Follow our new WhatsApp channel

See updates
  1. Accueil
  2. Asia
  3. Pakistan

Nouveau projet de loi sur le trafic illégal de reins

« Je suis venu de mon village, à 20 kilomètres de Lahore, pour vendre mon rein, mais je ne trouve personne pour m’aider », explique Haroun Ahmed, 25 ans, assis sur le bord d’une route très fréquentée de Lahore, la capitale du Punjab, une province populeuse du Pakistan.

Illettré, Haroun n’a pas entendu parler du nouveau projet de loi présenté à l’Assemblée en vue d’interdire les dons de reins de la part de donneurs sans lien de parenté avec le receveur.

Il n’a pas lu la presse ces dernières semaines, dont les gros titres traitent de la controverse sur la question des dons de reins, ni l’arrêt rendu par la Cour suprême pakistanaise à la fin du mois de juillet, et qui ordonne au gouvernement de promulguer immédiatement une loi visant à réguler le commerce d’organes humains – et particulièrement de reins.

La cour répondait à plusieurs plaintes déposées contre des intermédiaires sans scrupule, accusés de contraindre des personnes pauvres à vendre leur rein, en échange de quoi, celles-ci ne reçoivent bien souvent qu’un faible pourcentage de la somme initialement promise.

La cour a également consulté plusieurs rapports médias, selon lesquels la police a découvert au début du mois de juillet qu’au moins dix hôpitaux de Lahore étaient impliqués dans ce commerce illégal – ce qui leur a valu de vives réprimandes de la part des autorités.

En mai 2007, au moins trois médecins ont été arrêtés à Lahore pour participation présumée au trafic de reins. En allusion à cette pratique, Chaudhry Iqbal, le ministre de la Santé du Punjab, a expliqué à IRIN que « des mesures strictes allaient être prises à l’encontre de toute personne responsable ».

Projet de loi gouvernemental

A la mi-août, à la suite de l’arrêt rendu par la Cour suprême, le gouvernement a présenté le projet de loi 2007 sur la transplantation d’organes et de tissus humains à l’Assemblée nationale. Ce projet de loi comporte un certain nombre de mesures, notamment une restriction des dons d’organes aux « proches parents biologiques » âgés de plus de 18 ans, et une interdiction des dons effectués par des personnes sans lien de parenté avec le bénéficiaire.

Conformément à cette nouvelle loi, un comité d’évaluation composé d’experts médicaux serait chargé de déterminer le caractère pleinement volontaire des dons. Le projet de loi propose également une prise de mesures contre tout médecin coupable d’avoir violé les clauses de l’acte, et prévoit une peine de dix ans d’emprisonnement pour toute personne impliquée dans le trafic commercial d’organes.

Malgré tout, le projet de loi n’a pas encore été adopté par l’Assemblée, ce qui suscite les préoccupations des experts.

Le professeur Abdul Hassan Rizvi, directeur de l’Institut d’urologie du Sind, sis à Karachi, et pionnier des greffes au Pakistan, a appelé à « mettre fin immédiatement à cette terrible forme d’exploitation ».

Le docteur Rizvi mène une campagne contre les transplantations rénales illégales au Pakistan et critique les délais observés dans l’adoption du projet de loi.

« Lorsque nous partons assister à des conférences à l’étranger, nous sommes très gênés par les questions [qu’on nous pose] sur le commerce illégal d’organes, et les pratiques de certains médecins sont très embarrassantes pour nous », a récemment déclaré à la presse le docteur Sajjad Hussain, président de l’Association pakistanaise des chirurgiens urologues.

Halte à la chirurgie illégale

Néanmoins, grâce à l’attention récemment portée à ce problème, et aux mesures prises, au Punjab, contre plusieurs médecins, accusés d’être impliqués dans l’ablation illégale de reins contre rémunération, ces opérations chirurgicales illégales ne sont généralement plus pratiquées, du moins pour le moment.

« On m’a dit que plus personne ne faisait ça maintenant », a rapporté Haroun Ahmed, ajoutant que pour tenter de vendre son rein, il s’était rendu auprès « d’au moins une demi-douzaine de personnes auparavant chargées d’organiser ce type d’opérations », et qu’on lui avait dit de faire profil bas.

Ces dernières années, le Pakistan s’est forgé une réputation de centre international du trafic d’organes humains ; selon certaines estimations approximatives, 1 500 reins y seraient « vendus » chaque année par des donneurs désespérément pauvres.

Les dons d’organes, une conséquence de la pauvreté

Comme Haroun, bon nombre d’entre eux sont sans emploi et presque sans le sou. D’autres, et notamment les ouvriers des fours à briques, vendent leur rein pour rembourser les dettes importantes qu’ils ont contractées auprès de leurs employeurs. On pense que la plupart des reins disponibles sur le « marché » (environ 70 pour cent) appartenaient à ces travailleurs.

De nombreux cas de ce type de vente ont été rapportés au cours des quelques dernières années ; environ 1 000 reins sont « achetés » chaque année par des ressortissants étrangers qui viennent au Pakistan, la plupart en provenance du Golfe, d’Europe ou d’Amérique du Nord. D’autres sont achetés par de riches Pakistanais.

Quelque 500 reins, selon un rapport publié récemment dans le journal Dawn de Karachi, auraient été volontairement donnés à de proches parents.

Plusieurs cliniques et hôpitaux privés impliqués dans le trafic ont ouvert leurs portes à Lahore, et dans bon nombre d’autres grandes villes. Les donneurs sont souvent « recrutés » par des intermédiaires embauchés par ces centres, qui leur promettent des sommes allant de 1 165 à 2 500 dollars.

Toutefois, même lorsque tout ou partie de la somme promise aux donneurs change de mains, ceux-ci restent terriblement pauvres, et sont souvent confrontés à des problèmes de santé à long terme qui peuvent les empêcher de travailler, selon plusieurs études.

Mais les hommes comme Haroun, prêts à tout pour obtenir rapidement une somme d’argent sonnante et trébuchante, ne sont pas conscients de cela. On espère que la nouvelle loi, si elle est approuvée et mise en application, permettra d’éviter à des centaines de personnes de se trouver piégées dans ce cycle d’exploitation ; une forme d’exploitation qui continue d’ailleurs d’être pratiquée librement dans bon nombre de régions du pays depuis au moins cinq ans à mesure que les greffes de reins se multiplient, et que des personnes, attirées par la perspective d’obtenir un rein illégalement, convergent des quatre coins du monde vers le Pakistan pour profiter du désespoir des plus pauvres.

kh/ds/at/ar/cb/nh/ads


This article was produced by IRIN News while it was part of the United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs. Please send queries on copyright or liability to the UN. For more information: https://shop.un.org/rights-permissions

Partager cet article

Get the day’s top headlines in your inbox every morning

Starting at just $5 a month, you can become a member of The New Humanitarian and receive our premium newsletter, DAWNS Digest.

DAWNS Digest has been the trusted essential morning read for global aid and foreign policy professionals for more than 10 years.

Government, media, global governance organisations, NGOs, academics, and more subscribe to DAWNS to receive the day’s top global headlines of news and analysis in their inboxes every weekday morning.

It’s the perfect way to start your day.

Become a member of The New Humanitarian today and you’ll automatically be subscribed to DAWNS Digest – free of charge.

Become a member of The New Humanitarian

Support our journalism and become more involved in our community. Help us deliver informative, accessible, independent journalism that you can trust and provides accountability to the millions of people affected by crises worldwide.

Join