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Des hommes peu impliqués dans le travail des champs

Comment expliquer que des dizaines de milliers d’hectares de terres fertiles soient laissées en jachère en Sierra Leone, alors que des dizaines de milliers d’hommes valides sont sans emploi ?

On pourrait trouver plusieurs explications à cette situation, mais pour Peter Kagbo, coordinateur de projets dans une association de développement rural du village de Masongbo, près de Makeni, la réponse tient en quelques mots : « le manque de conviction ».

« La culture du riz est une activité pénible et difficile, qui ne peut être pratiquée en dilettante. Et si vous commettez une erreur – en utilisant, par exemple, les mauvaises semences, ou en semant les graines à la mauvaise période – non seulement vous avez perdu votre temps et votre énergie, mais vous n’avez plus rien à manger pour vous et votre famille », a-t-il affirmé.

« Les gens préfèrent donc rester chez eux à ne rien faire, plutôt que travailler », a-t-il expliqué. « Mais ils observent aussi […] Pour ma part, je pense sincèrement que s’ils étaient convaincus qu’ils pouvaient vivre décemment de l’agriculture, ils sortiraient tous pour travailler dans les champs ».

Le riz est l’aliment de base du pays, mais la plupart des Sierra-Léonais consomment du riz importé d’Asie. Moins de 10 pour cent des rizières de la Sierra Leone sont cultivées, a déploré M. Kagbo, qui tente malgré tout de remédier à ce problème.

En 1999, au plus fort de la guerre civile sanglante qui a ravagé le pays, alors que la localité de Makeni était aux mains des rebelles, M. Kagbo avait lancé une coopérative agricole et ce qu’il appelle une « exploitation agricole de démonstration » dans laquelle il cultive cette année 219 acres de riz, ainsi que divers légumes secs et produits maraîchers.

« Je l’appelle ainsi parce que je veux prouver aux paysans qu’elle peut leur permettre de nourrir leur famille et de gagner de l’argent », a-t-il affirmé.

Faire face aux contraintes du travail

Les systèmes de production agricole de la plupart des paysans sierra-léonais sont si inefficaces que même ceux d’entre eux qui s’adonnent à la riziculture ne produisent pas assez pour subvenir à leurs besoins.

Avant même le début de la saison agricole, le paysan est soumis à de nombreuses contraintes, a expliqué M. Kagbo. Il doit obtenir du chef local ou du propriétaire du champ l’autorisation d’utiliser la terre.

Ensuite, il lui faut trouver les semences de riz. « Il peut les acheter au comptant, mais le plus souvent, il doit emprunter ces semences et les rembourser plus tard avec intérêts ».

Et comment savoir si on lui fournit la bonne variété de semences ? Comment différencier les semences à longue saison de croissance de celles à courte saison de croissance, puisqu’elles sont quasi identiques, a affirmé M. Kagbo. « C’est un gros risque ».

Ensuite, le travail commence. Si la rizière est située dans une région montagneuse, le paysan débroussaille le terrain ; si elle est située dans une zone marécageuse, il la débarrasse des plantes sauvages. Il doit encore semer, arracher les mauvaises herbes pour l’entretenir, et éloigner les oiseaux des rizières.

Il suffit qu’il soit malade un jour pour que les oiseaux picorent toute sa récolte. Dans ce cas, non seulement le paysan et sa famille n’ont plus rien à manger ni à vendre, mais en plus, il se retrouve endetté.

L’approche collective

La culture du riz n’offre aucune solution garantie, a déploré M. Kagbo « Mais nous avons constaté qu’en travaillant ensemble et en associant leurs efforts, les paysans réduisaient les risques ».

En tant que membres de la coopérative, ils mettent également en commun leurs connaissances et leurs ressources. « Ils empruntent des semences sans devoir payer d’intérêts et nous contrôlons minutieusement les semences pour nous assurer qu’ils choisissent celles qui sont adaptées à leurs champs ».

« Nous couvrons également les frais médicaux lorsqu’ils sont malades ou blessés », a ajouté M. Kagbo.

L’exploitation agricole de démonstration ne fait pas de profit. « Après avoir amorti nos dépenses, nous créons une banque de semences pour les paysans, en vue de la prochaine saison agricole, puis nous distribuons le reste aux personnes amputées et aux autres membres de la communauté qui sont incapables de travailler dans les champs ».

Outre le travail dans l’exploitation de démonstration, les membres de la coopérative cultivent également leurs propres terres et s’entraident en travaillant, à tour de rôle, dans les champs des autres membres.

De manière générale, les récoltes obtenues par les membres de la coopérative sur leurs terres sont nettement supérieures à celles des autres paysans de la région, a fait remarquer M. Kagbo.

Tout le monde ne peut pas être membre de la coopérative.

« Nous devons faire attention au nombre de personnes que nous acceptons dans la coopérative, car plus le nombre d’adhérents est important, plus les risques sont grands ».

« Nous devrions acheter un tracteur et augmenter nos surfaces cultivables ». Mais l’objectif de la coopérative n’est pas de se développer encore plus, a expliqué M. Kagbo. « C’est de favoriser la création d’autres coopératives ».

« Nos membres se procurent les semences de riz sans payer d’intérêts, mais à condition qu’ils acceptent de consacrer du temps à aider les paysans en dehors de la coopérative ».

« L’objectif est que chaque membre puisse créer sa petite coopérative afin de démultiplier le système ».

dh/nr/ads/nh/ail


This article was produced by IRIN News while it was part of the United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs. Please send queries on copyright or liability to the UN. For more information: https://shop.un.org/rights-permissions

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