l’applicabilité des dispositions du droit humanitaire international.

Quelle responsabilité Israël a-t-il envers les Palestiniens qui vivent dans les structures devant être démolies ?

Ramesh Rajasingham, responsable de l’OCHA dans le TPO, a dit qu’Israël avait, « en tant que puissance occupante, l’obligation de protéger les civils palestiniens et d’administrer le territoire de façon à assurer leur bien-être et la satisfaction de leurs besoins essentiels. Les destructions de maisons de civils constituent un manquement à cette obligation. »

Dans le cas du village palestinien de Zanuta, qui est construit sur un site archéologique israélien, la cour a demandé à l’État d’offrir des solutions pour ceux qui vivent dans les maisons qui seront détruites.

Selon un article publié dans le journal israélien Haaretz, « le représentant de l’État a répondu en disant qu’il n’était pas de la responsabilité de l’autorité militaire de trouver une solution. »

Qu’arrive-t-il après les démolitions ?

Les organisations humanitaires fournissent souvent des abris d’urgence aux Palestiniens dont les maisons ont été détruites. Or, même ces abris d’urgence peuvent être considérés comme illégaux par l’administration civile israélienne s’ils sont construits sans permis dans la zone C.

Dans de nombreux cas, comme dans la zone de tir 918, les Palestiniens décident de reconstruire leur maison. D’autres vont vivre avec des proches jusqu’à ce qu’ils trouvent un nouveau foyer. Une minorité d’entre eux ont des maisons secondaires dans les zones A ou B, qui sont placées sous le contrôle total ou partiel de l’Autorité palestinienne (AP) et représentent 40 pour cent du territoire de la Cisjordanie.

Pour les résidents des huit villages de la zone de tir 918 dont on prévoit la démolition, il est difficile d’imaginer être expulsés de leur foyer.

Khalid Jabareen, qui habite l’un des villages, a dit à IRIN : « Nous voyons dans les médias comment vivent les gens, comment vivent les Israéliens. Si on se compare à ce que l’on voit, je peux dire que l’on ne vit pas. »

ah/kb/rz/oa




This article was produced by IRIN News while it was part of the United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs. Please send queries on copyright or liability to the UN. For more information: https://shop.un.org/rights-permissions

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