Après une semaine passée à prodiguer gratuitement des soins dans le district de Kara, situé dans le nord du pays, du 31 mars au 4 avril, le chirurgien en chef de l’armée, Badjona Songne, a déclaré à IRIN que dispenser des soins médicaux était une façon de rétablir la réputation abusive de l’armée. « Avant ces campagnes médicales [militaires], l’armée était considérée par la population locale comme un symbole de répression – une force brutale ».
Dans le cadre du processus de paix de 2006, le gouvernement togolais a accepté de constituer une commission de vérité et de réconciliation chargée d’examiner les cas de violations présumées des droits humains remontant à l’indépendance de 1956. Parmi les plus de 25 000 personnes récemment interrogées par le bureau du Haut Commissaire aux droits de l’homme des Nations Unies au Togo, 70 pour cent ont déclaré souhaiter que la commission soit en mesure de punir les coupables.
Besoins médicaux
Le gouvernement estime qu’en 2006, trois quarts des quelque 50 000 personnes vivant dans le district de Kara, dans le nord du pays, gagnent moins de 300 dollars, le salaire annuel minimum requis pour couvrir les besoins fondamentaux, d’après les calculs du gouvernement. Un quart des enfants de Kara souffrent de malnutrition chronique, et plus de sept pour cent souffrent de malnutrition aiguë, selon une enquête menée conjointement par les Nations Unies et le gouvernement en 2008.
M. Songne, chirurgien militaire, a déclaré à IRIN que les 1 200 militaires ayant assuré les soins médicaux, appuyés par 100 véhicules et un avion, ont été « submergés » de demandes. « Les patients ont été si nombreux que nous n’avons pas été en mesure d’aider tout le monde ».
Les enfants de Kara | |
25,2 pour cent des enfants souffrent de malnutrition chronique | |
7,6 pour cent souffrent de malnutrition aiguë | |
Source: UNICEF, 2008 |
Kadri Tankari, représentant de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) au Togo, a dit à IRIN qu’il ne voyait pas de problème à ce que les forces armées interviennent. « Dans la plupart des pays africains, les systèmes de santé nationaux sont très faibles et les institutions [gouvernementales] des ministères de la Santé ne peuvent y parvenir seules ».
Selon ce dernier, compte tenu de l’« ampleur » des problèmes de santé auxquels est confronté le Togo, les forces armées qui collaborent avec le ministère de la Santé peuvent apporter leur aide. « Les établissements de l’armée pourraient s’avérer utiles, tout particulièrement dans les zones éloignées », a affirmé M. Tankari.
D’après le gouvernement, en 2006, près de sept nourrissons sur 100 sont décédés à la naissance, 49 pour cent des naissances se sont déroulées sans surveillance médicale et on recensait moins d’un médecin pour 10 000 résidents – le nombre minimum recommandé par l’OMS pour garantir les services de santé fondamentaux.
M. Songne, chirurgien de l’armée togolaise, a expliqué à IRIN qu’il souhaitait voir les responsables locaux se tourner vers les forces armées pour assurer la gratuité des soins, des soins que les militaires continueront selon lui de prodiguer dans des lieux à déterminer. « Nous souhaitons par exemple qu’un jour, un responsable de canton se lève et dise « je veux voir ces hernies et ces goitres [gonflement des ganglions lymphatiques] disparaître de mon canton ». Le « rêve » de M. Songne est que les civils en viennent à faire confiance à l’armée.
Pour Ajavon Zeus, président de l’ONG Collectif des associations contre l’impunité au Togo (CASIT), l’instauration d’un climat de confiance ne se fera pas en un jour. « La réconciliation est un processus qui se fera avec un ensemble de choses non avec des actes isolés ». M. Zeus a confié à IRIN que CASIT préparait des centaines de dossiers de poursuite pour violences présumées perpétrées par l’armée au cours de la répression de 2005.
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