Plus de la moitié des personnes détenues dans les prisons sierra-léonaises le sont sans avoir été condamnées, selon les informations révélées dans une enquête publiée récemment par Prison Watch, une association sierra-léonaise de défense des droits humains.
« Aux quatre coins du pays, des prisonniers sont en détention préventive depuis plus de trois ou quatre ans », a expliqué à IRIN Namsana Coker, un responsable de Prison Watch, à Freetown, la capitale. « Il y a un gros problème d’accès à la justice, en prison ».
Selon le rapport de Prison Watch, publié en février, et qui couvre la période allant de septembre 2006 à septembre 2007, sur les 1 899 personnes qui se trouvaient en prison fin septembre 2007, 698 étaient en détention préventive et 321 autres attendaient leur jugement.
Benedict Sannoh, chef du service des droits humains et de la primauté du droit au Bureau intégré des Nations Unies en Sierra Leone, a admis que la durée de détention et d’ajournement des affaires, dans ce pays, était « excessive ».
« Cela s’explique en partie par le cruel manque de moyens du parquet », a-t-il dit, notant que dans les années 1980, avant la guerre civile de 1991-2002, qui avait déplacé la moitié de la population et ruiné l’économie et les infrastructures sociales du pays, le gouvernement employait 27 procureurs, contre seulement sept aujourd’hui.
« Le juge ne peut pas rendre une fin de non-recevoir lui-même ; le procureur doit être présent, alors l’accusé reste en prison ».
« Mais cela marche dans les deux sens », a commenté M. Sannoh. « L’accusé peut aussi avoir été inculpé à tort et il a le droit d’être jugé en bonne et due forme, et il y a aussi la question du report des droits de la victime à la justice ».
Les conditions d’emprisonnement
L’association Prison Watch surveille également les conditions de vie des personnes détenues dans les 13 prisons qu’elle supervise aux quatre coins du pays. L’organisation qualifie « d’extrêmement rudimentaires » les conditions de vie des prisonniers détenus sur une période prolongée.
Les personnes en détention, les jeunes et les femmes sont détenus avec les prisonniers condamnés ; dans certaines prisons, ils sont même placés dans des cellules qui abritent plus de trois fois plus de personnes qu’elles n’en peuvent accueillir, selon l’association.
Seuls les condamnés à mort sont isolés : ils sont détenus dans l’énorme prison de Pademba Road, à Freetown, construite pour accueillir 324 personnes, mais qui en abrite effectivement 1 068.
Les prisonniers ne reçoivent normalement qu’un seul repas par jour, et les responsables des prisons doivent parfois aller eux-mêmes chercher de la nourriture pour les maintenir en vie.
« L’alimentation des prisonniers pose un grave problème », a expliqué Namsana Coker, le responsable de Prison Watch. « Il se passe parfois six mois sans que les prisons soient approvisionnées en nourriture – les prisonniers accusent les signes de la malnutrition, encore aggravée par un système d’assainissement insuffisant ».
Dans la plupart des prisons, les détenus dorment à même le sol, dans des « conditions hygiéniques et sanitaires déplorables », selon le rapport de Prison Watch.
En outre, toujours d’après l’organisation, les passages à tabac, les viols et la détention de drogue sont monnaie courante en milieu carcéral.
nr/cb/nh/ail
This article was produced by IRIN News while it was part of the United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs. Please send queries on copyright or liability to the UN. For more information: https://shop.un.org/rights-permissions