En Casamance, les organisations d’aide humanitaire sont confrontées à des déplacements multiples et irréguliers de population, des conflits armés sporadiques, l’incertitude liée à la présence de mines antipersonnel et des crimes de plus en plus violents.
« Il est difficile de déterminer les besoins précis des déplacés, car la population hôte se trouve elle-même dans une position vulnérable », a dit Christina de Bruin, chef du sous-bureau de l’UNICEF en Casamance. « Même si les familles nouvellement déplacées ont un endroit où aller à Ziguinchor, leur présence appauvrit les familles hôtes. Il faut tenir compte de ces éléments ».
Selon Maurice Grundbacher, du Comité international de la Croix-Rouge en Casamance, ce n’est qu’après un certain temps, lorsque la famille hôte a épuisé ses ressources, que l’on peut véritablement identifier les besoins.
« Il est important de réévaluer la situation après quelques semaines. C’est là que les conditions peuvent commencer à se dégrader ».
Par ailleurs, la nature transitoire des mouvements de population en Casamance affecte les décisions en matière d’aide. Début septembre, des centaines de personnes habitant en périphérie de Ziguinchor ont abandonné leur foyer quand des groupes armés ont pénétré dans leurs villages. Les organisations d’aide humanitaire ont commencé à mobiliser les secours. Quelques jours plus tard, de nombreux habitants ont timidement pris le chemin du retour afin de s’occuper de leurs champs.
Sur la Casamance, lire aussi |
Plus près de la guerre que de la paix en Casamance ? – Analyse |
Une mine en moins, des hectares de terre cultivable en plus |
Nouvelles violences en Casamance |
« Lorsque nous évaluons les besoins des personnes déplacées, nous nous demandons notamment si elles peuvent se rendre dans leurs champs », a dit Marc Henrottay, qui dirige les opérations du Programme alimentaire mondial (PAM) en Casamance.
Insécurité
Bien que les récentes violences n’aient pas forcé les organisations humanitaires à opérer des changements drastiques dans leurs activités, les nouvelles conditions dans lesquelles elles travaillent les obligent à accorder la priorité à la sécurité du personnel et des bénéficiaires, ont indiqué des travailleurs humanitaires.
« En Casamance, l’incertitude règne : c’est pourquoi il faut prendre des précautions extrêmes dans toutes nos activités », a dit M. Henrottay, du PAM. « Il est souvent difficile de vérifier les informations concernant la situation sécuritaire ».
Le PAM songe à apporter des changements à ses programmes d’alimentation scolaire dans les zones récemment frappées par l’insécurité, a-t-il ajouté. L’une des options serait de livrer les vivres dans un endroit où les bénéficiaires peuvent venir les chercher, mais cela les expose à des risques. « D’un côté, on a des enfants qui vivent dans l’insécurité alimentaire ; de l’autre, la livraison des vivres peut comporter des risques [pour eux]. »
Photo: Nancy Palus/IRIN |
Des enfants à l’école maternelle de Ziguinchor, où le PAM distribue des repas |
Au cours des dernières semaines, l’insécurité a gêné les opérations de déminage humanitaire de Handicap International, selon la chef de mission Camille Aubourg. « Les conditions sont très difficiles : d’une journée à l’autre, nous ne sommes jamais certains de pouvoir aller sur le terrain », a-t-elle dit à IRIN.
« L’incertitude est la seule condition permanente. La situation n’est pas assez dramatique pour cesser complètement les opérations d’aide humanitaire, mais pas assez stable pour nous permettre de travailler en tout temps sans restrictions », a ajouté Mme Aubourg. « Mettre fin maintenant aux opérations de déminage et d’aide humanitaire serait une tragédie pour la région et ses habitants, qui sont les premières victimes de la situation ».
Progrès
Les récents épisodes de violence se sont produits alors que de nombreuses communautés cherchent à rebâtir leurs villages après des années d’exil. Selon les travailleurs humanitaires, les troubles récents menacent les progrès des dernières années.
Selon Abdoulaye Diallo, conseiller technique pour GTZ-Procas, une organisation de développement financée par l’Allemagne et basée en Casamance, il ne faut surtout pas que les progrès réalisés par ceux qui sont rentrés chez eux au cours des dernières années soient anéantis.
« De nombreuses communautés ont consacré beaucoup de temps et d’efforts à panser les plaies, discuter, se pardonner et aller de l’avant afin de rebâtir leurs villages », a dit M. Diallo à IRIN. « Lorsqu’il y a une recrudescence de la violence, les craintes et la méfiance ressurgissent. Il faut absolument travailler de concert avec les communautés afin de les aider à s’adapter à une situation qui évolue et à prendre des mesures pour éviter les difficultés ».
« Il existe des outils pour s’adapter à la situation sécuritaire et aider les populations locales à faire de même. L’important, c’est que les organisations d’aide humanitaire n’abandonnent pas ces gens », a conclu M. Diallo.
np/aj/gd/ail
This article was produced by IRIN News while it was part of the United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs. Please send queries on copyright or liability to the UN. For more information: https://shop.un.org/rights-permissions