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Planification de la résilience : réussites et échecs

A father and son wade through flood water using a crude flotation device in the impoverished Tumana riverside community in Manila in August 2012  Jason Gutierrez/IRIN
Parmi les sujets abordés à l’occasion de la semaine du climat 2014, qui s’est tenue à New York du 22 au 26 septembre, on compte notamment le financement de villes résilientes, les actions des entreprises pour la résilience, la façon dont la collecte de données peut favoriser la résilience et le rôle moteur exercé par les femmes dans la planification de la résilience.

IRIN s’est penché sur certains succès, échecs et écueils de la planification de la résilience.

Les investissements dans la résilience aux aléas vont de l’imposition de codes de la construction aux systèmes d’alerte précoce, en passant par la gestion locale des déchets. Tous ces mécanismes sont essentiels pour protéger les sociétés contre les catastrophes.

« Il peut s’agir simplement de peindre des lignes sur les arbres pour mesurer le niveau des eaux [afin] de savoir quand il est temps de faire ses bagages pour partir avant qu’il ne soit trop tard », a dit à IRIN Michael Yates, directeur de la mission régionale de l’Agence des États-Unis pour le développement international (USAID) en Asie, en faisant référence à un projet financé par l’USAID aux Philippines.

Mais si la planification de la résilience se fait sans la participation de certains acteurs – des communautés vulnérables aux grandes entreprises – elle risque de ne rien apporter de nouveau, a averti le Groupe de travail sur les politiques humanitaires de l’Institut de développement d’outre-mer (Overseas Development Institute, ODI).

« Nous risquons d’intervenir en pensant que nous renforçons la résilience alors qu’en réalité nous ignorons les plus vulnérables », a dit Simon Levine, spécialiste en moyens de subsistance et vulnérabilité auprès de l’ODI. « En abordant le problème avec un nouveau langage et un nouveau cadre, nous en oublions les principes fondamentaux. »

Les réinstallations sans le consentement de la population, par exemple, peuvent faire plus de mal que de bien. La meilleure façon de procéder est de réunir des membres de la communauté scientifique, des gouvernements, du secteur privé et des populations concernées.

Quels sont les écueils ?

Au lendemain des inondations d’avril 2014 à Honiara, dans les îles Salomon, qui ont détruit le logement de plus de 10 000 habitants, le conseil municipal a déclaré qu’il était interdit de construire dans les zones riveraines, où des quartiers informels s’étaient créés, tout en poussant à la fermeture des centres d’évacuation. La population n’a donc eu d’autre choix que retourner s’installer dans des lieux avec un accès limité aux moyens de subsistance et aux services.

« Le processus de réinstallation [mené par le gouvernement] des personnes réfugiées dans les centres d’évacuation officiels d’Honiara est plutôt tendu, car les gens sont envoyés dans des provinces où ils n’ont jamais vécu, ou du moins pas depuis 20 ou 30 ans », a dit Philippa Ross, conseillère des Nations Unies en matière d’égalité des sexes et de protection des femmes basée à Suva, la capitale des îles Fidji. Selon elle, des centaines de personnes au moins demeurent sans domicile.

Sune Gudnitz, directeur du Bureau de la coordination des affaires humanitaires des Nations Unies (OCHA) à Bangkok, estime cependant que « le gouvernement doit interdire les constructions dans les zones dangereuses. »

M. Gudnitz a expliqué que la cartographie des géorisques à partir de vues aériennes prises par le Secrétariat général de la Communauté du Pacifique (CPS – une organisation intergouvernementale composée de 26 nations) avait révélé que les zones riveraines étaient dangereuses en raison des risques d’inondation.

M. Levine, de l’ODI, a qualifié ces réinstallations forcées de « réalité inquiétante », affirmant qu’elles ne sont pas rares.

« Il arrive que des populations des zones côtières à haut risque soient réinstallées au nom d’une planification urbaine résiliente, puis que des centres touristiques y soient implantés », a dit M. Levine. Il a notamment cité les réinstallations au Sri Lanka après le tsunami de 2004 dans l’Océan indien. Les décisions de réinstallation forcée s’étaient alors basées sur les aspects scientifiques et techniques de la résilience.

Gouvernance redevable

Selon Mercy Corps, qui travaille sur la résilience en Afrique de l’Est depuis 2004 et fait partie du Réseau pour la résilience des villes asiatiques au changement climatique (Asian Cities Climate Change Resilience Network, ACCRN) en Indonésie, renforcer la résilience des communautés est moins une question de science que de gouvernance équitable et redevable.

D’après l’Institut de transition sociale et environnementale international (Institute of Social and Environmental Transition International ou ISET-International), un organisme de recherche basé à Jakarta qui s’intéresse à l’adaptation au changement climatique dans les villes, ce sont souvent les plus pauvres qui établissent leur maison sur des parcelles urbaines vacantes dans des zones souvent inadaptées à la construction.

« Les travailleurs et les migrants affluent souvent en masse à la recherche de la moindre parcelle libre pour s’installer, car c’est la seule façon pour eux d’avoir accès à un travail et de scolariser leurs enfants », a expliqué Marcus Moench, président de l’ISET.

« Ce qu’il faut retenir, c’est que si la réinstallation est nécessaire, tout le monde doit être écouté, qu’il s’agisse [d’habitants] d’implantations sauvages ou non », a dit Paul Jeffery, directeur de Mercy Corps en Indonésie.

Des fosses septiques pour éviter la réinstallation

Selon les experts, il existe de nombreuses solutions pour améliorer la situation des populations sans les déplacer.

« Nous ne voulons pas empêcher les gens de décider où ils veulent vivre », a dit M. Jeffery, de Mercy Corps. « D’abord, [nous avons besoin de] savoir pourquoi ils vivent là et de nous assurer qu’ils sont conscients des risques, puis nous devons trouver des manières de mieux les préparer. »

Ainsi, un projet d’assainissement mené par Mercy Corps à Jakarta, qui est une ville exposée aux inondations, aide à l’installation de fosses septiques dans des zones densément peuplées pour protéger la population des risques sanitaires impliqués par le fait de patauger dans les excréments lors des inondations.

Tous les acteurs locaux ont été pris en compte : Mercy Corps est intervenu dans les communautés pour sensibiliser la population à l’importance des fosses septiques, qui sont installées dans des maisons individuelles. L’organisation non gouvernementale (ONG) a ensuite fait campagne pour que la municipalité installe de plus grandes fosses septiques dans les décharges locales pour que chaque foyer puisse y vider sa fosse régulièrement. L’ONG a incité à la création de petites entreprises, par le biais de microcrédits, pour transporter en charette à bras le contenu des petites fosses septiques jusqu’à la grande fosse centrale.

Le système bénéficie même d’un financement d’IKEA, l’enseigne suédoise, qui va payer l’installation de 100 fosses septiques dans le nord de Jakarta au cours des deux prochaines années.

Égalité des sexes et résilience

Selon les experts, soutenir une véritable résilience nécessite également de remettre en question la représentation de la communauté. La question de l’égalité des sexes, par exemple, peut faire ressortir les disparités de pouvoir exacerbées par des interventions pour la résilience mal conçues.

« Même au sein d’un même foyer, les individus vivent les chocs et les tensions de manière différente », peut-on lire dans un rapport publié par Mercy Corps en 2014. L’ONG a remarqué que lors des évaluations, les femmes avaient tendance à identifier des risques souvent absents des schémas classiques.

« La vision mondiale associée à la résilience reflète généralement les priorités des hommes plutôt que celles des femmes. Nous entendons seulement ce que les hommes considèrent comme important, car cela correspond à ce que nous supposons et pensons important, [et nous ignorons] quelque chose comme la maladie, qui affecte davantage les gens, mais ne constitue pas une crise telle que nous la concevons », a expliqué M. Levine.

Dans une étude commune publiée en 2013 sur le Kenya, l’Éthiopie et la république autoproclamée du Somaliland, la Fédération internationale de la Croix-Rouge (FICR) a remarqué qu’il fallait encourager les femmes à parler pour identifier les récentes sécheresses comme un risque.

« La résilience s’avère un investissement rentable »

« Les entreprises reconnaissent par ailleurs que la résilience s’avère un investissement rentable », a dit M. Yates, de l’USAID. D’après le bilan mondial de 2013 des Nations Unies, près de 80 pour cent de l’investissement économique provient d’entreprises privées.

« Les difficultés sont trop grandes pour qu’une entité ou un secteur puisse les surmonter seul », a dit Kyla Reid, directrice du Réseau de réponse aux catastrophes GSMA, qui fait le lien entre les opérateurs de téléphonie mobile et les organisations humanitaires intervenant dans les zones touchées par des catastrophes comme au lendemain du typhon Haiyan aux Philippines.

En août 2014, l’USAID a travaillé en partenariat avec la Fondation Rockefeller pour créer un prix de 100 millions de dollars pour inciter les acteurs des secteurs public et privé à inventer de nouvelles méthodes pour renforcer la résilience des populations.

dm/kk/cb-ld/amz


This article was produced by IRIN News while it was part of the United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs. Please send queries on copyright or liability to the UN. For more information: https://shop.un.org/rights-permissions

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