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Journal du Burundi : le jour du scrutin

The camp backs up to Rwanda’s border with Tanzania. The river flowing alongside the camp marks the boundary. Will Boase/IRIN
« Pouvez-vous croire qu’il y a 161 000 réfugiés [burundais] ? » L’auteur aspire à rétablir la stabilité dans son pays.
L’élection présidentielle a finalement eu lieu. Selon la radio d’État et les autres chaînes qui continuent d’émettre, tout s’est bien passé dans l’ensemble du pays.

À mon avis, le déroulement du scrutin n’est pas ce qui importe le plus. Je suis davantage préoccupé par la sécurité du peuple. Je m’inquiète pour ceux qui dorment mal parce qu’ils ont dû fuir ou parce que des étrangers pénètrent chez eux.

La nuit dernière, j’ai entendu des explosions de grenades et des tirs provenant de plusieurs communes de Bujumbura, y compris de Kamenge, où le calme avait régné jusqu’à présent. « Nous avons aussi entendu de la musique pendant la nuit », m’a dit un résident de Kamenge. Ses propos m’ont fait prendre conscience du fait que les gens s’étaient habitués à entendre des tirs.

Il reste peu de journalistes indépendants ou issus des médias privés au Burundi. Il est difficile d’obtenir des informations fiables. Après les explosions, une foule d’appels et de messages textes ont été échangés : « Qu’est-ce qui se passe ? Qui sont les tireurs ? Pourquoi ? »

Certaines personnes croient que les journalistes sont au courant de tout ce qui se passe. Ce n’est pas le cas, même si nous sommes souvent les premiers à communiquer les informations, qui sont ensuite confirmées par les autorités. La police n’a pas encore fourni de renseignements au sujet de l’identité des tireurs et des raisons de l’attaque.

Ce matin était un matin comme les autres. J’ai appelé un collègue de l’Iwacu Press Group, la seule société de médias privée qui continue d’opérer depuis les attaques perpétrées contre la presse à la suite du coup d’État avorté contre le président Pierre Nkurunziza, en mai. Nous devons travailler ensemble, ce qui est une bonne chose ; nous nous exposons, sinon, à des risques de kidnapping. Qui en informerait alors nos familles ? Voilà à quoi ressemble la réalité à présent.

Je n’ai pas vu beaucoup de gens voter dans les bureaux des quartiers et communes bujumburaises de Taba, de Kamenge, de Gihosha, de Rohero et de Nyakabiga. Les médias ont rapporté que le taux de participation avait été plutôt élevé à l’extérieur de la capitale, mais, d’après le président de la commission électorale, les électeurs n’ont pas afflué en masse dans les bureaux de scrutin de la ville. Ce n’est pas une surprise : le taux de participation aux élections parlementaires qui ont eu lieu le 29 juin était inférieur à 30 pour cent.

Dans certains bureaux de scrutin, j’ai vu des électeurs tenter d’effacer l’encre indélébile de leur doigt avec du jus de citron. D’autres trempent leur doigt dans l’huile avant de voter pour que l’encre s’enlève plus facilement ensuite. Il semble qu’ils ne souhaitent pas être clairement identifiés comme ayant voté.

L’élection a été vivement critiquée ce matin. Les États-Unis et la Belgique, notre ancienne puissance coloniale, ont tous deux dit que le scrutin manquait de crédibilité et qu’il ne devrait pas avoir lieu.

Ce n’est pas la première fois que nous entendons ce genre de remarque. Les gens déplorent la fermeture de l’espace politique, et après ? Je ne serais pas prêt à donner ma vie à un politicien, mais j’ai confiance en l’avenir de ce pays et en sa jeunesse. Je crois que les gens s’améliorent lorsqu’on leur donne la chance de le faire. Ce qui nous fait défaut aujourd’hui – à moi et aux autres jeunes Burundais –, c’est l’occasion d’instaurer la stabilité. Nous avons des problèmes depuis un certain temps déjà. Nous avons enterré de nombreux êtres chers. Nous ne connaissons pas vraiment l’identité de ceux qui nous ont abandonnés parce qu’aucune enquête crédible n’a été menée.
Cette élection ne m’apportera rien que je n’avais déjà.

Les Burundais comme moi s’attendaient à ce qu’une élection crédible permette de rétablir la stabilité. Quoi qu’il arrive, nous avons besoin de stabilité. C’est tout. Pour le moment, cette stabilité n’existe pas. Pouvez-vous croire qu’il y a 161 000 réfugiés [burundais] ? Il est bouleversant de découvrir, lorsque vous tentez d’appeler des membres de votre famille qui habitent la province de Nyanza Lac, que leurs téléphones ont été éteints. Pourquoi ? Parce qu’ils ont fui le pays. Les nombreux écoliers qui se trouvent parmi les réfugiés ont fini l’année scolaire, mais ils ont manqué leurs examens et se sont installés dans des camps en Tanzanie. La Tanzanie est devenue le nouveau chez-soi de plusieurs membres de ma famille. Je ne sais pas si cette élection permettra à mes proches et aux autres Burundais qui souffrent dans des camps au Congo et au Rwanda de rentrer chez eux.

Pour les entrées de journal précédentes, voir : Accrochages avant le suffrage

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