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« Une personne séropositive le restera toute sa vie »

Conscientes que l’aide internationale contre le sida ne sera pas éternelle, des associations burkinabè de personnes vivant avec le VIH ont organisé un Sidathon pour mobiliser les ressources internes et sensibiliser les populations sur les dangers d’une trop grande dépendance.

Lancée par le Réseau national pour une grande implication des personnes infectées par le VIH dans la lutte contre le VIH/sida (REGIPIV), cette opération qui a duré deux mois a officiellement pris fin en avril, mais les promesses de dons ont continué à arriver après cette date, ont expliqué ses initiateurs.

Le 31 mars, lors d’une émission spéciale du Sidathon à la télévision burkinabè, 32 millions de francs CFA (65 000 dollars) ont été récoltés. Le 17 Avril, un appel a été lancé aux Burkinabé de l’étranger pour qu’ils participent au mouvement national.

Au total, en ne prenant en compte que les dons en liquide, le Sidathon aurait pour l’instant récolté 40 millions de francs CFA (81 500 dollars), selon le REGIPIV, bien loin des 1,3 milliard de francs CFA (2,6 millions de dollars) que les organisateurs espéraient obtenir, en se fondant sur une estimation de 100 francs CFA de don par habitant.

Pour les associations de personnes vivant avec le VIH au Burkina Faso, cette mobilisation des ressources internes est pourtant aujourd’hui devenue une nécessité absolue.

«On ne peut pas continuer de compter sur les partenaires [internationaux] qui pourraient se retirer un jour, il faut que chaque Burkinabé se mobilise pour lutter aux côtés de ces partenaires », a dit Mamadou Sawadogo, coordonnateur du REGIPIV.

A l’heure actuelle, plus de 82 pour cent des ressources pour la lutte contre le sida au Burkina Faso proviennent de l’extérieur, selon les chiffres du Comité national de lutte contre le sida et les infections sexuellement transmissibles (CNLS/IST).

Ces financements étrangers comportent de nombreux inconvénients pour les associations qui en bénéficient. Martine Somda, coordinatrice de REVS+, association basée a Bobo-Dioulasso, dans l’ouest du Burkina, a expliqué qu’elle travaillait dans « le stress et l’incertitude ».

« Nous devons faire des acrobaties pour faire face à la prise en charge médicale, sociale, et psychologique, [avec] une masse de personnes qui comptent sur [nous] », a-t-elle déploré.

L’association REVS+, qui s’occupe de 1700 patients, dont 500 –sur les 600 qui en ont besoin- reçoivent des médicaments ARV (antirétroviraux), est en grande partie dépendante des financements internationaux.

« Nous sommes inquiets car en octobre prochain [notre] programme s’achève, que vont devenir les patients? Rien n’est prévu pour prendre la relève », s’est inquiétée Mme Somda, elle-même sous traitement depuis 2000.

A la tête d’un réseau de 51 associations qui recensent 5 135 orphelins, M. Sawadogo a souligné que le mode de financement actuel des associations avait pour conséquence un manque de prévisibilité et de pérennité dans les programmes de traitement.

« Les programmes d’aide durent en général entre six mois et deux ans, or une personne séropositive le restera toute sa vie», a dit le coordonnateur du REGIPIV.

Il a dénoncé « les procédures lourdes » qu’imposent les partenariats avec des bailleurs étrangers : des financements pour la prévention de l’épidémie ainsi que pour la prise en charge des malades, prévus depuis mars 2006, n’ont été disponibles qu’au cours du mois de mai 2007, a-t-il dit.

Le coût de la gratuité des ARV

Par ailleurs, l’absence de fonds locaux pour les associations peut constituer un frein pour les bailleurs étrangers, selon Mme Somda, qui a constaté que les associations disposant de leurs ressources propres offraient une garantie recherchée par les partenaires.

« Les gens aiment construire sur quelque chose qui existe déjà car cela prouve la crédibilité et la viabilité de l’entreprise», a-t-elle noté.

Les aides gouvernementales sont quant à elles nettement insuffisantes. Le principal outil de soutien aux malades mis en place par le gouvernement, le Fonds de soutien aux malades et orphelins du sida (FSMOS), accorde 100 millions de francs CFA (204 000 dollars) par an aux associations, dont 40 millions servent à financer la prise en charge des personnes infectées par le VIH.

«[C’est] une somme dérisoire, tout juste de quoi acheter des ARV pour 200 personnes », a regretté M. Sawadogo.

Environ 150 000 personnes vivent avec le VIH au Burkina Faso, qui affiche un taux de prévalence de deux pour cent, selon les Nations Unies. D’après le REGIPIV, 12 842 patients séropositifs reçoivent des ARV dans le pays, principalement dans les grandes villes, au prix subventionné de 5 000 francs CFA (10 dollars) par mois.

L’organisation du Sidathon a été soutenue par le CNLS/IST, qui estime, en dépit des demandes de plus en plus pressantes de la part des associations, que le pays n’a pas encore les moyens d’instaurer la gratuité des traitements ARV.

« Il faut que quelqu’un paye pour cette gratuité sinon nous risquons de nous retrouver sans un sou et ce sera la catastrophe, il est évident que nous ne pouvons pas continuer à toujours compter sur les partenaires», a dit Joseph André Tiendrébéogo, secrétaire permanent du CNLS/IST.

Il a rappelé que la tendance était à la stabilisation du taux de prévalence du VIH/SIDA, et que par conséquent il fallait « mettre l’accent sur les méthodes de prévention, et cela coûte cher ».

Les trois quarts des dons récoltés lors du Sidathon seront versés au FSMOS, le reste servant à couvrir les frais de cette opération et l’organisation de la prochaine.

Même si cette première édition du Sidathon n’a pas permis de récolter autant qu’ils le souhaitaient, ses initiateurs ont estimé que l’opération était une réussite, dans la mesure où il s’agissait avant tout d’une grande campagne de sensibilisation avec des conséquences sur le long terme.

« C'est une première et nous allons continuer dans les années à venir, avec une plus forte mobilisation », a affirmé M. Sawadogo. « Les bonnes volontés existent, il suffit de bien sensibiliser ».

bo/mj/ail


This article was produced by IRIN News while it was part of the United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs. Please send queries on copyright or liability to the UN. For more information: https://shop.un.org/rights-permissions

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