En 2006, à Mogadiscio, de violents combats ont opposé des groupes islamiques à une force née de l’alliance des différents chefs de guerre, se terminant par la défaite de cette dernière. Les milices islamiques, regroupées au sein de l’Union des tribunaux islamiques (UIC), ont au départ bénéficié d’un soutien considérable des civils et des milieux d’affaires, les Somaliens étant lassés de l’insécurité régnant dans les zones contrôlées par les chefs de guerre, notamment la capitale.
L’UIC comptait dans ses rangs à la fois des éléments radicaux – al-Shabab – et des membres modérés, mais les radicaux représentaient une petite minorité. De juin à décembre 2006, sous le contrôle de l’UIC, Mogadiscio, ainsi que d’autres régions du sud et du centre de la Somalie, ont connu un calme sans précédent.
En décembre 2006, les forces éthiopiennes, soutenues par les Etats-Unis – qui considéraient l’UIC comme une organisation terroriste – sont entrées en Somalie et ont mis en place, à Mogadiscio, le gouvernement fédéral de transition (TFG), qui avait été créé en 2004 après deux ans de négociations au Kenya, mais qui n’avait eu jusque là aucune existence effective.
Suite à cet événement, des affrontements sanglants ont eu lieu entre les forces restantes de l’UIC, c’est-à-dire notamment al-Shabab et ses partisans, et les forces alliées de l’Ethiopie et du TFG. Des centaines de milliers de civils ont été forcés de fuir leurs habitations.
En décembre 2008, les Ethiopiens se sont retirés de la Somalie, laissant à une Union Africaine bien modeste (l’AMISOM) le soin de défendre le gouvernement.
Photo: Abdi Hassan/IRIN |
Le président Sheikh Sharif Sheikh Ahmed |
Les Somaliens étaient nombreux à espérer que l’élection du président Ahmed et le retrait des troupes éthiopiennes mettraient un terme à la violence et inaugureraient une nouvelle ère de paix dans le pays. Ce ne fut pas le cas.
Le président Ahmed a été confronté à l’opposition d’une faction dissidente de son propre mouvement, l’ARS, dirigée par son ancien allié, Sheikh Hassan Dahir Aweys. Ce dernier, qui était basé à Asmara, en Érythrée, est revenu en Somalie pour y créer le Hisbul Islami (Parti de l’Islam).
L’accord de paix de Djibouti a également été rejeté par al-Shabab, qui s’était depuis longtemps séparé de l’UIC.
Alors qu’auparavant, les luttes pour le pouvoir en Somalie étaient dictées par un système clanique complexe, le conflit actuel correspond, en apparence du moins, à une guerre entre des groupes ayant différentes interprétations de l’Islam.
Photo: Jamal Osman/IRIN |
Des déplacés attendant de recevoir de la nourriture à Mogadiscio (photo d’archives) |
Les forces du TFG comprennent des combattants qui servaient autrefois différents chefs de guerre, des anciens membres de l’UIC, des milices claniques et des forces formées par les Ethiopiens. Le commandement centralisé de ces groupes disparates étant faible, malgré les efforts du gouvernement, ils ont beaucoup de difficultés à mener des attaques coordonnées. Des affrontements entre ces différentes unités ont été rapportés.
Pour le TFG, al-Shabab représente la principale menace. Ce groupe, qui est classé par les Etats-Unis parmi les organisations terroristes, est accusé d’avoir des liens avec Al-Qaeda. Il contrôle une grande partie du sud et du centre de la Somalie, dont certaines parties de Mogadiscio. Al-Shabab serait dirigé par un personnage obscur se faisant appeler Abu Zubeyr. D’après des sources somaliennes, son vrai nom serait Ahmed Godane, et il serait originaire de la région sécessionniste du Somaliland. Il se fait principalement entendre via des messages enregistrés transmis aux radios somaliennes. L’objectif proclamé du groupe est de propager l’Islam à travers le monde.
Ce mouvement a été accusé d’avoir enlevé et assassiné des membres du gouvernement et des journalistes, et de s’être livré à d’autres activités criminelles.
Une des idées maîtresses de la rhétorique officielle d’al-Shabab est que l’appartenance à un clan et l’origine géographique ne devraient jouer aucun rôle dans les questions de commandement, et que n’importe quel Somalien devrait pouvoir devenir « émir », c’est-à-dire général, dans n’importe quelle région du pays. Or cette politique ne semble pas être appliquée dans le centre de la Somalie, où seuls les locaux obtiennent le grade d’émir.
Al-Shabab considère que le président Ahmed a trahi la cause islamique et que lui et son gouvernement sont des « Murtadin » (apostats). Le groupe défend l’application stricte de la Sharia.
Comme al-Shabab, Hisbul Islami combat aussi le TFG, mais il ne semble pas qu’il soit impliqué dans des enlèvements ou des assassinats. En outre, les deux groupes ont des préoccupations différentes. Hisbul Islami est tourné vers l’intérieur et s’intéresse aux affaires locales plutôt qu’aux enjeux internationaux, d’après des analystes somaliens. M. Aweys, son leader, considère l’accord de paix de Djibouti comme une trahison. Le groupe serait soutenu par l’Erythrée, ce que cet Etat nie systématiquement.
Hisbul Islami assure qu’il cessera le combat si toutes les « forces étrangères », y compris les troupes de l’AMISOM (voir ci-dessous), quittent la Somalie.
Ahlu Sunna Waljama est une secte soufie, considérée comme plus modérée qu’al-Shabab en matière d’interprétation de l’Islam. Ce groupe a rejoint le conflit fin décembre 2008, délogeant al-Shabab des villes de Guri-Eil et Dusamareb, dans la région de Galgadud. Cette milice contrôle aujourd’hui tout le Galgadud, dans le centre de la Somalie.
Ahlu Sunna Waljama est divisée en deux branches. La première, créée par les chefs religieux soufis, bénéficie du soutien de l’Ethiopie. Cette branche se concentre essentiellement dans les régions du centre. L’autre est dirigée par d’anciens chefs de guerre, qui utilisent apparemment cette appartenance pour se refaire un nom. Cette deuxième branche, qui est basée principalement dans le sud, dans les régions de Gedo, Bay et Bakol, a des liens avec le TFG.
Photo: TS/IRIN |
Des troupes ougandaises sont chargées du maintien de la paix dans le cadre de l’AMISOM (photo d’archives) |
L’AMISOM, composée principalement de troupes ougandaises et burundaises, est présente dans le pays depuis 2007. Jusqu’à récemment, son rôle consistait uniquement à protéger le président, le premier ministre et les infrastructures vitales telles que l’aéroport et le port de Mogadiscio. Ces derniers mois, les troupes de l’AMISOM ont été forcées de participer au conflit, car elles ont été attaquées par des insurgés. D’après les Somaliens, ces troupes bombarderaient à l’aveuglette en réponse aux attaques, une accusation qu’elles récusent.
Les troupes de l’AMISOM, qui comptent environ 5 000 hommes, sont soutenues par les Etats-Unis et les Nations Unies, et se concentrent à Mogadiscio.
Troupes éthiopiennes
En janvier 2009, l’Ethiopie a déclaré que toutes ses troupes s’étaient retirées de Somalie. Depuis, la présence de troupes éthiopiennes a été signalée dans certaines régions du centre du pays, mais l’Ethiopie nie ces affirmations. Des sources locales de Beletweyne ont dit à IRIN que des forces éthiopiennes étaient entrées dans la ville le 28 août, et qu’elles n’en étaient pas parties.
ah/mw/am/oa
This article was produced by IRIN News while it was part of the United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs. Please send queries on copyright or liability to the UN. For more information: https://shop.un.org/rights-permissions