Pour entretenir sa famille, Amadou Badji a trouvé une solution : planter des manguiers dans un verger de deux hectares.
Mais aujourd’hui, la pérennité de son gagne-pain est de nouveau menacée par la mouche blanche, un petit insecte aux ailes blanches, quasi transparent, qui pullulent dans la région productrice de mangues.
« Encore cette année, je ne pourrai presque rien vendre de mes mangues de variétés tardives », expliquait-il. « Toute la récolte a été ravagée par la mouche blanche ».
Selon lui, c’est la troisième année consécutive que cet insecte s’attaque à ses récoltes.
La mouche blanche : une réelle menace pour les arboriculteurs
La réapparition de la mouche blanche, ou Ceratitis cosyra, dans cette région fertile pose de sérieux problèmes aux nombreux agriculteurs qui vivent de la production des mangues.
« Cette situation va être durement ressentie par tous les planteurs de la région car les mangues Keitt et Kent sont très prisées sur le marché », explique M. Badji. [Ces mangues] demeurent l’unique espoir d’éviter des cycles de famine au niveau des villages de la région pendant les périodes de soudure ».
La source principale de revenu des arboriculteurs vient de la production des mangues Keitt, Kent et Palmer. Ces variétés sucrées et charnues sont les plus prisées sur le marché et comme elles ne mûrissent pas sur l'arbre, elles sont moins périssables, ce qui permet aux agriculteurs de les vendre pendant une période prolongée.
L'autre avantage est qu'elles poussent pendant la saison des pluies, de juillet à septembre, ce qui correspond à la période de soudure. Grâce à ces mangues, des milliers de familles disposent de moyens de subsistance pendant cette période.
«Depuis que nous avons abandonné nos champs à cause des mines antipersonnel, nos revenus proviennent essentiellement des mangues Kent et Keitt. Maintenant que celles-ci sont en train d’être détruites, nous risquons la famine », déclare M. Badji.
« J’avais l’habitude de vendre au moins dix tonnes [de mangues] mais cette année je n’en ai eu qu’une seule. Mes revenus tournent autour de 150000 CFA [290 dollars américains]. Cela ne me permet même pas de passer la période hivernale », déclare Amadou Sané, Président des planteurs de l’arrondissement de Nyassia, situé à 18 kilomètres à l’ouest de Ziguinchor, capitale de la Casamance. « Mes enfants risquent de souffrir de faim et en plus je ne pourrai pas payer leur scolarité cette année », ajoute-t-il.
Landing Diedhiou essaie aussi de s’en sortir avec ce qui lui reste de sa récolte. Il s’est rendu à Ziguinchor, treize kilomètres à l’ouest de son village, Medina, pour tenter de vendre les quelques mangues qu’il a pu sauver des milliers d’autres qui ont pourri au sol.
« J’avais l’habitude de vendre au moins vingt tonnes de mangues Kent chaque année. Mais je n’en ai vendues que sept tonnes l’année passée et je risque de ne même pas atteindre trois tonnes cette année » explique-t-il.
Combattre ces insectes
Au bureau local du gouvernement pour la protection des végétaux, Sékou Diatta indique que la seule manière de remédier au problème à court terme est d'enterrer le fruit piqué pour limiter la diffusion des mouches.
Une solution plus radicale consisterait à piéger les insectes. Mais cela supposerait une meilleure connaissance du cycle de vie des mouches blanches, indique M. Diatta. La femelle pique la mangue pour pondre ses oeufs dans le fruit mûr. Les oeufs éclosent au bout de deux à quatre jours et libèrent de petites larves blanches, ce qui occasionne la décomposition du fruit qui tombe alors de la branche.
C’est à ce moment que les mouches doivent être piégées, en isolant les mangues infestées pendant qu’elles sont toujours sur l'arbre. Sinon, une fois que la mangue infestée est tombée, les asticots s’enfouissent dans le sol pour achever leur développement, puis en ressortent pour reproduire leur cycle de vie et infecter d’autres mangues.
Une étude menée par le bureau de la protection des végétaux et Apran/SDP, une ONG locale spécialisée dans l’agriculture, démontre que chaque manguier est attaqué par environ 300 mouches blanches par semaine. Pour prévenir une perte de revenu chez les agriculteurs, ce taux ne devrait pas dépasser 25.
Les solutions
« Rien n’est fait pour nous venir en aide », déplore M. Diedhou. « Il faut un programme d’urgence d’aide en Casamance, comme celui consenti aux populations du nord du Sénégal dont les cultures avaient été détruites, il y a deux ans, par les criquets », explique-t-il en faisant référence aux efforts conjoints du gouvernement sénégalais et des organisations internationales pour éradiquer l’invasion de criquets de 2004.
Et certains craignent que le problème des mouches blanches ne s’étende au-là des plantations de mangues.
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