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Washington envoie des avions d’épandage pour tuer les criquets mais les Nations Unies en attendent davantage

A plane sprays pesticide on a swarm of desert locusts devouring grazing land. FAO
The UN says more planes are needed to fight the locust invasion
Les Etats-Unis ont annoncé qu’ils vont fournir immédiatement des avions d’épandage pour éliminer les essaims de criquets qui continuent de se reproduire de manière incontrôlée en Mauritanie, au Mali et au Sénégal, menaçant la prochaine récolte dans cette région sahélienne de l’Afrique de l’Ouest.

Washington a fait part de cette initiative alors que les Nations Unies s’efforçaient de trouver un plus grand nombre d’avions pour lutter contre l’invasion des criquets avant que ceux-ci ne dévorent les récoltes de maïs, de riz, de sorgho et de mil.

«Les besoins les plus urgents auxquels la FAO s’efforce de répondre sont la fourniture d’un avion pour transporter les pesticides et l’augmentation des moyens d’épandage,» a déclaré Jacques Diouf, le directeur général de l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture, dans une note transmise à IRIN mercredi.

Diouf a indiqué que la France et l’Italie ont fourni des avions de transport pour assurer la mise à disposition rapide des pesticides dans les endroits où les besoins sont les plus importants. La FAO a en outre pris contact avec les Etats-Unis, le Canada et de nombreux autres pays européens pour obtenir des avions gros porteurs tels que les avions Galaxies, Hercules C130 et les Antonov 124.

L’envoi par les Etats-Unis de six avions épandeurs Turbo Thrush qui opéreront le long de la frontière entre le Sénégal, la Mauritanie et le Mali - les trois pays d’Afrique de l’Ouest les plus affectés par l’invasion des criquets – a été annoncé mercredi. Chaque avion pourra traiter 5 000 hectares par jour.

L’aide américaine fait suite à une tournée de 10 jours effectuée dans la région par Roger Winter, directeur adjoint de l’USAID, l’agence américaine de développement.

«Nous devons maintenant faire tout ce que nous pouvons pour protéger les cultures tant que c’est encore possible,» a dit Winter dans un communiqué.

«J’ai déployé une cellule de crise pour travailler avec la FAO et les comités de lutte mis en place par les gouvernements afin de participer à l’excellent effort de collaboration qui est en cours,» a t-il ajouté.

En fournissant ces avions, le gouvernement américain va presque doubler la valeur de l’aide qu’il a affectée à la lutte contre l’invasion des criquets, la portant ainsi à sept millions de dollars US.

En Europe et en Amérique du Nord, les grands donateurs n’ont pas réagi rapidement à l’invasion des criquets, malgré les avertissements lancés dès octobre 2003 par les experts agricoles, qui prévoyaient une invasion si des épandages n’étaient pas effectués à temps.

Le Maroc, l’Algérie, la Libye et la Tunisie, craignant que les criquets qui se reproduisent actuellement dans le Sahel ne remontent vers l’Afrique du Nord, ont pris d’importantes initiatives en fournissant aux pays victimes du péril acridien des avions, des équipes d’épandage et des pesticides. Même le Brésil et l’Afrique du Sud ont participé à l’effort international en envoyant des avions épandeurs.

Mais l’envoi des six avions américains marque la première contribution d’un important pays donateur.

Donateurs et FAO s’accusent mutuellement

Une réunion, qui s’est tenue mercredi à huis-clos à Dakar, a éclipsé le différent entre la FAO et les donateurs qui s’accusent mutuellement d’être responsables du retard dans la mise en place des moyens de lutte, a indiqué à IRIN une source présente à la réunion.

Cette source a indiqué que la FAO a accusé les donateurs de n’avoir pas réagi promptement à la demande d’aide de 100 millions de dollars pour lutter contre le péril acridien. La crise aurait pu provoquer une famine dans certaines régions du Sahel si on avait laissé les criquets dévorer une grosse partie des cultures qui seront récoltées en octobre et novembre.

Mais les donateurs, en particulier les Etats-Unis, l’Union Européenne et la France, ont critiqué et accusé la FAO de pas leur avoir communiqué à temps les informations appropriées et de ne pas s’être suffisamment préparé pour faire face à cette situation d’urgence, a ajouté la source.

Selon des sources de la FAO, les donateurs ont accordé jusqu’à présent moins de la moitié des 100 millions de dollars demandés, et moins de 25 millions de dollars ont été débloqués pour financer des actions immédiates sur le terrain.

Ce n’est que maintenant que les pays affectés par le péril acridien autorisent des équipes de lutte contre les criquets à intervenir librement au-delà des frontières internationales. Auparavant, chaque gouvernement s’employait à résoudre le problème sur son propre territoire.

Cette absence d’actions transfrontalières a suscité une grande frustration au Sénégal -- qui a enregistré quelques succès dans la lutte contre les essaims arrivés de Mauritanie en juillet et août.

Mais les moyens mis en oeuvre par la Mauritanie voisine pour organiser sa propre campagne de lutte se sont avérés moins efficaces et de nouveaux essaims de criquets roses immatures et voraces se déplacent vers le sud du pays pour réinfecter au Sénégal d’importantes zones déjà traitées.

Un correspondant d’IRIN en visite le week-end dernier dans la région nord-ouest du Sénégal a rencontré un essaim de ce type : il avait envahi des champs de mil et d’arachide, là où les corps en décomposition de millions de larves pulvérisées quelques jours plus tôt jonchaient encore le sol.

Keith Cresman, expert de la lutte anti-ancridienne auprès de la FAO à Rome, explique que les pesticides recommandés par la FAO se dispersent assez rapidement de manière à ne pas nuire à l’environnement. Mais cela veut aussi dire que de tels pesticides sont inefficaces lorsqu’une zone déjà pulvérisée est réinfestée par des criquets.

«Nous utilisons des pesticides qui, après 24 à 48 heures, ne sont plus suffisamment efficaces pour tuer les criquets,» a t-il indiqué à IRIN.

Des succès très contrastés dans le traitement des régions

Au 28 septembre, la Mauritanie avait traité 212 000 hectares de terre sur les 1,6 millions d’hectares infestés par les criquets dans le sud désertique - soit 13 pour cent de sa superficie totale.

A la même date, le Sénégal déclarait avoir traité sur son territoire plus des deux-tiers des 300 000 hectares de terre infestés par les criquets.

Dans son bulletin d’information quotidien sur la situation du péril acridien, le ministre sénégalais de l’Agriculture annonçait que «la vague des criquets roses venant de Mauritanie et entrant sur le territoire national entre Podor et Richard Toll se poursuit. Sur les six essaims de criquets détectés mardi à Louga, Richard Toll et Dahra, quatre ont été éradiqués».

Toutefois, Cressman a indiqué que les essaims qui se sont constitués au Sénégal se sont aussi déplacés vers la Mauritanie.

Bien que la Mauritanie, le Mali et le Sénégal soient jusqu’ici les pays les plus affectés par le péril acridien, la FAO a également signalé la présence de criquets au Niger, au Tchad et dans le nord du Burkina Faso.

Mercredi, le ministre burkinabé de l’Agriculture, Salif Diallo, a exhorté les paysans à récolter leurs cultures le plus tôt possible avant que les criquets ne les dévorent – ces insectes peuvent manger l’équivalent de leur propre poids en une journée.

Il a également indiqué que dans le nord 31 000 hectares étaient déjà infestés par les criquets et que des essaims ont été détectés dans le sud, à Kaya, à 100 km de la capitale Ouagadougou.

«Nous craignons que l’invasion des criquets ne devienne plus importante dans les semaines à venir,» a déclaré Diallo. «C’est pour cette raison que j’incite les agriculteurs du Burkina Faso à récolter très tôt.»

Le Comité inter-Etats de lutte contre la sécheresse au sahel (CILSS) estimait le mois dernier que l’invasion des criquets pouvait détruire près de 20 pour cent de la récolte dans la région, qui s’annonçait bien vue l’abondance et la bonne répartition de la pluie.

Mais l’ampleur des dégâts devrait varier d’un Etat à l’autre. Alors que la Mauritanie estime qu’elle va perdre 40 pour cent des cultures et des pâturages, les autorités maliennes prévoient en privé qu’un tiers des cultures de cette année sera détruit par les criquets, le Sénégal espérant encore avoir de meilleurs résultats.

La semaine dernière, le ministre de l’Agriculture soulignait que les régions du sud et du centre du Sénégal, qui ont produit l’année dernière 80 pour cent de la récolte du pays, ont été jusqu’ici épargnées par les criquets.

Mais Cressman a tenu à faire savoir qu’il y a un risque sérieux que les vents dominants portent les essaims vers le sud où les criquets ravageraient alors les champs des cultures encore en maturation.


This article was produced by IRIN News while it was part of the United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs. Please send queries on copyright or liability to the UN. For more information: https://shop.un.org/rights-permissions

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