« C’est le moment où on découvre la vie ; on se retrouve sans famille, sans contrainte », a dit Biniam Mohammed, coordonateur de MARCH (Modelling and Reinforcement to Combat HIV/AIDS), un projet né sur le campus Sidist Kilo de l’université d’Addis Abeba (AAU). « Certains en profitent tout en restant raisonnables, mais d’autres prennent des risques : ils mâchent du khat [un stimulant doux], ont [des relations sexuelles non protégées] et ont recours aux services de travailleuses du sexe ».
« Parmi ces étudiants, certains ne sont pas pleinement conscients des risques liés au VIH/SIDA, et c’est sans compter la pression des pairs », a-t-il ajouté.
Le taux de prévalence du VIH dans l’ensemble de l’Éthiopie est estimé à environ deux pour cent, mais il atteint 7,5 pour cent dans la capitale, Addis Abeba. Selon le Bureau fédéral de prévention et de lutte contre le VIH/SIDA (FHAPCO), des éléments d’information concernant la généralisation des pratiques sexuelles à risque suggèrent que les étudiants font partie des groupes les plus à risque en terme de vulnérabilité au VIH.
Les statistiques recueillies par MARCH indiquent que 50 pour cent des étudiants de l’AAU ont une vie sexuelle active, mais que seule la moitié d’entre eux utilise le préservatif, a dit M. Biniam.
Comportement à risque
« Souvent, ils n’utilisent pas de préservatifs… ils le font sous le coup de l’émotion, sans réfléchir », a dit Selam, un étudiant de l’AAU âgé de 19 ans.
Selam a ajouté que les étudiants qui arrivaient de la campagne étaient généralement moins informés au sujet du VIH et ne se débrouillaient pas aussi bien dans un environnement urbain que les jeunes de la capitale. Ils ne sont pas préparés à résister à des avances sexuelles indésirables ou à insister sur l’utilisation du préservatif.
D’après Girma Tesfaye, un ancien étudiant aujourd’hui coordonnateur de projets à Addis Abeba pour l’organisation non gouvernementale (ONG) Mekdim, qui s’intéresse aux questions liées au VIH, les étudiantes sont souvent la proie de « sugar daddies » (‘papa sucre’).
« Souvent, ils n’utilisent pas de préservatifs… ils le font sous le coup de l’émotion, sans réfléchir » |
« Les ‘sugar daddies’ ont parfois trois ou quatre partenaires, ce qui facilite la propagation du virus », a-t-il ajouté.
Selam a reconnu qu’il s’agissait d’un grave problème. Il a fait remarquer qu’en début de soirée, on pouvait voir des étudiantes outrageusement maquillées et légèrement vêtues se diriger vers ce que les étudiants appellent « le Debad », un endroit situé à l’extérieur de l’entrée principale du campus, pour se trouver un petit ami riche – un homme généralement marié, et entretenant probablement une série de petites amies.
« Si vous avez une relation sexuelle sous la contrainte, ou si vous avez un ‘sugar daddy’, la relation est inégale et, dès lors, plus à risque », a dit M. Biniam, de MARCH. « Les relations sexuelles sous la contrainte ou l’influence des autres présentent des risques élevés ».
Des enquêtes suggèrent également que les étudiants ont recours aux services de travailleuses du sexe. Selon une étude réalisée auprès des travailleuses du sexe de la capitale, 5,8 pour cent des clients étaient des étudiants. Les travailleuses du sexe du quartier d’Arat Kilo, situé à proximité de l’université, ont confirmé que plusieurs de leurs clients étaient des étudiants de l’AAU.
Grâce au financement accordé par le Plan d’urgence du président américain pour la lutte contre le SIDA (PEPFAR), MARCH produit Life 101, un roman-photo trimestriel qui raconte l’histoire de trois étudiants et d’un couple fréquentant l’AAU. On les voit évoluer dans leur vie quotidienne à l’université et dans la capitale et gérer toutes sortes de situations, en lien notamment avec le commerce du sexe, l’utilisation du préservatif, les relations humaines, le dépistage du VIH et l’égalité entre les sexes. MARCH s’occupe également de faciliter l’organisation d’événements de divertissement à l’initiative des étudiants afin d’encourager les discussions sur ces thèmes.
Récemment, plus de 20 présidents d’universités éthiopiennes ont adressé une requête au ministère de l’Éducation et au FHAPCO pour qu’ils prennent plus de mesures pour prévenir et lutter contre le VIH, notamment l’adoption d’une politique et d’une stratégie nationales pour les universités, la création d’un centre de recherche et d’information sur le VIH/SIDA, des efforts de plaidoyer en faveur de l’égalité des sexes et de la lutte contre le VIH/SIDA et l’organisation de forums de discussion et de formations pérennes.
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