« À l’approche de la saison chaude, des mesures d’intervention sont nécessaires pour résoudre le problème de la pénurie d’eau potable et réduire le risque de maladies liées à l’eau », a dit Tun Thaung, chef de projet de l’Association des aides médicaux du Myanmar (Myanmar Health Assistant Association, MHAA), depuis Sittwe, la capitale de l’État de Rakhine.
Selon les Nations Unies, l’État de Rakhine compte encore environ 115 000 personnes déplacées à la suite des violences interethniques de juin et octobre 2012. Des milliers de maisons et de bâtiments avaient alors été brûlés ou détruits et des douzaines de personnes avaient été tuées. Environ 85 pour cent des PDIP se sont réfugiés à Sittwe et dans les alentours.
Les déplacés, dont la plupart appartiennent à l’ethnie (musulmane) rohingya, vivent dans des camps temporaires surpeuplés, où les conditions de vie sont difficiles. D’autres sont dispersés à travers tout l’État et vivent sous haute surveillance dans leurs villages détruits.
Selon les estimations du gouvernement, 56 camps de déplacés seraient répartis dans neuf communes — plus de la moitié à Sittwe.
Environ cinq pour cent des PDIP, principalement de l’ethnie rakhine, se sont réfugiés en ville, tandis que 95 pour cent sont des Rohingya et se trouvent en milieu rural.
« Les services [d’eau, assainissement et hygiène] ne sont pas les mêmes dans les camps urbains peuplés de déplacés rakhine et dans les camps ruraux, où la plupart des réfugiés sont des Rohingya, » a dit Bertrand Bainvel, représentant du Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF) au Myanmar.
Selon une évaluation des besoins interagences, menée du 29 octobre au 9 novembre et couvrant 18 camps de PDIP et plus de 36 000 personnes, 60 pour cent des déplacés n’avaient pas un accès suffisant à l’eau potable et 70 pour cent n’avaient pas accès à des installations sanitaires adéquates.
Appel à l’action
En décembre, l’UNICEF a appelé à une action urgente, signalant que les plus vulnérables, notamment les enfants, étaient menacés par un risque important de diarrhée et d’autres maladies liées à l’eau.
Selon San Thein, chef d’équipe de l’organisation non gouvernementale (ONG) locale Action Based Community Development, certaines régions de l’État de Rakhine font face à des pénuries d’eau chaque année, pendant la saison chaude qui s’étend de mars à mai. « L’eau potable est particulièrement rare entre avril et mai », a-t-il dit.
En dehors de Sittwe, la situation est encore pire, ont dit des travailleurs humanitaires.
« Les conditions en matière d’eau, d’assainissement et d’hygiène à Pauk Taw et Myebon sont terribles, » a dit Matthew Edward Gray, chef de mission pour Solidarités International. Cela serait notamment dû aux tensions interethniques qui empêchent toute intervention à Myebon, aux importantes contraintes logistiques et au manque de travailleurs humanitaires à Pauk Taw.
« Si nous n’agissons pas rapidement pour mettre en place des systèmes d’eau, d’assainissement et d’hygiène, surtout à Myebon et Pauk Taw, la situation pourrait devenir désespérée d’ici un ou deux mois et se transformer en crise sanitaire. »
Hygiène personnelle
Selon les organisations d’aide humanitaire, la population des camps doit être sensibilisée à l’hygiène personnelle. Or, la construction d’un nombre suffisant de latrines dans les camps reste problématique.
Environ 35 pour cent des habitants de Rakhine défèquent à l’air libre, ce qu’ils faisaient déjà avant le conflit. Certains professionnels de la santé ont cependant bon espoir que la sensibilisation accrue à l’hygiène personnelle incite la population à abandonner cette pratique.
« Si l’on compare à la période précédant [le conflit], de plus en plus de personnes utilisent les latrines, ce qui est encourageant », a dit Naing Soe Aye, directeur de projet à Rakhine du consortium des ONG néerlandaises, qui intervient au Myanmar depuis début 2008.
Latrines remplies
Les organisations d’aide humanitaire craignent également que plus les PDIP restent dans les camps, plus les conditions sanitaires se détériorent. En l’absence de tout-à-l’égout et de système d’évacuation des déchets adéquat, les latrines temporaires, qui sont utilisées par un grand nombre de personnes, se remplissent rapidement — tous les trois mois environ.
« Dans certains camps, le manque de place fait obstacle à la construction de latrines et cela risque d’être encore plus problématique lorsque les latrines actuelles seront pleines », a dit M. Bainvel.
Si aucune décision n’est prise concernant la réinstallation des PDIP, l’UNICEF craint un recul dans les progrès réalisés et une augmentation du risque d’épidémie à l’approche de la saison des pluies.
De nombreux camps sont établis dans des zones de faible altitude pouvant être sujettes aux inondations.
« Il est peu probable que les PDIP rentrent chez eux bientôt », a dit Tun Thaung, de la MHAA. « Or, plus ils restent longtemps dans les camps, plus les risques sanitaires augmentent. »
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