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« Laisser derrière soi tout ce qui meurt »

Le Somaliland, en proie à la sécheresse

Drought Somaliland Mohamed Amin Jibril/IRIN

La grave sécheresse qui sévit en Éthiopie a fait les gros titres. Le nord de la Somalie a pourtant également été touché, et c'est une région bien moins à même de faire face.

Quelque 385 000 personnes sont déjà aux prises avec une crise alimentaire dans l'État autoproclamé indépendant du Somaliland et la région semi-autonome du Puntland, plus à l'est.


Le Bureau de la coordination des affaires humanitaires des Nations Unies, OCHA, estime qu'environ 1,7 million de personnes - soit 40 pour cent des 4,6 millions de personnes peuplant la région - ont besoin d'une assistance humanitaire et d'un renforcement de leurs moyens de subsistance.

« Faute d'aide, 1,3 million d'entre elles risquent de sombrer dans une insécurité alimentaire aiguë », a-t-il prévenu.

Ali Sheik Omar Qabil, le directeur du département Santé familiale du ministère de la Santé, a dit à IRIN que plus de 650 000 personnes étaient touchées par la sécheresse liée au phénomène El Niño au Somaliland, et que la situation était particulièrement critique à l'ouest du territoire. « Les populations souffrent de la faim, de maladies et de taux élevés de malnutrition », a-t-il dit.

Bien que le nombre total de personnes dans le besoin en Éthiopie voisine soit nettement plus important - on estime à 16 millions le nombre de personnes susceptibles d'être affectées par la sécheresse d'ici le milieu de l'année, sur une population de près de 100 millions d'habitants - la Somalie est un pays nettement plus pauvre, doté d'un gouvernement moins efficace et d'un accès humanitaire bien plus restreint.

Décès par malnutrition

En raison d'El Niño, le Somaliland et le Puntland ont été consécutivement privés de deux saisons des pluies.

Les zones les plus gravement touchées du Somaliland sont les régions broussailleuses d'Awdal et de Selel. En temps normal, leurs cours d'eau peu profonds abreuvent le sol aride lorsqu'il pleut, créant ainsi du pâturage pour le bétail.

Les prévisions concernant les pluies Gu (d'avril à juin) « sont loin d'être favorables », selon un communiqué d'OCHA. Le Bureau de la coordination des affaires humanitaires des Nations Unies a lancé un appel de fonds d'un montant de 105 millions de dollars pour renforcer d'urgence l'aide « indispensable, vitale » et accroître la résilience dans le nord de la Somalie. « Si l'on n'obtient pas ces fonds maintenant, les conséquences seront graves », a-t-il ajouté.

Des décès imputables à la malnutrition ont déjà été signalés au Somaliland. « Nous savons qu'environ 12 personnes sont mortes de malnutrition et de faim dans les zones touchées par la sécheresse de la région », a dit Mohamoud Ali Ramah, le gouverneur d'Awdal, à IRIN.

Recherche de nourriture

Les gardiens de troupeau ont été contraints de s'éloigner sans cesse davantage à la recherche de pâturages. L'armée du Somaliland et des sociétés de transport privées ont pu ramener chez elles en camion quelques personnes restées coincées, notamment entre 700 et 1 000 familles originaires de la région éthiopienne de Somali, qui avaient traversé la frontière en quête de pâturages.

 « Lorsqu'ils ont perdu tous leurs animaux, les populations quittent la plaine du Guban en direction [des monts] Ogo, vers le sud », a dit Muhumed Abdi, du village de Gerisa, dans la région de Selel. « Ils laissent derrière eux tout ce qui meurt - qu'il s'agisse d'êtres humains ou d'animaux. »

Arden Buhane, un membre du Comité de lutte contre la sécheresse de la région d'Awdal, a dit à IRIN : « Nous sommes inquiets au sujet des éleveurs-cultivateurs du Somaliland, car ils ont perdu leurs animaux avec la sécheresse et ont épuisé leurs réserves de nourriture. »

Tous les animaux d'Hamda Osman sont morts.

« La dernière de mes 18 bêtes est morte la nuit dernière, et nous n'avons presque plus de nourriture car nous lui donnions nos réserves de sorgho à manger », a-t-elle dit à IRIN dans le village de Bus (région de Galibey).

Le manque d'eau et de pâturages contraint aussi les populations à avoir recours à des entreprises privées d'approvisionnement en eau par camion, ce qui alourdit les dépenses et l'endettement des éleveurs.

Hamse Qalinle s'inquiète pour l'avenir de sa famille. « En [mars 2014], j'avais 200 dollars d'économies, 10 sacs [50 kilos] de sorgho et 20 têtes de bétail. Mais cette année il ne me reste plus que cinq bêtes, qu'il faut nourrir comme des enfants. Ce sera difficile de survivre s'il ne pleut pas très vite. »

Tout le monde se débrouille comme il peut pour joindre les deux bouts. « Après avoir perdu nos animaux à cause de la sécheresse et avoir épuisé nos réserves de nourriture, nous avons commencé à brûler des arbres pour vendre le charbon ainsi obtenu au marché et nourrir nos familles », a dit Husein Abdillahi, un père de cinq enfants du village de Bus.

Problèmes de santé

L'insécurité alimentaire n'est pas le seul problème. Une épidémie de rougeole s'est déclarée dans l'est du Somaliland avec 29 cas confirmés à Buhoodle (région de Togdheer), à la frontière du Puntland. Les éleveurs fuyant la sécheresse depuis le Somaliland et le Puntland se sont installés dans les villages de la région, exacerbant ainsi les risques sanitaires et faisant peser une charge supplémentaire sur les communautés en difficulté.

« D'autres maladies se sont déclarées, diarrhée, toux et pneumonie notamment, ce qui complique [la situation pour] les enfants vulnérables affectés par la sécheresse », a dit Mohamoud Omar Yabe, le coordinateur du département Santé publique de la région d'Awdal, à IRIN.

Les États du Golfe - l'Arabie saoudite, le Qatar et le Koweït - auraient commencé à distribuer un peu d'aide au Somaliland, mais le volume exact de cette aide n'est pas connu.

OCHA souligne que les niveaux de financement sont particulièrement faibles pour des domaines aussi importants que la sécurité alimentaire et la nutrition. Sur les 885 millions de dollars prescrits par le plan d'intervention humanitaire de 2016, seuls 97 millions de dollars - soit 11 pour cent - ont été reçus à ce jour.

« Nous avons atteint un seuil critique au Puntland et au Somaliland », a déclaré Peter de Clercq, le coordinateur humanitaire des Nations Unies pour la Somalie, dans le communiqué d'OCHA.

« Des mesures d'urgence doivent être prises immédiatement. Autrement nous risquons une détérioration grave et rapide de la situation, car la sécheresse risque de s'aggraver dans les mois à venir. »

maj/oa/ag-xq/amz 

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