Ces derniers mois, la ville a été le théâtre de violents affrontements entre les troupes gouvernementales et les insurgés d’Ansar al-Sharia. Les ravages de la guerre sont manifestes : certains bâtiments sont à moitié détruits, des déchets de munitions jonchent les rues et les réseaux d’eau et d’électricité ont été saccagés. Les habitants de la ville préviennent les visiteurs de ne pas essayer de s’approcher du complexe administratif ni des autres bâtiments gouvernementaux, car ils pensent qu’ils sont minés.
« Nous ne nous attendions pas à une telle destruction. Nous allons devoir repartir de rien. Tout est une priorité ici », a dit à IRIN le gouverneur d’Abyan, Jamal al-Aqil, depuis son bureau protégé par des sacs de sable.
« Le complexe administratif du gouvernorat, achevé fin 2010, est en ruine », a-t-il dit avant d’ajouter qu’il fallait procéder au déminage tout en rétablissant la sécurité et les services essentiels comme l’eau, l’électricité et l’assainissement.
Ghassan Faraj, secrétaire général du conseil municipal de Zinjibar, a dit à IRIN que les habitants dont les maisons étaient simplement endommagées avaient de la chance.
Le 12 mai, l’armée yéménite a lancé une offensive de grande envergure contre tous les bastions d’Ansar al-Sharia et, mi-juin, le ministre de la Défense a annoncé que les insurgés avaient été repoussés hors du gouvernorat et notamment des villes de Zinjibar et de Ja’ar, où ils étaient retranchés depuis plus d’un an.
L’accalmie survenue dans les combats depuis juin a permis le retour de plusieurs centaines de familles déplacées dans les villes de Ja'ar, Lawdar et Zinjibar. Mais de nombreuses zones sont infestées de mines antipersonnelles et d’autres engins non explosés. La population n’est pas suffisamment sensibilisée à ce problème, a dit Médecins Sans Frontières (MSF) dans un article publié le 12 juillet.
Salim al-Tam, sa femme et ses cinq enfants viennent de rentrer à Zinjibar, mais ils pensent déjà à repartir, au vu de tous les problèmes auxquels ils sont confrontés. « Nous n’avons rien trouvé ici pour nous permettre de survivre. Pas de nourriture, pas d’eau, pas d’abris », a dit M. al-Tam à IRIN. « Nous cherchons un meilleur endroit à l’extérieur de Zinjibar pour nous loger en attendant que les conditions s’améliorent ici ».
Des rapports indiquent que près de 150 000 personnes ont fui leur maison d’Abyan pour se réfugier dans les gouvernorats d’Aden et de Lahj lorsque les affrontements ont commencé, en mai 2011.
Selon M. al-Aqil, dans la ville de Ja’ar, où les dégâts ont été moins importants qu’à Zinjibar, des équipes d’agents de l’État ont entrepris de réparer le réseau électrique et les citoyens commencent à avoir accès à l’eau.
Ansar al-Sharia, une branche d’Al-Qaida dans la péninsule arabique (AQPA), a revendiqué l’assassinat de plus de 90 soldats en mai, lorsqu’un kamikaze portant un uniforme de l’armée s’est fait exploser lors d’une répétition d’un défilé à Sanaa, la capitale du Yémen.
Évaluer les besoins et encourager les retours
Le gouvernement et les organisations d’aide humanitaire procèdent actuellement à l’évaluation des besoins à Zinjibar et dans les environs, a dit à IRIN Barry Came, porte-parole du Programme alimentaire mondiale (PAM), le 14 juillet, avant d’ajouter qu’une équipe du PAM devait se rendre dans la région la semaine prochaine. Selon lui, après ces « très lourdes destructions », les priorités sont l’eau, les abris, la nourriture, l’assainissement et l’électricité.
En attendant, les agences des Nations Unies, le gouvernement et des organisations non gouvernementales (ONG) locales et internationales ont mis sur pied un groupe de travail dirigé par le ministre des Travaux publics, Omar Abdullah al-Kurshumi, pour apporter un soutien technique aux organisateurs de l’aide concernant les meilleures méthodes d’évaluation des biens endommagés, a annoncé Edward Leposky, chargé des relations publiques du Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR).
Le PAM, le Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF), le bureau des Nations Unies pour la coordination des Affaires humanitaires (OCHA) et l’Organisation mondiale de la santé (OMS) sont en train d’élaborer un plan de réponse interagences pour Abyan et le Sud, dont l’objectif est, entre autres, d’inciter les familles déplacées à revenir.
Selon M. Came, le PAM prévoit de mener une distribution générale de nourriture dans le gouvernorat d’Abyan pour 15 000 foyers déplacés et offre trois mois de rations alimentaires pour encourager environ 10 000 familles déplacées, réfugiées à Aden, à retourner chez elles, à Abyan. Le PAM vient déjà en aide à 140 000 personnes déplacées à l’intérieur de leur propre pays (PDIP) dans les gouvernorats d’Aden et de Lahj.
« Nous avons prépositionné du matériel pour l’eau, l’assainissement et l’hygiène, pour la protection de l’enfance et pour la nutrition afin de pouvoir intervenir dès que l’accès à l’ensemble de la population deviendra possible, » a expliqué à IRIN Alison Parker, chargée de communication de l’UNICEF.
Selon Ali Al-Yazidi, ministre de l’Administration locale, le gouvernement prévoit d’installer de nouveaux camps pour les PDIP dont les maisons ont été endommagées ou détruites. Ces camps seront dressés dans leurs propres villages, afin de les persuader de rentrer chez elles. « Nous travaillerons jour et nuit, même pendant le ramadan, pour favoriser le retour des familles déplacées », a-t-il déclaré.
Le 19 juin, le gouvernement yéménite a ratifié la création d’un fonds de reconstruction d’Abyan bénéficiant d’un montant initial de dix milliards de rials yéménites (47 millions de dollars), auquel ont contribué le gouvernement et des pays donateurs, ainsi que des hommes d’affaires et des expatriés yéménites.
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