C’est le message principal du rapport publié jeudi par le Centre de surveillance des déplacements internes (IDMC) à l’occasion de la troisième Conférence mondiale sur la réduction des risques de catastrophes qui se déroule à Sendai, au Japon, du 14 au 18 mars. Les États membres des Nations Unies doivent adopter un programme mondial pour réduire les risques de catastrophes, dans le prolongement du Cadre d’action de Hyogo (CAH) adopté il y a 10 ans.
Le CAH a porté sur la réduction des risques de catastrophes, mais pas sur le risque d’être déplacé par une catastrophe naturelle. Depuis lors, des centaines de milliers de personnes ont péri dans des "méga-catastrophes" – séismes, tsunamis et cyclones – et il y a une prise de conscience croissante de la nécessité d’inclure dans les accords futurs le déplacement causé par les catastrophes.
Le rapport de l’IDMC mesure le risque de déplacement en évaluant la vulnérabilité d’une population donnée lorsque cette dernière est exposée à un risque. D’après la conclusion du rapport, les régions où l’urbanisation rapide et non planifiée a concentré un grand nombre de personnes dans des zones exposées à des risques graves et fréquents continueront d’être les premières touchées par les catastrophes.
Les petits États insulaires en développement comme Haïti, ainsi que les Philippines, présentent le plus fort indice de risque de déplacement futur en cas de catastrophe établi par le rapport. En Asie du Sud et du Sud-Est, le risque de déplacement devrait continuer à augmenter.
« Haïti est l’un des pays qui seront marqués par un déplacement incessant si nous ne prenons pas des mesures radicalement différentes », a déclaré à IRIN le directeur de l’IDMC, Alfredo Zamudio. « Les petites îles vont être particulièrement touchées à cause de la fréquence et de l’intensité des risques, mais il est possible de réduire leur vulnérabilité. »
Il a souligné que lors du tremblement de terre dévastateur qui a frappé Haïti en 2010, le Chili, son pays d’origine, a été beaucoup moins touché par un séisme d’une magnitude encore plus élevée. « La différence était qu’il existait au Chili une réglementation en matière de construction qui a commencé à s’établir au début des années 1960 et qui a été respectée. Ainsi, lors du grand tremblement de terre, les personnes ont eu plus de temps pour quitter les bâtiments construits de façon à les rendre plus flexibles. Cette réglementation a donc sauvé des vies. »
En revanche, il n’existait pas de normes de construction en Haïti où l’accès difficile à la propriété foncière et aux moyens de subsistance obligeait également la population à s’installer dans des zones à risques.
« La croissance économique d’un pays n’est pas suffisante [pour réduire le risque de déplacement] », a ajouté M. Zamudio. « C’est une question de développement, de gouvernance et de droits à donner aux habitants afin qu’ils puissent trouver eux-mêmes de meilleures solutions. »
L’étude a également révélé que près d’un tiers des éleveurs du nord du Kenya, du sud de l’Ethiopie et du sud et du centre de la Somalie pourraient être déplacés de façon permanente au cours des 25 prochaines années en raison de la sécheresse. Et cela sans même tenir compte du risque accru lié au changement climatique.
Réinstaller les communautés exposées hors de la zone de danger, comme le gouvernement des Philippines tente de le faire depuis le passage du typhon Haiyan qui a déplacé quatre millions de personnes en 2013, est une stratégie qui peut s’avérer hasardeuse. Un récent rapport de Refugees International a révélé que la politique de réinstallation mise en place après Haiyan avait été mal planifiée et appliquée, et qu’elle avait aggravé la vulnérabilité des populations touchées au lieu de les soulager.
« La réinstallation doit bénéficier de financements suffisants et être organisée en concertation avec les populations touchées », a signalé M. Zamudio. « Si la réinstallation consiste à déplacer les habitants dans des zones où ils n’auront pas accès aux moyens de subsistance ni aux services, alors cela ne va pas améliorer leur vie. »
Pour réduire le risque de déplacement causé par les catastrophes, les États devront s’employer à résoudre toute une série de problèmes de fond tels que la nécessité d’un meilleur aménagement urbain et d’un meilleur accès à la propriété foncière et aux moyens de subsistance. « Une politique seule ne résoudra pas le problème », a déclaré M. Zamudio.
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